Nous sommes en 1962, Alix Dupin, jeune fille de vingt ans, fille d'un pharmacien de Nevers, vient de quitter le domicile familial et s'est réfugiée chez une cousine qui vit à Paris. Elle ne compte plus revoir son père. Elle a arrêté ses études de lettres et travaille comme secrétaire à Paris. Seule à une terrasse de café, elle repense à sa vie d'adolescente et à sa décision de fuir sa famille.
[...] Pourvu qu'elle ne s'entiche pas d'un étudiant en lettres, un de ces intellectuels contestataires, qui n'ont que Sartre ou Camus à la bouche, et braillent à tue-tête contre la guerre en Algérie. Leur avenir, d'est de finir au mieux professeur de lycée, avec de médiocres revenus, et une femme qui travaille et délaisse du même coup ses enfants. Voilà ce qu'il pensait, le père pharmacien, fils de pharmacien, et ce que je l'ai entendu dire un soir à ma mère, qui acquiesçait par résignation ou plutôt parce qu'elle s'était toujours dispensée du moindre effort de réflexion. [...]
[...] Écriture d'invention : monologue intérieur d'un personnage romanesque qui exprime les raisons et les moyens de sa révolte Nous sommes en 1962, Alix Dupin, jeune fille de vingt ans, fille d'un pharmacien de Nevers, vient de quitter le domicile familial et s'est réfugiée chez une cousine qui vit à Paris. Elle ne compte plus revoir son père. Elle a arrêté ses études de lettres et travaille comme secrétaire à Paris. Seule à une terrasse de café, elle repense à sa vie d'adolescente et à sa décision de fuir sa famille. [...]
[...] Sur la politique de Nevers, du département, de la France, et du monde, bien entendu. Il s'ouvrait de ses vues de préférence devant des hommes, justement le dimanche après déjeuner. Face à un auditoire aussi sérieux que lui, il dissertait sur l'équilibre du monde, la guerre froide, l'élection du président de la République au suffrage universel, sur l'école laïque, sur le concile de Vatican II, sur l'état des routes départementales dans le Nivernais, sur le remboursement des antibiotiques. Intarissable, solennel et définitif, sachant tout, jugeant sur tout dans la fumée des cigares, devant ses amis qui hochaient la tête, tandis que leurs conjointes roucoulaient entre elles dans un coin du salon, sur des sujets beaucoup moins sérieux. [...]
[...] Un jour, il y a trois mois, mon père entre dans ma chambre et me déclare qu'il pense me marier l'été prochain à un ingénieur que je n'ai jamais vu, fils d'un industriel qui a un manoir près de Nevers. Tout était pour ainsi dire préparé. Abasourdie, je lui dis qu'il n'en était pas question, qu'il ne m'imposerait jamais un mari, ni celui-ci, ni un pendant une semaine. J'étais bien décidée à camper sur mon refus. Mon père annonça la visite de l'ingénieur prétendant, un certain Romuald. [...]
[...] Et la petite Alix, comme elle a grandi et embelli! Sourires écœurants, mines joyeuses et niaises. Alix, après le café et les digestifs, dans l'odeur épaisse des cigares, devait se mettre au piano, et jouer à peu près n'importe quoi à l'assistance endimanchée qui digérait les bouchées à la reine et le saint-honoré. Comme c'est gracieux une demoiselle au piano, ses blanches mains fines et son cou allongé! Et puis la petite Dupin a eu son bachot et poursuit ses études, avant de se marier, ce qui ne devrait pas trop tarder. [...]
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