Le renouveau des connaissances et le désir d'acculturation qui caractérisèrent la société européenne du XVIIIe siècle ont conduit les hommes des Lumières à effectuer un travail de vulgarisation des savoirs politiques, religieux et économiques, et ce grâce notamment à l'utilisation de fictions littéraires telles que le conte philosophique ou l'apologue. Cette capacité, toujours d'actualité, qu'à la fiction littéraire de transmettre une conception du monde a mené Tzvetan Todorov, philosophe, linguiste et sémiologue français d'origine bulgare, à considérer que si « une thèse nous traverse, une histoire nous habite ».
[...] Conclusion S'il est vrai que les histoires ont toujours eu la capacité de susciter l'adhésion du lecteur, de le mener avec plus de spontanéité à réfléchir sur sa condition, c'est-à-dire à l'habiter comme l'affirme Tzvetan Todorov, il ne serait pas opportun de réduire les atouts de la littérature au seul plaisir de raconter pour faire penser. Les thèses sont aussi des œuvres littéraires capables de faire réfléchir le lecteur avec profondeur. L'histoire et la thèse_ loin de s'opposer et malgré leurs méthodes différentes pour s'adresser au lecteur_ contribuent toutes deux à faire de la littérature un art indispensable à la réflexion des hommes sur eux- mêmes. [...]
[...] L'écrivain stimule le plus souvent dans son texte la raison et les sentiments de celui qui le lit, donnant ainsi à son histoire un sens profond et à sa thèse une sensibilité qui nous touche personnellement. Le subtil équilibre entre thèse et histoire, logique et sensibilité La puissance de la littérature réside dans ce subtil équilibre auquel elle parvient. C'est ainsi que dès le XVIIe siècle, Blaise Pascal dans L'esprit géométrique affirme que l'art de persuader consiste autant en celui d'agréer qu'en celui de convaincre La logique et la rhétorique des sentiments peuvent alors être associées dans des proportions diverses car la littérature a pour première finalité de s'adresser à l'être dans son ensemble : c'est ainsi que dans L'homme qui rit, Victor Hugo s'interroge, à travers le drame du personnage monstrueux Gwynplaine, sur la faculté qu'a l'âme humaine de dépasser les apparences. [...]
[...] Les écrivains ont ainsi successivement pu traiter et juger avec franchise les événements politiques, religieux ou sociaux qui nous ont traversés. L'argumentation à travers la thèse La seconde grande qualité qu'a la thèse est de pouvoir donner lieu à de remarquables développements qui ont pour but de soutenir un point de vue. Les Lumières particulièrement ont travaillé pour faire de leurs textes des écrits aussi scientifiques qu'accessibles. Ils parvinrent à joindre ces deux objectifs par un souci constant de l'argumentation. [...]
[...] Cette diversité des supports constitue indéniablement une richesse qui rend la fiction apte à susciter la curiosité des lecteurs, d'autant plus que le dépaysement de l'histoire racontée se manifeste aussi à travers le choix de repères spatio-temporels qu'effectue l'écrivain et qui sont le plus souvent éloignés de la réalité quotidienne. L'auteur invite le lecteur à rêver, à s'imprégner d'époques et de contrées lointaines. Les philosophes des Lumières ont ainsi souvent choisi de situer leurs récits au Moyen-Orient ou au Proche Orient : Zadig est fait ministre du roi de Babylone, Usbek écrit à ses amis qui sont restés en Perse. Les choix géographiques ne sont pas anodins. [...]
[...] Ce dépaysement peut prendre de multiples formes, d'abord parce que l'écrivain a le choix entre plusieurs supports. L'antiquité grecque a ainsi enseigné à des générations d'enfants l'épopée de L'Iliade et de L'Odyssée du poète Homère. Le Moyen- âge a prisé les genres du fabliau, du roman et des chansons de geste tels que les fabliaux de Rutebeuf au XIIIe siècle, le Roman de Renard des XIIe- XIIIe siècles ou la Chanson de Roland au XIe siècle. La fiction du XVIIe siècle peut être symbolisée, elle, par les Fables de la Fontaine. [...]
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