Le théâtre dans la Chartreuse de Parme de Stendhal

Résumé du document

Lorsque Stendhal rédige son article « la comédie est impossible en 1836 », beaucoup pensent qu'il ne fait que déguiser son échec personnel en une impossibilité de nature historique ou esthétique. La comédie au XIX siècle doit céder la place au roman. Or, Stendhal effectue un glissement littéraire, et fait adopter à ce genre qu'il aime plus que tout autre, le théâtre, la forme de celui qui est alors le plus à la mode : le roman. Ainsi, nous allons nous intéresser dans la Chartreuse de Parme, à tout ce qui peut relever de ce glissement d'un genre vers un autre. Pour cela, nous observerons tout d'abord la place du théâtre en tant que lieu de représentation dans le roman et l'Italie de Stendhal, avant d'examiner attentivement la théâtralité qui se met en place à travers les personnages et la cour despotique de Parme. Enfin, nous analyserons les procédés d'écriture qui sous-tendent cette théâtralisation du roman, et font de la Chartreuse, un roman non conventionnel

Extraits

[...] Narration et parabase On constate dans la Chartreuse, que de nombreuses scènes relèvent de la parabase : les objets comiques sont désignés comme tels par un commentaire explicite du narrateur. C'est un métalangage narratorial qui accompagne une parole ou une action, d'après Stendhal et le Comique, œuvre de Daniel Sangsue. Ainsi, les interventions des personnages sont souvent caractérisées de comiques ridicules plaisantes ou encore baroque on nous décrit aussi les réactions des personnages qui ricanent, ou se moquent des autres. Mais le rôle du narrateur est aussi fondamental ! [...]

[...] Or il ne sert à rien de s'attarder sur des évidences. Plus encore qu'au théâtre, la fin est expédiée puisqu'elle n'est pas centre d'intérêt, seul qui la rend nécessaire est digne d'intéresser le lecteur. La Chartreuse, comme tout texte théâtral, ne se nourrit que de rebondissements, et les platitudes sur lesquelles on ne peut passer, comme la mort des personnages, doivent cependant occuper le moins de place possible. Que nous apporte cette fin, si ce n'est de savoir que l'amour entraîne la mort, et que cette forme d'hybris grec dont Fabrice fait preuve, ne peut comme dans la tragédie que conduire au châtiment, et donc à la mort. [...]

[...] Le théâtre est donc un phénomène de société qui touche d'une manière ou d'une autre toutes les classes sociales de cette Italie du XIX siècle, malgré une très nette opposition entre des acteurs relativement indigents et des spectateurs issus des plus hautes sphères italiennes. Ajoutons aussi que l'Italie, terre natale de la comedia dell arte et de l'opéra bouffe est très marquée par cette forme d'art qui est omniprésente à la cour de Parme. B. Voir ou être vu Mais les classes supérieures s'y rendent non seulement pour voir jouer la comédie, mais aussi pour y être vu. On n'existe à la cour que si l'on se montre aux représentations. Celles-ci permettent donc de voir et d'être vu. [...]

[...] A ce sujet évoquons la rencontre entre la duchesse et Mosca qui à lieu à la Scala. La nature de ce lieu favorise une rencontre qui débute comme un jeu théâtral. Ainsi à la page 152, Mosca dit à Gina : Permettez- moi de jouer auprès de vous le rôle de l'amoureux Ainsi l'atmosphère qui règne au théâtre favorise les petits jeux galants de la cour. De même Fabrice ne se rend au théâtre que dans le but de voir jouer la petite Marietta cf. [...]

[...] Il en va ainsi des longues prêches de Monsignor Fabrice, qui relèvent d'une double mise en scène, à la fois celle de notre héros qui se livre à une véritable représentation passionnée, mais aussi celle des spectateurs, comme par exemple Gonzo qui place pour Clélia un fauteuil doré face à Fabrice, pour mieux voir certes, mais aussi dans l'économie de ‘histoire pour qu'elle soit vue. II. Des personnages de théâtre Or nos personnages, constamment entourés de ce monde de la représentation, tiennent eux aussi lieu de figures théâtrales. A. La cour de Parme : une matrice à acteur Ainsi, la cour de Parme est une formidable pièce moliéresque où règne le jeu de l'inauthentique. [...]