On a décrit dans les parties précédentes le personnage de Tartuffe. Dans la pièce, Molière l'a examiné, critiqué, observé à travers les mots de ses personnages, il nous est donc à la fois bien connu et mal connu lorsqu'on l'aborde l'acte III. Selon Dorine, c'est un gourmand, gras, bon vivant, un parasite qui se nourrit sur le dos de la mère de famille et de ses enfants en accaparant argent, nourritures, caresses et amitié du père de famille qui selon elle, « le peut épouser sans nul empêchement ». Selon Orgon c'est « un homme… qui…ah !...un homme… un homme enfin » qui possède des qualités et des charmes incomparables, un mystique, un saint, un ange. Ce sont les deux visions de ces personnages (dont les rôles sont tenus par Molière et Madeleine Béjart, les plus influents de la troupe) qui sont les plus complètes et les plus claires, pour Dorine, Orgon est « un homme hébété » et pour le maître de maison, sa servante est « une peste ». Ce sont les deux chefs de famille, l'officiel et l'officieuse qui s'opposent dans les deux premiers actes (en effet, Cléante agit sur le conseil de Dorine). La dialectique de ce troisième acte se fonde sur la rupture et la continuité.
[...] Cela peut expliquer que certaines mises en scène présentent Tartuffe comme un homme séduisant, par opposition à Orgon qui est vieux et laid. Le Ciel est désigné comme étant L'auteur de la nature comme si Molière se mesurait au Ciel en opposant son propre personnage (Tartuffe) à celui où le Ciel lui-même s'est peint (Elmire) et lorsque plus tard il fera référence aux galants de cour qui sont vains dans leurs paroles il s'oppose bien sûr à eux par ses vers, et se trouve à cet instant être davantage Tartuffe qu'un galant de cour. [...]
[...] Si on considère que la première version s'achevait ici, que le pauvre homme devenait riche et puissant et la comédie prenait fin, ce serait, au sens fort du terme, une comédie de l'hypocrisie. Elle montrerait une fin où les bons sont récompensés et où les méchants envieux en crèvent de dépit C'est la victoire de l'hypocrite qui conserve son masque du pauvre homme ce serait une comédie qui se moque d'elle-même, qui se trompe elle-même dans sa fin heureuse. La vision triomphante est celle du personnage aveuglé. Molière, en 1664, commençait seulement son combat et l'achèvera avec ses deux autres actes. [...]
[...] Il se retrouve obligé de se jeter aux pieds de Tartuffe pour demander pardon, ce qu'il refuse. S'il avait accepté son statut de victime, il aurait été battu par son père à coups de bâton mais aurait pu confondre Tartuffe s'il ne l'avait pas sauvé malgré le ne me retenez pas d'Orgon. Damis est obligé de fuir et Tartuffe en sort victorieux, la scène suivante lui servira à affermir sa victoire. Dans cette scène VII, l'hypocrisie est plus flagrante, la douleur feinte devient trop manifeste, ce qui fait monter les larmes à Orgon et le dégoût du spectateur qui sait que Tartuffe est un ingrat. [...]
[...] Tartuffe se place dans la position du pauvre homme et émeut un homme qui par un zèle chrétien se retrouve sauveur, il était donc impossible qu'Orgon défende son fils. Les rôles se sont installés et, comme Tartuffe est définitivement le pauvre homme Damis et toute la famille sont définitivement des persécuteurs. Cette situation est le fruit de la manipulation de Tartuffe, plus on l'attaque, plus il est avantagé. Il demande qu'on le chasse, qu'on le méprise pour obtenir l'effet inverse. [...]
[...] L'acte troisième s'ouvre sur l'entrée de Dorine, suivie de Damis. Ce dernier, contrairement à Mariane qui se soumet au moindre pouvoir qu'on exerce sur elle, rien ne semble pouvoir arrêter Damis, blessé dans son orgueil. De ce point de vue, il est aussi ridicule que sa sœur, et si Mariane se comportait en Juliette prête à se donner la mort, Damis se fait Roméo en invoquant la foudre pour qu'elle le frappe, il ne fait pas une implosion mais une explosion pourtant la faiblesse est la même. [...]
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