Paul Verlaine (1844-1896), lié au mouvement symboliste, est un poète important pour ses œuvres mais aussi pour son influence sur la littérature. II fut le premier à faire découvrir, sous le nom de « poètes maudits », Arthur Rimbaud, Stéphane Mallarmé ou Tristan Corbière. Dès son premier recueil, les Poèmes saturniens, il se dit soumis à l'influence maléfique de Saturne. Des élans contradictoires de mysticisme (Sagesse, 1880) et de sensualité (Fêtes galantes, 1869 ; Parallèlement, 1889) le déchirent. L'un de ses recueils les plus importants, Romances sans paroles (1874), contient le fameux « Art poétique », où il affirme la primauté de la musique dans la poésie.
Particulièrement depuis Charles Baudelaire, la poésie ne se cantonne plus à des sujets nobles ou à ton élevé : « La Charogne », dans Les Fleurs du Mal, fait d'un cadavre en putréfaction un objet esthétique dérisoire.
Dans « L'Enterrement », Paul Verlaine suit cette veine. Ce sonnet, résolument provocateur, tourne en dérision une cérémonie funèbre, ce qui tranche avec le ton mélancolique du poète, dans d'autres poèmes qui abordent le thème de la mort, comme « Colloque sentimental » ou « Mon rêve familier ».
Ici, les obsèques sont présentées comme un tableau vivant, parsemé de détails réalistes, mais l'écriture poétique tourne en dérision la cérémonie et permet une piquante satire sociale.
[...] On pourrait noter bien d'autres effets musicaux. Ainsi le vers 8 présente une allitération en : De la terre, édredon du défunt, heureux drille. Au vers on remarquera des allitérations en et en placées en chiasme avec le svelte trille La douceur du mol éboulement (vers rythmé de la terre et la légèreté du son de la cloche sont ainsi bien rendues. Enfin, l'apparition successive des différents acteurs, placés en général en début de vers, contribue à faire du spectacle un ballet bien réglé. [...]
[...] Cette vision contraste fortement, par exemple, avec l'angoisse ressentie par Ronsard dans ses Derniers Vers : Mon corps s'en va descendre où tout se désassemble. Ici, les expressions s'installe (vers bien chaud douillettement (vers créent un univers rassurant et agréable. La douceur de la mort s'étend donc naturellement sur l'ensemble de la scène. Paul Verlaine fait alterner des termes positifs et les termes connotant le deuil : à chaque détail de la cérémonie est associée une attitude joyeuse. Ainsi, le fossoyeur et l'enfant de chœur chantent. [...]
[...] Verlaine cite également les outils et les attributs religieux nécessaires aux obsèques. La cloche (vers fait écho à la pioche (vers ; leurs sonorités alternées se mêlent par la rime comme dans la réalité. Le surplis qui est le vêtement de l'officiant, intervient au vers accompagné du frac des croque-morts (vers tandis que, comme le défunt, le trou et le cercueil surgissent au milieu des vers 6 et 7. Ainsi, de la fosse aux discours, la cérémonie se déroule selon un ordre temporel, au rythme des apparitions et des actions des personnages. [...]
[...] Des sonorités variées s'y ajoutent : le trille de la cloche (vers la voix fraîche (vers de l'enfant de chœur, mais aussi le son plus discret de la pioche et de la terre qui tombe dans le trou. Pour transcrire cette musique, le poète use d'assonances et d'allitérations. Les sons sifflants et chuintants des vers 2 à 4 fossoyeur chante sa pioche la cloche lançant créent une harmonie imitative. Celle-ci est renforcée par la constante présence du son à la rime enterrement allégrement douillettement mais aussi à l'intérieur des vers chante au vers blanc au vers l'enfant au vers charmant au vers 9). [...]
[...] Au contraire, le seul lien mentionné est celui de la fortune qui va leur revenir et qui cause leur contentement. On peut même voir dans la gloire (vers 13) qui les ceint et leurs visages resplendissants (vers 14) un reflet des lingots ou des pièces d'or laissés par le mort. Et le terme élargis suggère peut-être la largesse financière dont ils font preuve pour l'occasion envers le personnel qui assiste à la cérémonie (les croque-morts, le fossoyeur, le prêtre, l'enfant de chœur), d'où la joie de tous. [...]
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