La lecture permet de s'évader, d'oublier le réel ennuyeux ou douloureux. Le roman est par définition le genre même de la fiction à travers laquelle l'auteur s'ingénie à nous faire croire que l'histoire qu'il va raconter est vraie. C'est le cas de Marivaux qui, en 1742, fait paraître un roman, La vie de Marianne (en fait, le début de la publication a eu lieu en 1731), qui nous raconte la vie mouvementée de l'héroïne. L'auteur suit la définition du roman pour accréditer sa fiction : l'autobiographie de Marianne, sous la forme d'une lettre qu'elle aurait écrite à une amie, a été retrouvée, à l'occasion de travaux, « dans l'enfoncement d'un mur » (...)
[...] Mais il ne faut pas oublier la complexité des personnages imaginés par les écrivains. Car ces créatures livresques semblent de chair et de sang : elles se réjouissent, se peinent, souffrent, aiment, détestent et meurent comme nous. Les sentiments humains et les passions sont analysés. Il en est ainsi de la jalousie qui intervient dans Germinal (1885 et treizième volume) quand Zola place Catherine entre Étienne Lantier et Chaval. La précision de l'analyse psychologique donne vie aux personnages du roman. [...]
[...] Enfin, certains romanciers montrent les coulisses du roman, dévoilant en remettant en cause le concept de personnage. C'est ici le cas de Diderot dans Jacques le fataliste. Il y instaure une écriture romanesque moderne, où les niveaux de récit se chevauchent, où les instances d'énonciation se multiplient (les personnages devenant narrateurs) et où les digressions par rapport au thème central constituent l'essentiel du roman. À de multiples reprises, l'auteur interrompt la trame narrative pour prendre le lecteur à partie. La vocation du roman, qu'il veuille nous soustraire au réel ou au contraire nous y plonger, n'est-elle pas finalement de nous amener à nous interroger sur le réel et ainsi susciter une réflexion ? [...]
[...] Le roman historique prend lui des libertés avec l'Histoire, comme les romans d'Alexandre Dumas. Il est ainsi licite de dire qu'il existe un contrat tacite entre l'auteur et son lecteur : ce dernier sait parfaitement que les personnages sont fictifs. Pour autant que le romancier donne l'illusion que ses personnages sont des êtres de chair, ils sont cependant bien différents des personnages réels. Il peut s'agir de personnages invraisemblables, comme les Lilliputiens que découvre Gulliver (Swift, Les voyages de Gulliver, 1726). [...]
[...] Par définition, le roman se devrait de nous faire oublier que ses personnages sont fictifs. Mais le lecteur, tout comme le spectateur de cinéma et à un moindre degré de tour de magie, n'est pas dupe, car le pacte est clair : le roman est un mirage et les procédés qui créent l'illusion du réel, comme ceux qui la dénoncent, sont avant tout les ressorts de notre plaisir. Ce genre littéraire mêle judicieusement fiction et réalité afin de nous séduire pour mieux nous inciter à poser sur le monde réel qui nous entoure un regard critique, sensible et interrogateur. [...]
[...] La lecture procure un espace d'évasion et le lecteur attend que le roman lui fasse oublier que les personnages sont fictifs. Lorsqu'il débute la lecture d'un roman, le lecteur veut vivre par procuration dans un monde imaginaire séduisant ou palpitant, croire aux personnages et s'identifier à eux, comme pour le héros du roman d'aventure ou l'enquêteur dans le roman policier. Partant du principe que le lecteur veut être ému par le personnage, le registre littéraire de choix est le pathétique : il amène à croire aux personnages. [...]
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