Le roman est ce genre polymorphe qui raconte avant tout une histoire. Il participe de l'épopée et du conte. Il se distingue de l'épopée en tant qu'il est écrit en prose, et du conte parce qu'il est une création originale. A partir du XVIème siècle, le roman s'inscrit progressivement dans la réalité. Les personnages, le plus souvent fictifs, vivent et agissent dans le monde réel, et non plus sans celui des mythes ou des légendes. Le roman diffère donc totalement des autres genres comme la poésie ou le théâtre. Pourtant, dans un article consacré à d'Annunzio paru dans la revue « le Mercure de France » en 1893, Rémy de Gourmont s'exclame : « le roman est un poème ; tout roman qui n'est pas un poème n'existe pas. » Rémy de Gourmont remet ici en cause la définition même du roman et de la poésie. L'affirmation du critique littéraire suscite alors plusieurs interrogations.
Qu'est-ce qu'un roman s'il est aussi « poème » ? Dans quelle mesure le roman est-il « poème » ? A-t-il essentiellement besoin d'être reconnu comme étant « poème » afin d'exister ?
[...] Valéry entrevoit le poème comme une hésitation prolongée entre le son et le sens avec les jeux phoniques, les rythmes, les images, les répétitions et les audaces d'écriture. Ce sont ces éléments qui rendent le poème attractif et captivant. Le roman ne possède pas les mêmes enjeux. Baudelaire considère que la poésie ne raconte rien. Il dissocie narration et poésie. Nous ne pouvons réduire la définition du roman à un pur aspect poétique. Le roman social et historique, par exemple, veulent avant tout dévoiler une réalité. [...]
[...] La poésie prend donc les apparences de roman en lui empruntant la caractéristique de la prose. Rémy de Gourmont n'a pas vécu assez longtemps pour voir, à la fin du XIXème siècle, l'invention par les symbolistes du vers libre qui représente une expérience d'émancipation par rapport aux règles et contraintes du vers rimé traditionnel. De nombreux poètes du XXème siècle le pratiquent assidûment à commencer par les surréalistes. Philippe Soupault, par ailleurs inventeur avec Breton de l'écriture automatique en prose, y voyait un instrument privilégié pour faire coïncider le mouvement de l'écriture avec le rythme naturel de la pensée. [...]
[...] Le poème ne parodie pas le monde mais le sublime ou retranscrit le secret de l'existence. Federico Garcia Lorca dans Al habla con F. Lorca définit la poésie comme le mystère de toutes les choses. Le roman ne peut donc pas être assimilé totalement au poème car il est avant tout miroir du monde. Il s'attache à l'exactitude des faits plus qu'à les enjoliver. Le poème, lui, sublime, arrange la réalité. Baudelaire décrit le laid, la charogne et la boue avec éclat. Zola ne les décrit que tels qu'ils sont. [...]
[...] Néanmoins, s'il faut identifier le roman comme étant un poème, il faudrait s'intéresser à la création poétique. Un texte dont le contenu est poétique amène le lecteur à réagir sur la matière même du langage, à ce sacrifice où les mots sont victimes selon Georges Bataille dans son ouvrage L'expérience intérieure. Le langage apparaît alors comme autonome, renvoyant à lui-même. Le linguiste Jakobson nomme fonction poétique celle qui, mettant l'accent sur le message pour son propre compte, met en évidence le coté palpable des signes. [...]
[...] Le roman diffère donc totalement des autres genres comme la poésie ou le théâtre. Pourtant, dans un article consacré à d'Annunzio paru dans la revue le Mercure de France en 1893, Rémy de Gourmont s'exclame : le roman est un poème ; tout roman qui n'est pas un poème n'existe pas. Rémy de Gourmont remet ici en cause la définition même du roman et de la poésie. L'affirmation du critique littéraire suscite alors plusieurs interrogations. Qu'est-ce qu'un roman s'il est aussi poème ? Dans quelle mesure le roman est-il poème ? [...]
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