Le récit autobiographique de Jean-Paul Sartre intitulé Les Mots paraît en 1964. Sartre y raconte son enfance, non avec la complaisance qu'étalent souvent les souvenirs d'enfance, mais au contraire avec esprit critique et ironie. Il démystifie ainsi l'attendrissement dont beaucoup entourent cette époque de la vie, en affirmant : "J'étais un enfant, ce monstre [que les adultes] fabriquent avec leurs regrets." Le livre est divisé en deux parties : "Lire", "Ecrire". En effet, l'apprentissage de la lecture et de l'écriture ont été les deux événements les plus marquants pour l'enfant imaginatif et solitaire que fut Jean-Paul Sartre. Son enfance s'est déroulée parmi des adultes. Le jeune Sartre est un orphelin de père et est élevé par sa mère et son grand père Schweitzer.
Sartre fait dans cet extrait l'expérience de sa différence et nous dévoile comment il a pris refuge dans la littérature. Les mots deviennent ainsi ses seuls compagnons d'où le titre de l'œuvre. Ce texte est extrait de la première partie « lire ». Sartre se penche sur sa relation avec les autres enfants à travers l'expérience de ses promenades au Luxembourg. Dans tout ce récit, Sartre évoque avec une ironie impitoyable, bien que sans rancœur, ce qui a fait de lui un "enfant truqué", en même temps qu'il met en lumière la vigueur et la précocité de l'activité mentale qui lui a permis d'échapper par l'imagination à ce cadre étroit et artificiel.
L'intérêt du passage se trouve dans sa double lecture : c'est ainsi que nous étudierons dans un premier temps de quelle façon la vision enfantine du drame fait ressortir un certain pathétisme de la scène. Puis, dans un second temps nous verrons que le même évènement analysé cette fois par l'adulte met en lumière un certain comique de la situation.
[...] Il n'intéresse personne. L'antithèse à la ligne 2 résume cette différence. En effet, d'un côté Sartre s'approchait d'eux et les regarde avec des yeux de pauvres alors que les enfants ne semblent même pas le remarquer passant à côté de lui en le frôlant. Nous remarquerons que cette indifférence est perçue comme un jugement par l'enfant. Notons en effet le champ lexical de la justice aux lignes 8-9. Sartre parle de juges de pairs et de condamnation. Il s'agit ici d'une expérience difficile pour un enfant : Sartre se découvre laid, faible et non aimable c'est- à-dire non désiré. [...]
[...] L'adulte semble s'amuser de l'enfant qu'il était. Son auto satire se retrouve tout d'abord sur l'évocation de son drame. L'exagération de son malheur amène à sourire. Sartre semble amplifier de ce qui lui arrivait à travers l'utilisation des hyperboles : j'aurais abandonné mes privilèges. Même un rôle muet m'eut comblé, j'aurais accepté dans l'enthousiasme de faire un blessé sur une civière, un mort (ligne 7). Le crescendo ironique de sa dramatisation marque un certain sarcasme de l'écrivain. Son physique : Les multiples références à sa taille taille portatif format réduit participe au burlesque de la situation. [...]
[...] Quoi que je sente de moi, le jugement d'autrui entre dedans. Ce qui veut dire que, si mes rapports sont mauvais, je me mets dans la totale dépendance d'autrui et alors, en effet, je suis en enfer. Et il existe une quantité de gens dans le monde qui sont en enfer parce qu' ils dépendent trop du jugement d'autrui. Mais cela ne veut nullement dire qu'on ne puisse avoir d'autres rapports avec les autres, ça marque simplement l'importance capitale de tous les autres pour chacun de nous. [...]
[...] Les lignes 12-14 sont révélatrices de son comportement : Elle aimait que je fusse à huit ans, resté portatif et d'un maniement aisé : mon format réduit passait à ses yeux pour un premier âge prolongé On a l'impression que la maman prend la petite taille de son fils pour un petit âge. Elle veut le garder près de lui afin de le protéger. Nous pouvons donc dire qu'il y a un certain regard critique sur la mère qui croit bien faire et qui veut protéger l'enfant. Cette protection cependant surprotège l'enfant et le condamne à rester un éternel bébé. [...]
[...] Puis, il y a le moment nocturne pendant lequel il se couche. Description des personnages : La description même des personnages met en valeur un monde fait de séparations. Chez les enfants tout d'abord, nous retrouvons l'enfant Sartre seul. Cette solitude est marquée par l'emploi de la première personne du singulier je A l'opposé, les autres enfants sont désignés par la troisième personne du pluriel. Ces enfants forment un groupe dont Sartre ne fait pas partie. L'esquisse faite des mamans des enfants fait de nouveau ressortir une différence. [...]
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