Essentiellement philosophique et romanesque, l'œuvre de Sartre s'ouvre à la dramaturgie après 1946. C'est pour l'auteur un outil plus approprié pour rendre compte des drames individuels liés à l'Histoire. Dans Morts sans sépulture (1946), Sartre réagit face aux réalités de la Seconde Guerre mondiale : il se fait peintre de résistants, condamnés à mourir, interrogés par la milice. A l'image de son engagement politique, Sartre présente comme nécessaire l'engagement littéraire. Aussi participe-t-il à une conférence sur la violation des droits de l'Homme en Algérie (1958).
Avec Les Séquestrés d'Altona jouée en 1959, Sartre entend impliquer le spectateur dans la guerre d'Algérie, toujours dans la même optique d'engagement. Toutefois, par exigence esthétique, il reste à distance du problème, en le déplaçant dans le temps et l'espace. En effet, la pièce met en scène le drame d'une famille allemande, impliquée dans l'histoire nazie. Sartre systématise ainsi le traitement de l'Histoire en transposant l'univers de sa première pièce de théâtre, Huis Clos (1944), sur la scène mondiale.
Dans la scène 1 de l'acte V, la rencontre de Frantz et de son père donne lieu à une représentation de leur procès, sur le mode absurde. La comédie des deux acteurs nous mène à un dénouement caractérisé par l'ambiguïté et le ludisme de la rencontre dissimule difficilement la violence qui régit les rapports familiaux. La fin tragique signifie toutefois l'apaisement et la réconciliation des deux personnages centraux. Enfin, Sartre réalise à travers ces retrouvailles tant sa rencontre avec un père quasiment inconnu que son engagement littéraire. Aussi ce drame familial conduit-il à une approche objective de l'Histoire où la responsabilité de l'homme est mise en question.
[...] Les deux personnages meurent noyés dans l'Elbe. Si l'on voit dans l'élément de l'eau une métaphore du liquide utérin, la régression aboutit enfin à un retour vers la mère. III. Le problème historique III.a. Les responsabilités du père À la résolution d'un problème relationnel père/fils, d'ailleurs posé par l'absence réelle du père, Sartre superpose l'exposé de réflexions sur l'Histoire. À l'Œdipe de Freud correspondrait l'interprétation marxiste du monde. Dans l'idéologie sartrienne, non seulement chaque homme est le bourreau de l'autre, mais il est lui-même aliéné à l'Histoire. [...]
[...] On peut voir ici une dénonciation de la morale bourgeoise par Sartre. Sans se soucier de l'éthique, ce chef d'entreprise se fait complice des nazis en vendant des terrains –futurs camps d'extermination. Même s'il ne revendique pas l'idéologie nazie, son silence et sa mauvaise foi le rendent coupable. C'est bien le capitalisme qui lui sert de prétexte pour se mentir. D'acteur économique, le père est devenu impuissant face à l'Histoire. Il a été dépassé, car il ne voulait pas en tenir compte, comme le vieil Hindenburg. [...]
[...] Les Séquestrés d'Altona. Sartre.1960 Introduction Essentiellement philosophique et romanesque, l'œuvre de Sartre s'ouvre à la dramaturgie après 1946. C'est pour l'auteur un outil plus approprié pour rendre compte des drames individuels liés à l'Histoire. Dans Morts sans sépulture (1946), Sartre réagit face aux réalités de la Seconde Guerre mondiale : il se fait peintre de résistants, condamnés à mourir, interrogés par la milice. À l'image de son engagement politique, Sartre présente comme nécessaire l'engagement littéraire. Aussi participe-t-il à une conférence sur la violation des droits de l'Homme en Algérie (1958). [...]
[...] On assiste à une mise en abyme du théâtre par l'énoncé des figures de style, récurrentes nous l'avons vu : Coup de théâtre et effet de surprise. Cette tragédie sartrienne est tout à fait moderne. L'action du dernier acte débute au troisième coup de l'horloge qui renvoie aux trois coups d'un lever de rideau traditionnel. L'esthétique du théâtre dans le théâtre est ici largement exploitée. Les trois espaces scéniques le salon reproduit par la chambre, elle-même réduite en bureau- sortent du champ de vision avec le lieu imaginaire des Crabes. [...]
[...] Là-bas c'est le pouvoir suprême le pouvoir d'un Dieu qui peut donner la mort. Après l'échec dans le bien, Frantz atteint une certaine gloire, par le mal, qui lui était promise depuis l'enfance. Cette ambivalence, connue déjà par Goetz, provient dans ces cas d'un besoin d'exister et être reconnu. Frantz a ainsi cherché dans Hitler un substitut du père, un modèle qu'il a dépassé ; il devient la femme d'Hitler puis Hitler lui-même : Hitler m'a fait un Autre, implacable et sacré : lui-même. [...]
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