Roman, Milan Kundera, existence humaine, humanité, expérience littéraire, culture, société, réalité, monde, Balzac, Diderot, Victor Hugo, Du Bellay, Molière
Définir la littérature dans son sens générique revient à interroger sa fonction première, qu'elle soit individuelle ou sociale. Selon la tradition classique, celle-ci permettrait à l'homme de comprendre et de régler le comportement humain et la vie sociale. Si le roman a longtemps été un genre méprisé, c'est principalement en raison de la relation qui existe entre l'oeuvre et le réel. Le roman a donc pu apparaitre comme un danger dans la mesure où il a la capacité d'insinuer dans l'esprit du lecteur une idée ou un concept qui lui faisait défaut.
À ce propos, l'écrivain Milan Kundera déclarait dans son roman La Valse aux adieux publié en 1976 : « Dans la vie, l'homme est continuellement coupé de son propre passé et de celui de l'humanité. Le roman permet de soigner cette blessure ». Dans cette citation, Kundera met en avant la capacité qu'a le roman de « soigner » le lecteur.
[...] Le romancier passe toujours par une élaboration esthétique dans la rédaction de son roman. Par-là, il va déformer le réel pour en tirer une substance réflective. On ne peut donc pas lire un roman dans le but de lire le réel. En effet, on remarquera par exemple que le langage romanesque n'est pas le langage que l'on retrouve dans la « vie ». Par conséquent, le roman ne peut pas être le réel. Il n'est pas non plus une véritable représentation du réel, c'est-à-dire une image fidèle de la réalité. [...]
[...] Le propre du roman est également de « guérir » sans laisser un goût amer au lecteur. C'est également pourquoi le propre de l'homme est de vivre le présent avec légèreté, ce qui met en évidence Kundera. La nature-même de l'homme est de regretter le passé. Il en va de même pour le bonheur : l'homme ne connait le bonheur que lorsqu'il a expérimenté le malheur. Ainsi, l'homme n'appréciera l'avenir qu'en comparaison de son passé puisqu'il n'a pas conscience de la condition de sa condition présente. [...]
[...] Nous verrons donc par la suite que l'auteur doit avoir recours à des stratagèmes et des procédés rhétoriques et stylistiques afin de mieux sensibiliser son lecteur. Il est intéressant dans un second axe de lecture de développer l'idée selon laquelle lire un roman pour la réalité c'est se tromper sur sa fonction. En effet, l'auteur doit fuir le présent pour revenir dans le passé et s'éloigne donc du réel. Aussi, le roman n'est pas une représentation du réel mais plutôt une image globale de l'existence humaine. [...]
[...] Pour mener une réflexion sur le passé, l'auteur doit indubitablement nier l'existence de son présent. S'il peut être un point de comparaison, il ne permettra néanmoins pas de poser un regard réellement objectif. Par exemple, dans L'Ensorcelée, Barbey d'Aurevilly s'éloigne de la réalité afin de plonger dans le passé. C'est en s'inspirant de ses propres racines qu'il rédige son œuvre et s'implique dans la religion catholique qu'il avait alors jusque-là délaissée. On peut donc rapprocher l'histoire de Barbey d'Aurevilly à celle de l'abbé de la Croix-Jugan, qui pensant qu'il lutte pour une cause désespérée chercher à perdre la vie, à la différence que l'auteur fait de son passé une source d'inspiration. [...]
[...] L'écrivain et le roman font du lecteur un modèle de l'homme de libre, celui qui panse ses blessures, son manque de connaissance. On peut alors rappeler ici la notion de mimésis théorisée par Aristote selon laquelle le roman permet la purgation de l'âme. Par exemple, dans L'Ensorcelée, Barbey d'Aurevilly utilise le fantastique afin de faire vivre au lecteur l'expérience de la peur. Lorsque l'abbé de la Croix-Jean s'apprête à rendre l'âme, le lecteur questionne sa propre morale et ses propres choix face à une pareille situation. [...]
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