Nathalie Sarraute et Jean-Paul Sartre sont deux écrivains qu'il serait convenu de décrire comme hétéroclites. Tous deux sont intéressés à aller plus loin dans leur art, à briser les conventions et les règles. Pour Sartre, cela s'inscrit dans la transposition de ses théories philosophiques aux conceptions dramatiques de l'écriture et du théâtre. Sa célèbre expression « L'enfer, c'est les autres » va dans ce sens et est empreinte de signification quant à la liberté de la personne face au regard d'autrui. Sartre est un auteur engagé : il s'implique dans tout, en passant par la critique littéraire, la politique, la littérature et le théâtre. Quant à Sarraute, elle explore un côté tout à fait nouveau de l'art de l'écriture : elle cherche à décrire les tropismes, ces mouvements intérieurs et drames microscopiques au seuil de la conscience qui peuvent aboutir au dialogue. Les dialogues, d'apparence banale, mènent les tropismes au-dehors, mais les masquent aussi. Sarraute s'efforce d'analyser minutieusement ces sous-conversations menant au dialogue pour étaler au lecteur une transparence absolue – c'est-à-dire tout ce qui est possible de lui montrer. C'est en travaillant patiemment les mots qu'elle réussit à donner à ses œuvres une touche très particulière. Dans leurs œuvres théâtrales respectives, Huis clos de Sartre et Pour un oui ou pour un non de Sarraute, la relation à autrui est fortement exploitée. Dans les deux pièces, il est indéniablement apparent que ce le rapport avec l'autre est conflictuel et instable, mais peut-on dire que la relation avec autrui est la même dans Huis clos et Pour un oui ou pour un non?
[...] On remarque aussi que, le plus souvent, ce sont des duos de personnages qui s'attaquent sans pitié, avec un déroulement très rapide du rythme. Cela soutient l'objectif probable de l'auteur : donner une impression de cycle imperturbable, qui s'aggrave de plus en plus à chaque page tournée, avec une violence dans les paroles et les gestes toujours plus grande. Ainsi, le lecteur sent que, vraiment, L'enfer, c'est les autres Cela vient donner du poids à la philosophie de la liberté de Sartre décrite plus haut. Pour un oui ou pour un non est plus subtil dans son approche. [...]
[...] Bien sûr, c'est à travers le théâtre de Sartre dans Huis clos que cette affirmation se fait la plus évidente. Le déroulement de la pièce, et surtout la fameuse phrase L'enfer, c'est les autres prouvent que le théâtre de Sartre va de pair avec sa philosophie et on peut même y apercevoir son désir d'établir une nouvelle pensée Sartrienne. Celui-ci, par sa célèbre expression, n'affirmait pas que les rapports avec son prochain soient toujours mauvais et infernaux, mais plutôt que si ces relations sont tordues et viciées, alors autrui ne peut être que l'enfer parce que les gens et nos proches nous permettent de nous connaître nous-mêmes. [...]
[...] En effet, quoi de plus douloureux psychologiquement que d'apprendre que notre plus proche ami laisse percer dans une intonation un mépris profond à notre égard (Sarraute, p.15). De plus, Sarraute explique très bien tout l'impact de cette expression qui détruit la fierté d'H.2 dans son œuvre Entre la vie et la mort: [ ] appuyant sur le l'étirant, et puis faisant tomber comme une grille qui se referme sur la souris qui a mordu à l'appât : ça``. [ ] on a mal quand on a fait un à plat et qu'on a reçu en plein ventre : ``C'est bien, ça`` [ ] elles lèvent à peine la tête ``C'est bien, ça`` tenez, ce sera tout ce que vous recevrez, n'attendez plus rien (Sarraute, p.62). [...]
[...] Pour Sarraute, cette diminution de la liberté se fait par un flot de mots et de tropismes. Les tropismes sont souvent déclenchés par la confrontation avec des changements très subtils qui apparaissent alors envahir la personne, comme la formulation c'est biiien ça qui perturbe H.2 jusqu'au point de le pousser à s'éloigner de son ami de toujours. Les personnages semblent tous deux obsédés par la nécessité inapaisée d'établir un contact avec l'autre. L'individu est pris au piège : F. C'est bien normal. [...]
[...] Dans leurs œuvres théâtrales respectives, Huis clos de Sartre et Pour un oui ou pour un non de Sarraute, la relation à autrui est fortement exploitée. Dans les deux pièces, il est indéniablement apparent que ce le rapport avec l'autre est conflictuel et instable, mais peut-on dire que la relation avec autrui est la même dans Huis clos et Pour un oui ou pour un non? C'est à travers deux grandes lignes qu'il sera pertinent d'analyser cette problématique : le jugement de l'autre, ainsi que le pouvoir des mots. [...]
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