Souvent accusé d'avoir été davantage un poète qu'un dramaturge, Alfred de Musset s'est démarqué par l'écriture de pièces hybrides : les comédies proverbes. En effet, l'auteur d'On ne badine pas avec l'amour, Il ne faut jurer de rien, et Il faut qu'un porte soit ouverte ou fermée, a fait, à l'aube de sa carrière, le choix de composer « un théâtre non joué, s'adressant moins au regard de quelques spectateurs réunis qu'à l'intelligence d'un lecteur isolé », comme le rappelle Bernard Masson dans son essai Théâtre et langage, Essai sur le dialogue dans les comédies de Musset. Cela octroie ainsi plus de libertés à ses dialogues, dans lesquels il insère lieux et décors, mais aussi nombre d'images lyriques, au moyen d'une écriture aux sonorités à tel point poétiques qu'elle est qualifiée par Alain Hayvaert de « lyrisme dramatique ».
Dans son essai précédemment cité, Bernard Masson écrit : « L'esprit proprement poétique du dialogue de Musset tient moins, en tout cas, à la qualité intrinsèque des propos échangés par les personnages qu'à la conscience aiguë que le poète ne cesse d'avoir de la gravité du langage et de son rôle capital dans le destin de l'homme. ».
La forme du proverbe est associée à un théâtre de salon et d'agrément, où se jouent des pièces au dénouement heureux, conformément à la morale bourgeoise de 1830, c'est pourquoi ce genre théâtral se prête moins aisément aux sujets sérieux, et encore moins aux fins tragiques. Les ressorts du comique langagier n'ont pour but que le plaisir du spectateur et les retentissements qui définissent une formule proverbiale. C'est donc avec beaucoup de poésie et d'originalité qu'Alfred de Musset use de lyrisme, et s'éloigne des codes classiques du « théâtre à jouer », pour aborder des sujets graves, existentiels, sociétaux, parfois à résonnance autobiographique, mettant ses personnages face à ces interrogations profondes, ces doutes aigus, et face à leur destin.
Mais dans quelle mesure l'esprit poétique d'Alfred de Musset associe-t-il à un genre littéraire qui ne s'y prête pas forcément, à savoir la comédie proverbe, une gravité du langage qui joue un rôle prépondérant dans le destin des personnages, dans la mesure où cela les pousse vers une quête de vérité, du sens de la vie, de l'amour – reflets des doutes et de l'effondrement moral de la société de 1830 – ?
C'est alors dans la création d'un théâtre affranchi des obligations qui sont classiquement les siennes, écrit pour être lu, en tout cas en partie, et par le biais d'une liberté de formes et de dialogues souverains où les joutes verbales composent l'action, que la poésie de l'auteur rencontre le théâtre, dans un « lyrisme dramatique » hors normes. « Ces accès lyriques [qui] remplissent à chaque fois une fonction théâtrale essentielle », ainsi que l'explique Aurélia Loiseleur dans son chapitre intitulé Déjouer le théâtre ou le rôle de la poésie dans les trois proverbes de Musset, tiré du livre Lecture de Musset, font du dialogue à la fois un obstacle et un instrument de la vérité, celle de l'amour absolu, de la recherche de soi, du sens de la vie et de la communion avec le monde et la nature.
[...] Faisant du théâtre et de la poésie des genres à la fois en communion et communiquant, il perturbe les lecteurs avec des inflexions lyriques au cœur de ses comédies proverbes. Mais la poésie et le théâtre ne l'empêcheront pas de se tourner vers le roman autobiographique à peine déguisé, avec la parution en 1936 de La confession d'un enfant du siècle, qui retrace ses amours tumultueux avec George Sand. Cependant, il ne s'agit pas là du caprice d'un auteur tiraillé par ses influences et passions littéraires pour les grands poètes. [...]
[...] Que me conseilleriezvous de faire, le jour où je verrais que vous ne m'aimez plus ? / Perdican. De prendre un amant »), ce qui surprend d'autant plus que Camille sort d'un couvent où elle souhaite retourner vivre définitivement. Quant à Valentin, héros d'Il ne faut jurer de rien, c'est une relation parmi d'autres, superficielle, qui de son aveu, lui a ouvert les yeux. Amant d'une femme mariée, l'ironie veut qu'il ait pris en pitié le mari trompé. [...]
[...] Dans son essai précédemment cité, Bernard Masson écrit : « L'esprit proprement poétique du dialogue de Musset tient moins, en tout cas, à la qualité intrinsèque des propos échangés par les personnages qu'à la conscience aiguë que le poète ne cesse d'avoir de la gravité du langage et de son rôle capital dans le destin de l'homme. ». La forme du proverbe est associée à un théâtre de salon et d'agrément, où se jouent des pièces au dénouement heureux, conformément à la morale bourgeoise de 1830, c'est pourquoi ce genre théâtral se prête moins aisément aux sujets sérieux, et encore moins aux fins tragiques. Les ressorts du comique langagier n'ont pour but que le plaisir du spectateur et les retentissements qui définissent une formule proverbiale. [...]
[...] « Ici, l'action dramatique, si ténue soit-elle, se confond entièrement avec le mouvement même de la conversation », comme le précise Bernard Masson, dans son essai Théâtre et langage, Essai sur le dialogue dans les comédies de Musset. Ainsi, alors que le proverbe ne semble pas être la forme attendue et idéale pour aborder des sujets sérieux, la liberté qu'octroie à Alfred de Musset son choix d'écrire un théâtre qui a vocation d'être lu et non plus nécessairement d'être joué, lui permet des digressions, que ce soit par rapport au théâtre classique, au théâtre romantique ou même par rapport au genre du proverbe. [...]
[...] Le héros lyrique et 4 romantique s'impose peu à peu. Et si Alfred de Musset sait prendre ses distances avec le romantisme, il n'en demeure pas moins atteint par ce lyrisme ambiant et cette mélancolie qui offrent un autre regard sur l'importance de la poésie sous la plume de l'auteur. « Le Comte. Si l'amour est une comédie, cette comédie, vieille comme le monde, sifflée ou non, est au bout du compte, ce qu'on a encore trouvé de moins mauvais. [...]
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