Quand Giraudoux affirme "L'essentiel du théâtre n'est pas l'auteur, mais le théâtre lui-même" ("L'Auteur au théâtre", dans Littérature, 1941), il s'oppose à l'idée reçue selon laquelle le théâtre ne serait que pur reflet de la pensée du dramaturge. C'est cette même doxa qui est remise en cause par Anne Ubersfeld en 1977 (...) Le choix des exemples ne peut être considéré comme anecdotique. La réflexion sur la tragédie classique semble être frappée d'un interdit, alors que le théâtre romantique semble être le lieu d'une réduction du personnage théâtral, qui ne serait que simple double du dramaturge. Plus concrètement, Anne Ubersfeld met en évidence les idées reçues sur le théâtre (...)
[...] Le rapprochement entre maman et coquette est l'indice d'une relation incestueuse et par conséquent monstrueuse : la séduction qu'exerce Ysé sur Mesa est celle d'une mère et non d'une amante. L'écriture devient ainsi une sublimation des pulsions originelles, si l'on peut se permettre d'appliquer ici les terminologies établies par Freud (dans Un Souvenir d'enfance de Léonard de Vinci, 1910). Quant au théâtre de Musset, il peut être qualifié de célébration d'une jeunesse triomphante, tout particulièrement dans On ne badine pas avec l'amour (1834) : la figure du père, présente sous les traits du Baron, tend à s'effacer complètement de la scène, l'action lui échappe ; il finit par se réfugier dans son cabinet. [...]
[...] La simplicité de l'expression des sentiments entre en antithèse avec le compliment de Thomas. Même si la communication se fait par la médiation d'un opéra impromptu les propos sont si évidents que même Argan comprend ce qui se passe sous ses yeux : ARGAN. Non, non, en voilà assez. Cette comédie-là est de fort mauvais exemple [ . ] Montrez-moi ce papier. Ha, ha. Où sont donc les paroles que vous avez dites? Il n'y a là que de la musique écrite ? [...]
[...] C'est l'essence-même du texte théâtral d'être destiné à l'adhésion immédiate : La principale règle est de plaire et de toucher (Racine, Préface de Bérénice). Cette assertion dépasse la simple dichotomie entre le théâtre de l'ancien régime et le théâtre post-révolutionnaire. L'homme s'ennuie et l'ignorance lui est attachée depuis sa naissance [ . ] c'est pour cela qu'il va au théâtre Et il se regarde lui-même [ . ] Dans ces versets de L'Échange (1894), c'est bien la même esthétique de l'adhésion qui se retrouve chez Claudel. Si la scène est miroir, elle est avant tout miroir du public, et non de l'auteur. II. [...]
[...] Le genre théâtral apparaît donc comme le lieu où l'auteur est absent. Certes, on pourrait objecter que la voix de l'auteur se manifeste sur scène, notamment à travers la figure du raisonneur chez Molière. Mais cette voix est celle du conformisme, de la régularité, et n'a donc qu'un intérêt dramatique réduit. Le personnage marquant chez Molière, c'est celui qui est consumé par sa passion et en devient ridicule, et non le raisonneur, qui n'est présent que dans peu de scènes. [...]
[...] L'auteur ne se confesse pas, il crée. Comment ne pas partager ici les propos de Flaubert sur l'art ? L'artiste doit être dans son œuvre comme Dieu dans la création, invisible et tout-puissant ; qu'on le sente partout, mais qu'on ne le voie pas. Et puis, l'Art doit s'élever au-dessus des affections personnelles et des susceptibilités nerveuses ! (Lettre à Mlle Leroyer de Chantepie mars 1857) BIBLIOGRAPHIE Œuvres théâtrales Anouilh, Antigone (1944), La Table Ronde Beaumarchais, Eugénie (1767), Espaces ; Le Mariage de Figaro (1784), consultable sur http://fr.wikisource.org/wiki/Le_Mariage_de_Figaro Claudel, Partage de Midi (version de 1906), édition de Gérald Antoine, Folio Théâtre ; La Jeune Fille Violaine (1892) dans Théâtre, tome édition de Jacques Madaule et Jacques Petit, Gallimard ; L'Échange (1894), Folio Corneille, L'Illusion comique (édition de 1639), édition de Catherine Magnien-Simonin, Classiques Larousse Molière, Le Malade Imaginaire (1673), édition de Cécile Pellissier- Intartaglia et Marc Vuillermoz, Classiques Larousse ; L'École des Femmes (1662), consultable sur http://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99%C3%89cole_des_femmes Musset, On ne badine pas avec l'amour (1834), édition de Frank Lestringant, Le Livre de Poche ; Lorenzaccio (1834), édition de Robert Abirached, Folio classique Vigny, Chatterton (1835), édition de Pierre-Louis Rey, Folio Théâtre Ouvrages critiques, prose non narrative Beaumarchais, Essai sur le genre dramatique sérieux (1767), dans Œuvres, édition de Pierre et Jacqueline Larthomas, Gallimard Bénichou, Morales du Grand Siècle (1948), Folio Essais Diderot, Entretiens sur le Fils Naturel (1757), dans Entretiens sur le Fils Naturel. [...]
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