Arthur Koestler est un écrivain et journaliste d'origine hongroise. Après s'être installé en Allemagne où il suit des études d'ingénieur, puis en Palestine où il crée un journal, Koestler adopte la langue allemande et devient correspondant à Paris pour un journal allemand. Le journaliste adhère au parti communiste. En 1936, la guerre civile espagnole éclate. Koestler est alors correspondant de guerre pour le News Chronicle, un journal anglais. Il effectue deux voyages en Espagne. Lorsqu'il y revient en 1937, la prise de Malaga est imminente, mais le journaliste ne fuit pas et décide de rester sur place. Il est alors arrêté par les franquistes et emprisonné d'abord à Malaga puis à Séville. Cette captivité durera près de quatre mois.
Après un incipit romancé qui introduit le lecteur dans le contexte, la deuxième partie de l'œuvre se présente comme un reportage de guerre rédigé quotidiennement. Ceci commence lors du départ pour la ville de Malaga. Tout au long du voyage, Koestler rend compte de la situation politique et de l'état des lieux des villes dans lesquelles il passe. Dès son emprisonnement, l'œuvre prend une autre orientation : il ne s'agit plus de rendre compte de la guerre elle-même puisque l'auteur est alors coupé de l'actualité politique. Il se livrera donc à une réflexion et un tableau de la condition du prisonnier, sur la guerre elle-même ainsi que sur les répercussions psychologiques et morales qu'elle induit et surtout, sur l'attente aliénante du condamné à mort qui ne connaît pourtant pas quand viendra sa dernière heure. Ce sont ces réflexions écrites pour la plupart en prison qui constituent la matière première du Testament Espagnol. L'œuvre est donc une plongée dans l'intériorité d'un homme qui devient héros malgré lui, sujet pensant sur lui-même et pour le coup, sur son semblable.
[...] L'œuvre est donc une plongée dans l'intériorité d'un homme qui devient héros malgré lui, sujet pensant sur lui-même et pour le coup, sur son semblable. Intériorité versus extériorité est un leitmotiv présent en filigrane dans le Testament Espagnol. L'oeuvre est cousue de bout en bout par un fil directeur : l'opposition entre l'interne et l'externe. Ceci est notable dans la forme même de l'œuvre tout d'abord. En effet, Koestler a écrit un livre au genre multiple : tantôt reportage qui s'adresse au général, tantôt récit, mémoires parfois qui renvoient à l'Homme dans ce qu'il a de plus personnel. [...]
[...] Il lui a fallu retranscrire ce récit des évènements qui vont de son arrestation jusqu'au moment où il a pu se procurer de quoi écrire en prison à Séville. Ce long passage d'une centaine de pages constitue le cœur de la structure du Testament Espagnol. C'est durant ce passage romancé que l'auteur livrera ses pensées, ses réflexions sur le vif, en somme c'est de son histoire qu'il s'agit. Le lecteur, en tête-à-tête avec Koestler, partage tout avec lui comme un compagnon de cellule, il se fond en lui jusqu'à devenir lui. [...]
[...] En effet, la mort est la manifestation la plus concrète de la guerre, elle touche tous les hommes impliqués ou non dans le conflit. Dans l'œuvre de Koestler, elle ne choisit pas d'emporter un homme par ce qu'il est républicain, elle l'emporte car c'est un franquiste qui l'a lancé à la poursuite. Elle n'emporte pas un combattant étranger, ni un rouge, elle emporte un Homme. Les nuits d'exécutions, Koestler la voit passer près de lui à travers le judas de sa cellule, cela ressemble à un jeu de hasard. [...]
[...] Il alternera en effet entre des moments de pleine lucidité et d'autres instants où son inconscient prendra le dessus. Parallèlement, la prison deviendra pour lui le cabinet d'un psychanalyste mais il sera son propre thérapeute[11]. Koestler n'est plus journaliste quand il est incarcéré, il redevient Homme même si ce retour de l'homme vers lui-même passe par une phase animale (qui a lieu dans la prison de Malaga). Le journaliste fera l'expérience du temps, plus précisément de la notion du temps, de son incidence sur le reste. [...]
[...] La vision et la question du champs visuel sont omniprésentes dans l'œuvre : tout est vu à travers quelque chose. Ainsi, Koestler n'a de vision sur l'extérieur que cette grille à travers laquelle il voit les autres prisonniers dans la cour. Notons également les nombreuses œillades à travers le judas de la cellule de l'auteur. Entre les murs de sa cellule, Koestler va appréhender d'une nouvelle façon le monde qui l'entoure et les hommes qui le constituent. La prison deviendra une sorte de microcosme qui, paradoxalement, sera une sorte d'échappatoire à la guerre[8]. [...]
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