Les Tragiques, Agrippa d'Aubigné, supplices, discours apologétique, topos, athéistes, connaissances traditionnelles, De mortibus persecutorum, Lactance, structure poétique, ironie tragique, rhétorique
Les Tragiques ont été rédigés par Agrippa d'Aubigné en une quarantaine d'années et publiés en 1616. Il s'agit d'un recueil de sept livres où l'auteur se positionne en tant que prophète, intermédiaire de la parole divine. Il affirme avoir écrit cette œuvre sous l'inspiration sacrée et annonce l'apparition prochaine d'une justice divine sur terre, qui punira les méchants et confortera les fidèles protestants dans leur foi. Le chapitre VI intitulé Vengeances constitue notre étude. Ici, il s'agit de la fin des Vengeances, des vers 1067 à 1102, où Aubigné s'adresse aux scribes et leur demande de constater les miracles qui témoignent de la providence divine afin de les transcrire. Il résume en quelque sorte toutes les histoires évoquées précédemment afin de produire un effet d'accumulation et prouver au lecteur qu'il s'agit d'une intervention divine. En effet, Dieu va infliger aux criminels et aux persécuteurs de l'Église un châtiment proportionnel à leur faute. À travers l'étude de ce texte, nous nous demanderons comment Agrippa d'Aubigné parvient à convaincre le lecteur que les supplices évoqués ne sont pas dus au hasard, mais à la providence.
[...] Il procède en une énumération des supplices édifiants pour prouver qu'il ne s'agit pas de hasard, mais d'une réelle providence divine qui touchera tous les méchants lors de la vengeance de Dieu. L'auteur s'appuie également sur des connaissances traditionnelles telles que les recueils de morts exemplaires, les supplices intégrés dans les mœurs et l'imitation de la tragédie antique selon Aristote. Enfin, Agrippa d'Aubigné se sert des divers procédés de rhétorique et de poétique afin de rendre sa thèse encore plus logique et d'amener le lecteur à penser comme lui. [...]
[...] On perçoit une étroite correspondance entre les crimes commis et les châtiments infligés, à valeur de miracles. Cette mention des faits atteste de la providence et de la justice divine. Les punitions des tyrans sont spectaculaires, mais adéquates : ils sont punis autant qu'ils ont péché. On remarque une forme particulièrement ignoble de mort : celle du pourrissement par les vers, les poux et la « vermine » (v. 1098). Cette mort est attribuée aux criminels coupables de lèse-majesté : ils ont persécuté l'Église et les fidèles, se dressant ainsi contre le Tout-Puissant. [...]
[...] Picard était un « effronté » (v. 910) qui souhaitait mourir. Or le fait de vouloir s'ôter la vie avant que Dieu ne le décide est un péché. Dieu va alors lui ôter la vie avant qu'il ne meure par lui-même. Le vers 1095 (« frapper les froids méchants d'une froide langueur ») fait allusion à l'évêque Castelan (v. 897) qui a tué des fidèles sans pitié, avec une grande froideur. Dieu va alors le punir en lui attribuant une « froide langueur » (v. 1095). [...]
[...] Ces répétitions se lisent également comme des procédés d'insistance oratoire qui montrent au lecteur la conviction du narrateur face à son propre discours. Les répétitions lexicales se font à travers un système de dérivation : l'auteur évoque le châtiment (« une bouillante ardeur » v.1096) comme une forme dérivée du mot évoqué dans la désignation du criminel (« les ardents » v.1096). Cette dérivation permet de construire une corrélation étroite entre le crime et le châtiment ; elle est renforcée d'un chiasme qui souligne la symétrie du texte, et donc la bonne proportion des châtiments face aux crimes. [...]
[...] 845-860), qui bridait la bouche des mourants pour les empêcher de faire leur dernière prière à Dieu. Cette persécution contre les fidèles s'adresse indirectement à Dieu et manifeste donc de l'orgueil. Le personnage va donc mourir par les vers, subissant l'humiliation des orgueilleux. Le vers 1099 (« Rendre dedans le sang les sanglants submergés ») fait allusion au comte Félix de Wurtemberg (v. 795-800), qui jurait qu'il allait tremper ses éperons dans le sang des fidèles. Il mourut dans la nuit, étouffé par son propre sang. [...]
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