La modernité incarnée par Charles Baudelaire, poète de la seconde moitié du 19è siècle français, établit une rupture avec les croyances et acquis antérieurs de la littérature et de la poésie. Il prend le contre-pied de la lutte entre classicisme et romantisme, et rompt de facto avec l'esthétique classique, puisqu'il tend, aussi bien par ses écrits que sa conduite, vers la libération de toutes considérations morales ou éthiques de la littérature. Dans son ouvrage de critique littéraire L'Art romantique publié en 1869, il annonce : "L'art est-il utile ? Oui. Pourquoi ? Parce qu'il est l'art. Y a-t-il un art pernicieux ? Oui. C'est celui qui dérange les conditions de la vie. Le vice est séduisant, il faut le peindre séduisant ; mais il traîne avec lui des maladies et des douleurs morales singulières. Il faut les décrire. Etudiez toutes les plaies comme un médecin qui fait son service dans un hôpital, et l'école du bon sens, l'école exclusivement morale, ne trouvera plus où mordre. Le crime est-il toujours châtié, la vertu gratifiée ? Non ; mais cependant si votre roman, si votre drame est bien fait, il ne prendra envie à personne de violer les lois de la nature. La première condition nécessaire pour un art sain est la croyance à l'unité intégrale. Je défie qu'on me trouve un seul ouvrage qui réunisse toutes les conditions du beau et qui soit un ouvrage pernicieux." (...)
[...] On voit ici la large imbrication entre beau et bon. Cependant, si l'on s'intéresse à la vie de Baudelaire, force est de constater que lui-même n'a pas toujours exemplifié cette rigueur et exigence morale. Les fleurs du mal ont par ailleurs été condamnées par la 6ème chambre correctionnelle qui a exigé leur remaniement. Ceci nous pousse à nous interroger sur le fondement réel de cette citation de Baudelaire extraite de l'Art romantique : ne peut-on prétendre à la littérature que si l'on veut proférer une morale et guider les autres ? [...]
[...] Comme le dit Baudelaire lui- même : le crime n'est pas toujours châtié et la vertu pas toujours gratifiée. De surcroît, faire le bien dans l'espoir d'une récompense abaisse celui-ci à un simple calcul intéressé et en dévient sa négation. Cet art est en réalité dévastateur moralement, et ne peut donc plus relever d'aucun critère de beauté. S'il semble difficile de concéder une certaine beauté au support d'une telle immortalité, il l'est tout autant de ne pas reconnaître la beauté de la rectitude de pensée et d'écriture des classiques, même pour Baudelaire. [...]
[...] Par-dessus l'horizon aux collines brunies, Le soleil, cette fleur des splendeurs infinies, Se penchait sur la terre à l'heure du couchant ; Une humble marguerite éclose au bord des champs, Sur un mur gris, croulant parmi l'avoine folle, Blanche, épanouissant sa candide auréole. Ce poème, Unité, illustre cette désinvolture, cette légèreté. Il n'y a là rien de moralisant mais une simple ode à la beauté de la nature, dont l'art tente de se faire le fidèle reflet. On perçoit dès lors le détachement de la beauté de l'art de son caractère moral. [...]
[...] Il prend le contre- pied de la lutte entre classicisme et romantisme, et rompt de facto avec l'esthétique classique, puisqu'il tend, aussi bien par ses écrits que sa conduite, vers la libération de toutes considérations morales ou éthiques de la littérature. Dans son ouvrage de critique littéraire L'Art romantique publié en 1869, il annonce : L'art est-il utile ? Oui. Pourquoi ? Parce qu'il est l'art. Y a-t-il un art pernicieux ? Oui. C'est celui qui dérange les conditions de la vie. [...]
[...] La première condition nécessaire pour un art sain est la croyance à l'unité intégrale. Je défie qu'on me trouve un seul ouvrage qui réunisse toutes les conditions du beau et qui soit un ouvrage pernicieux. Il peut paraître tout à fait étonnant de trouver la moralité mise en exergue sous la plume de Baudelaire, qui s'illustre notamment par la publication du recueil de poème Les fleurs du mal, scandaleux à bien des égards. En réalité, il prône une moralité et une beauté de l'art différentes, pécheresses, et tente de rebâtir sur cette base des fondements et motivations plus authentiques et réalistes à l'art pour ses contemporains. [...]
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