Résumé de l'Ebook:
[...] Nietzsche s'est acculé lui-même à ne plus couvrir Wagner que d'un éloge verbal, techniquement singulièrement décevant. Il aura savamment ménagé un triomphal finale, tout en se condamnant lui-même à se contenter d'une cadence plate et usée jusqu'à la corde. Justifions-nous : le problème d'abord, et l'insurmontable difficulté qui en résulte. En 1876 Nietzsche ne s'est encore jamais expliqué publiquement sur la façon dont il conçoit personnellement l'union de la musique et du texte et sur le privilège écrasant qu'il accorde et accordera toujours à la musique pure. [...]
[...] Deuxième question, inextricablement liée à la première : Nietzsche entend-il de la même manière les vocables de fidélité et de rédemption ? Laissons encore de côté la question d'ailleurs très embrouillée de savoir ce que Wagner lui-même comprenait dans cette Rédemption dont il n'a jamais cessé de parler. Nietzsche peut-il partager la vision idyllique, quelque peu naïve mais assurément charmante, encore qu'un peu possessive, de la rédemption par l'amour fidèle. S'il s'agit bien de la femme, peut-il vraiment souscrire à cette foi-là, lui qui, publiquement, a déjà écrit sur la féminité quelques lignes d'une lucidité pour le moins impitoyable : "la curiosité, le mariage, la séduction, la convoitise, tous défauts essentiellement féminins" (NT p.66). [...]
[...] Triomphe inespéré de l'amour ? On pourrait le croire, mais Tristan conclut quand même en maudissant les "poisons" du "breuvage terrible" qui l'a "fiancé" au supplice et condamné à la souffrance. Kurwenal tire la leçon sur la "tyrannie de l'amour, illusion la plus chère aux hommes" (acte III, sc.1). Isolde peut bien revenir désormais, quoi qu'il en soit, Tristan veut mourir pour ne plus souffrir. Cela rappelé, écoutons une dernière fois ce que Nietzsche entend dans cette symphonie "sans texte " 258 D'emblée il nous l'annonce, c'est "le furieux appétit de vivre" qui sourd de "toutes les artères du monde" en même temps que du chant de tous les instruments de l'orchestre. [...]
[...] Premièrement, pourquoi entre tous, Nietzsche choisit-il aussi exclusivement de ne référer son analyse qu'au seul troisième acte ? Deuxièmement la façon dont il nous le présente, ne trahit-elle pas quelque paradoxe ? Troisièmement que fait-il exactement de cette analyse, qu'en omet-il de façon surprenante, et où est l'éloge d'admiration fascinée que nous attendions ? A notre première question, prise isolément, il est presque impossible de répondre : pourquoi le seul troisième acte ? N'y avait-il dans les deux premiers rien qui pût être entendu comme un vaste mouvement purement symphonique ? [...]
[...] Faust et Méphisto, incarnations de la modernité. Petit problème pour nous : Wagner, dans cette analyse suggestive, ressemble plus à Méphisto qu'à Faust. Et même s'il reste évident qu'aucun des deux n'est compréhensible sans l'autre, donc n'est réellement détachable ou discernable de l'autre, retenons néanmoins cet arrière-goût de soupçon sur l'identification de Wagner à Faust. La quatrième Considération inactuelle renouvelle l'allusion et redouble l'ambiguïté. On va le voir encore une fois : pour dessiner Wagner, Nietzsche pense à Faust, mais aussi le dépasse. [...]
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