Michel Onfray considère que le roman ne propose guère une vision du réel, puisqu'il est associé "à l'affabulation, au mensonge, à l'invention, et à l'imagination". Affabulation, mensonge, invention, et imagination font directement référence à ce qui n'est pas réel, ce qui est construit de tout pièce. Le genre romanesque, par définition, est "une oeuvre d'imagination enprose, assez longue, qui met en scène dans un cadre spatio-temporel des personnages donnés pour vrais" (...)
[...] Le roman semble tout à fait capable de restituer le réel, comme le prouvent les œuvres des auteurs réalistes. Ce mouvement littéraire, de la deuxième moitie du XIXe siècle, a en effet cherche à montrer la vérité afin de la critiquer. Tout d'abord, les paysages et lieux dans lesquels évoluent les personnages de romans réalistes peuvent être décrits avec une précision extrême et restituer ainsi fidèlement la réalité. Bel-Ami, roman de Guy de Maupassant, illustre bien cette idée dès son incipit, en décrivant Paris. [...]
[...] De même, le cycle des Rougon Macquart (Zola) illustre cette idée d'imitation du réel car l'auteur a conçu l'histoire d'une famille sur plusieurs générations avec leurs personnalités, leurs ascensions et évolutions propres. Notons que le romancier peut décrire avec précision ces personnages (vêtements, carrures, etc.) ce qui leur donne une grande impression de réalité. C'est le cas du personnage de Georges Duroy dans Bel Ami (Maupassant). Ainsi, le roman semble pouvoir reproduire le réel, toutefois les romanciers sont soumis à différentes contraintes qui amènent à penser que leurs œuvres sont des fictions qui cherchent à restituer le réel. [...]
[...] Colin, le héros de L'écume des jours, roman écrit par Boris Vian, dispose d'un coffre qui se remplit tous les jours d'argent, vit dans une maison dont la surface se modifie en fonction de son humeur ou encore parle avec une souris. Ainsi, ce roman est une pure fiction mettant en scène des personnages dans un cadre surréaliste. Dans 1984 de Georges Orwell, le personnage principal évolue également dans un monde issu de l'imagination de l'auteur, où la vie londonienne est surveillée et dirigée par Big Brother. Les intrigues de romans sortent parfois complètement du cadre réel en inventant un nouveau monde ou un nouvel espace-temps. [...]
[...] Le réel peut ainsi être modifié ou amélioré, il est donc transformé par l'auteur. Ainsi, le roman apparait comme une fiction cherchant à imiter le réel, d'autant plus que l'écriture d'un roman induit diverses contraintes car le récit doit être plaisant, vivant et amener le lecteur à poursuivre son exploration. Les péripéties doivent être ordonnées, mises en valeur par divers procédés. Finalement, la citation de Michel Onfray semble se vérifier pour un pan de la littérature romanesque, mais elle ne peut faire consensus, puisque tous les romans, à l'image du mouvement réaliste, ne sont pas de la pure invention. [...]
[...] Le romancier naturaliste Emile Zola a également décrit Paris avec impression de réalité dans Le Ventre de Paris et La Curée. Régulièrement, les auteurs dépeignent les lieux en utilisant les registres des sens, ce qui confère d'autant plus de réalisme à leur écriture. Ensuite, les références historiques et sociales sont fréquentes dans les romans réalistes ou naturalistes, ce qui donne l'impression de restituer le réel. Les personnages des romans d'Emile Zola ou de Guy de Maupassant appartiennent ainsi à des classes sociales variées : les Forestier (Bel-Ami, Maupassant) ou Emma Bovary (Madame Bovary, Flaubert) appartiennent à la bourgeoisie; tandis que Etienne Lantier (Germinal, Zola) ou Gervaise (L'Assomoir, Zola) font partie du monde ouvrier. [...]
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