Danse Macabre, Hans Holbein le Jeune, mort, marchand, squelette
"Le craquement de l'allumette éclaira la pièce d'une lumière tamisée, presque paisible. Chaque foulée faisait chanter les lames de parquet à l'unisson, la mélodie était encourageante. Un pas de plus vers la mort, vécu comme un soulagement. Hans encercla la flamme avec sa main. La chaleur lui brulait la paume. Il aimait l'odeur et la couleur du feu, sa fragilité et sa violence. Chaque fois qu'il se rendait dans cette antichambre, il ne pouvait s'empêcher d'imaginer ce qui se passerait s'il venait à laisser s'échouer la flamme, incandescente, sur le sol boisé. Comme hypnotisé, il joua ainsi, quelques secondes avec elle, avant de l'accoler à la mèche de la bougie. Son ombre vacillante, balayée par l'orchestre des vents, faisait valser la mort. Là, assis dans les remous de la faucheuse dansante, il contempla le travail déjà achevé."
[...] Dans un effort final, il ferma les yeux et imagina l'ébauche. Debout au milieu d'une pièce entièrement faite de bois, il aurait fait face à la mort et lui aurait même rendu son sourire. Leurs doigts se seraient entrelacés, faisant d'eux les partenaires d'une danse macabre et enjouée. Autour d'eux, sa plume, trempée dans l'encre aurait fait valser les flammes au rythme de leurs éclats de rire. En arrière-plan, partout sur les murs, on aurait pu apercevoir l'ensemble de ses gravures, presque mouvantes, dans l'ombre du feu. [...]
[...] De sa main tâchée d'encre, Hans attrapa le bougeoir et passa en revue l'ensemble de sa collection. Le travail avait été colossal mais des gravures par dizaines recouvraient à présent chaque pan de mur. Durant plusieurs années, il avait fait du sablier son compère le plus fidèle mais aussi le plus effrayant. Sur chacune de ses toiles, il ne cessait de crier à qui voudrait bien l'entendre la finitude du monde et de la vie. Le temps court toujours plus vite. [...]
[...] Un personnage désarmant dans un décor funeste. Hans prit du recul pour admirer son œuvre. Le marchand et le squelette, les jambes mêlées, les bras entrelacés, indissociables, se faisaient face au premier plan. L'épée n'était que le prolongement du corps de l'épicier. Inséparables, ils étaient liés pour défendre coûte que coûte les biens et les finances de l'avare ignorant. Son panier en osier débordant le surpassait de plusieurs centimètres mais le bougre ne semblait pas flancher sous le poids de la cupidité. [...]
[...] Le seigneur n'était plus le juge du vice et de l'avarice. Épée et blason ne valaient rien face à l'omnipotence de la grande faucheuse. Les gémissements de la plume qui s'agitait dans l'encrier lui rappelèrent la marche funèbre de Chopin, dont il ignorait pourtant tout. Les cris du prêtre et du moine se mêlèrent aux complaintes de l'évêque ignorant. Le pépiement ravit l'artiste. La plume et les taches d'encre immaculaient la feuille de leurs pas de danse saccadés. Des pieds entremêlés qui jouaient la cadence d'une moresque obscure, dessinant petit à petit l'ébauche d'une nouvelle œuvre. [...]
[...] La Danse Macabre, L'Épicier ou Le Marchand - Hans Holbein le Jeune (1538) - Sujet d'invention Le craquement de l'allumette éclaira la pièce d'une lumière tamisée, presque paisible. Chaque foulée faisait chanter les lames de parquet à l'unisson, la mélodie était encourageante. Un pas de plus vers la mort, vécu comme un soulagement. Hans encercla la flamme avec sa main. La chaleur lui brulait la paume. Il aimait l'odeur et la couleur du feu, sa fragilité et sa violence. Chaque fois qu'il se rendait dans cette antichambre, il ne pouvait s'empêcher d'imaginer ce qui se passerait s'il venait à laisser s'échouer la flamme, incandescente, sur le sol boisé. [...]
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