Séduisantes, l'une comme l'autre, conflictuelles, l'une comme l'autre, inquiétantes, l'une autant que l'autre, conquête et révolution forment un bien curieux ménage. Elles se prévalent de légitimités identiques, défendent généralement les mêmes causes et aspirent toutes deux à l'universalité. Ces deux extrêmes s'attirent à un point tel que l'on ne pourrait qu'imaginer leur union indéfectible. Le divorce de ces deux âmes-sœurs ennemies est pourtant permanent : elles étendent à l'infini leurs reproches respectifs et se disputent puérilement la garde de principes qu'elles ont maternés, en oubliant trop souvent les intérêts qu'elles doivent servir.
Le temps, en revanche, ne les oubliera pas. Vindicatif, il se souvient de tout : de leurs croyances, de leurs imprudences, de leurs excès. Il se souvient, juge et punit : les fontaines, où conquête et révolution puisent leurs nouvelles et puissantes idées, ne seront bientôt plus de jouvence ; bien qu'asséchées, les patiences que cultivaient leurs apôtres ne veulent déjà plus boire de leurs eaux troubles. Par ses mesures envahissantes, la conquête n'améliore plus le quotidien de ses fidèles; elle l'empire. Par ses plaintes incessantes, la révolution ne fait plus battre les cœurs; elle les soulève. Les cieux s'assombrissent, les brouillards épaississent l'atmosphère. La confusion domine les esprits : les uns prennent les armes pour vaincre les conquérants; les autres, épuisés, finissent par se rebeller, contre la révolution elle-même.
La raison seule peut apaiser la digestion de toutes ces luttes intestines. L'Homme, alors, devra se laisser apprivoiser, y goûter et apprendre à l'aimer. Mais, afin d'accéder au jardin où pousse cet onctueux fruit de la passion, il devra avant tout résoudre une délicate énigme :
« Sur terre, il est un être à deux, quatre, trois pieds, et même voix toujours; le seul dont le port change parmi tous ceux qui vont rampant au ras du sol, qui montent dans les airs ou plongent dans l'abîme. Quand, pour hâter sa marche, il a le plus de pieds, c'est alors que son corps avance le moins vite. »(Anthologie Palatine XIV). Cet être doit-il mettre un terme à l'indissolubilité de ce divorce ?
[...] Jean-Marie Denquin, sciences politiques). Cependant, il est difficile de concevoir qu'un homme puisse, "en toute bonne foi signer des traités aujourd'hui et les rompre froidement demain si l'avenir du peuple allemand est en jeu." Le non respect de la parole donnée (pacta sunt servanda) et la bonne foi sont, a priori, incompatibles. Il ne semble guère possible d'adopter, de bonne foi, un comportement déloyal ! C'est pourtant la voie qu'Adolf Hitler s'était tracée. Etait–il de bonne foi ? Dans ses rapports avec ses cocontractants, il ne l'était certainement pas. [...]
[...] En ripostant, l'agressé contribue à la défense de la société qu'il représente. L'attaque, selon Hegel, est la négation du droit; la défense est la négation de cette négation, donc l'application du droit". Une révolte difficilement proportionnée à la gravité de l'oppression Pour ne pas être, à son tour, injuste, la résistance doit être mesurée, c'est-à-dire proportionnée à la gravité de l'oppression. La proportionnalité, alors, est attachée à la protection de la personne humaine : pour parvenir au résultat souhaité, il est nécessaire de respecter sa dignité. [...]
[...] La conquête : une prise par les armes ou par les sentiments ? Laïos est devenu une source d'admiration pour Œdipe : il est, pour ce dernier, le plus grand et le plus fort de tous les rois, celui dont le jeune prince veut attirer le regard (Rufo, Œdipe toi-même). Il n'est désormais plus question de rivaliser avec lui. Œdipe veut plaire à ses parents, en accomplissant chacun de ses devoirs. Il veut plaire, pour être reconnu, pour être aimé. [...]
[...] Or, il est certain que cette dispersion de ses forces est l'une des causes essentielles de sa défaite. Il est indispensable de respecter les règles posées par le législateur, puisque ces règles sont admises par tous, ce qui inclut les potentiels partenaires. Autrement dit, il faut inspirer confiance, afin d'user du plus subtil des moyens de la conquête : la séduction. Parce que toute victoire dépend largement des alliés, il convient de se donner la possibilité de les choisir. Le contrat vassalique plaçait cet impératif au premier rang de ses préoccupations : après s'être conformé à la cérémonie de l'hommage, le vassal jurait à son seigneur fidélité et sécurité (fidem et securitatem). [...]
[...] Mais, afin d'accéder au jardin où pousse cet onctueux fruit de la passion, il devra avant tout résoudre une délicate énigme : Sur terre, il est un être à deux, quatre, trois pieds, et même voix toujours; le seul dont le port change parmi tous ceux qui vont rampant au ras du sol, qui montent dans les airs ou plongent dans l'abîme. Quand, pour hâter sa marche, il a le plus de pieds, c'est alors que son corps avance le moins vite. »(Anthologie Palatine XIV). Cet être doit-il mettre un terme à l'indissolubilité de ce divorce ? La conquête œdipienne La première scène que tout Homme est appelé à jouer se situe devant le palais d'Œdipe, à Thèbes. Deux autels imposants accueillent toutes les vies qui doivent ici commencer. [...]
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