Alors que Polybe, pénétré du positivisme de l'époque alexandrine, avait développé une vision spatiale de l'Empire Romain, à la fois politique et géographique, Tite-Live envisage une perspective temporelle : les origines de Rome contiennent déjà, en germe, son accroissement et son apogée. L'idée d'une croissance organique vient sans doute de Poseidonios et elle fournit à l'historien latin en même temps une explication causale. Nulle part ce processus naturel de développement n'est plus sensible que dans le livre I : eo creverit ut — et partum et auctum imperium sit... (Praefatio). Or cet accroissement a lieu, conjointement sur un triple plan : celui du territoire de la ville, celui de la population, celui des forces morales enfin.
[...] C'est précisément cette influence du destin qui expliqué aussi l'accroissement moral de la citer dans la mesure où une multitude devient populus et que ce populus doit prendre en charge le gouvernement du monde. Déjà Énée est appelé à fonder une plus grande puissance. Le destin exigeait la fondation de la grande ville et l'avènement de la plus grande puissance du monde après celle des dieux. Tel est aussi le message de Romulus : La volonté du ciel est de faire de ma Rome la capitale du monde. [...]
[...] Mais les dernières collines, le Quirinal et le Viminal vont être occupés sous son règne ; on note aussi l'agrandissement des Esquilies et le report du pomerium ; car tout recul des murailles entraîne un recul égal de la zone consacrée. Servius Tullius accroît l'importance de Rome en étendant sa superficie et celle de l'Empire par sa diplomatie I). Enfin, le temple de Diane, construit à Rome avec l'aide des Latins, devient le symbole d'une supériorité, source de tant de guerres et l'Aventin devient ainsi le centre de la ligue, sous l'hégémonie de Rome : l'épisode signifie aussi l'assimilation d'une divinité sabine. [...]
[...] Il faut donc que par son effectif il soit à la mesure de l'accroissement ethnique : le transfert à Rome de la population d'Albe entraîne une augmentation proportionnelle du nombre des Sénateurs. Tarquin l'Ancien, à son tour, augmente la puissance de l'État par la nomination de cent nouveaux Pères (35,5). D'autre part, il faut qu'une population si considérable soit structurée Servius Tullus instaure donc la division en classes, institution très heureuse pour la future grandeur de l'Empire car le sens correspond à un État, qui en raison de son extension croissante, ne peut plus être gouverné comme une collection d'individus ; cette innovation aboutit aussi à confier toute la puissance aux hautes classes (43,10). [...]
[...] L'œuvre de Romulus commence matériellement par la construction d'un rempart fortifiant le Palatin : or, suivant la tradition étrusque, la fondation d'une ville est un acte rituel, entièrement volontaire : la notion de promerium fait également partie du rite étrusque ; l'Étrurie n'a jamais connu les groupements spontanés de population ; Tite-Live insiste sur ce point : I Pendant la période consécutive à la fondation et jusqu'à la destruction d'Albe, deux faits caractérisent la croissance de Rome : d'abord son développement anarchique en apparence, mais orienté réellement par une finalité interne qui n'est que la manifestation obscure de la volonté du destin ; en effet, la ville s'agrandissait, poussant sans cesse son enceinte sur de nouveaux terrains, plutôt en prévision des foules à venir, qu'en proportion de sa population actuelle (814). Matériellement Rome englobe dans l'enceinte et le promerium déjà tracés autour du Palatin, les terrains adjacents jusqu'au Capitole compris. L'extension du promerium est un acte religieux qui est toujours consécutif à un accroissement du territoire. L'autre fait important est l'embellissement matériel : Les Sabins s'étonnent de la position, des murailles, du nombre de ses maisons et qu'en si peu de temps, Rome ait pris un tel développement (819). [...]
[...] Ainsi, l'accroissement territorial est en majeure partie un phénomène urbain ; mais on ne saurait le ramener à des données simples. En effet, c'est un mouvement discontinu, tantôt devançant l'accroissement ethnique, tantôt devancé par ce dernier ; c'est un mouvement à la fois centrifuge et organisateur ; enfin, il y a alternance entre des périodes de rivalité avec le monde étrusque, et des périodes de collaboration, notamment en ce qui concerne les travaux nécessaires à l'organisation des parties basses. Les causes déterminantes sont tantôt personnelles, surenchère des rois l'un par rapport à l'autre et conviction d'être en accord avec le destin, tantôt religieuses, assimilation de divinités étrangères, tantôt, militaires : assurer la défense, sans qu'il soit possible de les discriminer. [...]
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