Dissertation de Littérature consacrée à La Chanson de Roland. Jean-Marcel Paquette définit l'oeuvre comme une tragédie de la parole. Est-ce le cas ou la chanson de geste véhicule-t-elle le tragique par un autre biais ?
[...] La musicalité est donc évidemment porteuse de tragique car elle associe son lyrisme au récit et à la parole pour faire naître une émotion. En conclusion, la définition de Jean-Marcel Paquette a soulevé plusieurs enjeux. Nous avons déjà constaté que La Chanson de Roland était en effet une tragédie de la parole, de par la théâtralité de cette parole et la logique de l'hubris, qui se font le porte-parole d'une fatalité inexorable. Nous avons ensuite approfondi la définition de Paquette en remarquant que la tragédie de la parole était secondée par la tragédie de l'action et de la représentation, déterminée par la mise en scène de l'événement tragique et la présence de décors émotionnels. [...]
[...] Or, il ne faut pas oublier que le poème s'inscrit dans une logique de l'action. Il ne s'agit donc pas de critiquer la définition de Paquette mais plutôt de l'approfondir. L'action est principalement tragique car elle est souvent annonciatrice de malheur. En effet, au même titre que la parole, l'action a des conséquences parfois fatales sur le destin des personnages. Ce tragique est lié au symbolisme de certains gestes ou comportements. Prenons comme exemple la laisse XXV, où Ganelon laisse tomber le gant par terre. [...]
[...] De cest message nos avendrat grant perte. N'oublions pas non plus que la bataille de Roncevaux et ses pertes, ainsi que les conséquences qui suivront, partent d'un malentendu tragique entre Roland et Ganelon. En effet, Roland, emporté par son insouciance, ne tient pas compte de la susceptibilité de Ganelon qu'il blesse sans doute sans le vouloir et lance des propos que son beau-père, dévoré par la jalousie, interprétera dans un sens défavorable. C'est donc malgré lui que Roland déclenche par son rire le drame de Roncevaux, rire d'étonnement et de perplexité où Ganelon ne verra que moquerie et défi (laisses XXI et XXII). [...]
[...] Dieu est à la fois présent pour leur donner la force pendant les combats, mais aussi pour les sauver de leur infortune. C'est souvent l'impuissance des personnages qui les pousse à se confier à Dieu, pour trouver une réponse à leur solitude tragique. Ainsi, lorsque Roland voit son ami Olivier mourir, il se trouve totalement désemparé : Deus ! dist li quens, or ne sai jo que face. Cet appel tragique à Dieu est bouleversant car Roland nous apparaît depuis le début comme un héros sans faille et sûr de lui alors que là il semble faible et fragile. [...]
[...] La mise en scène de l'événement et de la parole passe déjà par la présence de prolepses qui inscrit le poème dans la logique de la tragédie. En effet, la légende est connue d'avance, il n'y a pas de réelle attente. Le destin des personnages est déjà tout tracé et ils conforment leur action volontaire aux desseins de la force divine. Les anticipations sont donc un moyen poétique propre à frapper le lecteur/auditeur en ce qu'il évoque la fatalité de l'événement. [...]
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