Dans une lettre à Louise Colet, Flaubert confiait : « ce que je voudrais faire, c'est un livre sur rien, un livre sans attache extérieure, qui se tiendrait de lui-même par la force interne de son style ». La notion de « l'aventure de l'écriture », chère aux romanciers du XXe siècle, était déjà présente chez Flaubert, chez ces écrivains dits « réalistes », ou « naturalistes » si l'on fait référence à Zola. Ainsi, dans son Discours de Stockholm, Claude Simon soulève ces questions sur le réalisme et « l'aventure de l'écriture » : « Posant la question : « Qu'est-ce que le réalisme ? », Roman Jakobson observe que l'on a coutume de juger du réalisme d'un roman non pas en se référant à la « réalité » elle-même (un objet a mille aspects) mais à un genre littéraire qui s'est développé au siècle dernier. C'est oublier que les personnages de ces récits n'ont aucune réalité que celle de l'écriture qui les instaure.
Comment donc cette écriture pourrait-elle « s'effacer » derrière un récit et des évènements qui n'existent que par elle ? En fait, de même que la peinture lorsqu'elle prenait pour prétexte telle scène biblique, mythologique ou historique (qui peut sérieusement croire à la « réalité » de telle Crucifixion, de telle Suzanne au bain ou de tel Enlèvement des Sabines ?), ce que l'écriture nous raconte, même chez le plus naturaliste des romanciers, c'est sa propre aventure et ses propres sortilèges ». Autrement dit, l'écriture nous fait croire à l'illusion de réel, c'est d'ailleurs pourquoi il ne faut pas confondre les personnages –qui n'ont d'autre réalité que la fiction, et les personnes. Même chez Zola, ce qui semble compter c'est « l'aventure de l'écriture ». L'écriture se dit, raconte « ses propres sortilèges » qui semblent être cette magie au sein de l'écriture permettant de confondre réel et fiction, ce qui fait la singularité d'un récit. Ainsi l'on peut se demander comment l'écriture se dit, comment elle raconte ses sortilèges, la façon dont elle se créer au sein du roman. Nous verrons donc dans un premier temps que « l'aventure de l'écriture » c'est sa propre création, mais qu'elle est bel et bien un renversement du romanesque. Enfin, l'écriture est la parole même de l'écrivain, ce qui confère à l'œuvre une fonction didactique.
[...] Au chapitre II, l'eau du ruisseau de la maison rue de la Goutte d'Or est rose très tendre puis au chapitre l'eau devient d'un vert pomme très tendre où Gervaise voit dans cette couleur un heureux présage Puis au chapitre XII, l'eau est un ruisseau noir l'écrivain précise : c'était une eau, couleur de ses pensées Autrement dit, derrière l'apparence réelle dessinée dans les romans de Zola, on est quelquefois à la limite du fantastique notamment par ces descriptions précises en regard avec les personnages, l'évolution du roman. Le naturalisme se sert des objets pour construire une logique au récit et contribuer par cela à l'illusion du réalisme. [...]
[...] L'aventure de l'écriture est donc création qui use de sortilèges tels que les stratégies narratives pour se créer, et créer une illusion du réel. L'aventure de l'écriture : se dire en tant qu'œuvre Toute œuvre est fiction. Dès lors, elle est œuvre en ce sens que l'écriture réalise l'œuvre de toutes pièces en créant des personnages, des espaces, les temps Mais au sein de l'œuvre, l'écriture se dit , elle se représente en se mettant en abyme, où décrire ce qu'est écrire. [...]
[...] L'auteur dévoile, dans cette parodie de roman policier, la matérialité du roman construit tel un système de signes où le lecteur peut reconnaître une atmosphère connue : le roman commence c'est une atmosphère que tu connais par cœur Dans cet exemple, l'écrivain met en place cette stratégie narrative du tutoiement, ce qui permet d'interpeller directement le lecteur, le placer dans cette atmosphère Autrement dit, le lecteur est directement inclus dans l'entreprise narrative, dès lors on ne s'enquiert plus du récit lui-même mais de l'écriture qu'il instaure et qui permet au lecteur d'être intégré au récit, d'être en quelque sorte acteur au sein du roman. Le lecteur inclus dans le récit participe également à l'élaboration de l'œuvre, où le lecteur peut interagir. [...]
[...] *Dans L'Herbe rouge, Boris Vian décrit le réveil de Wolf d'une manière végétale en se référent à diverses métaphores pour exprimer le réveil. Il entr'ouvrit les yeux et les murs de la chambre chancelèrent, s'abattirent sur le plancher, soulevant en tombant de grandes vagues de pâte molle Expérimentation de l'écriture : comment décrire les choses de manières différentes ? Une mise en abyme de la création littéraire Renversement du romanesque dans le sens où le sujet n'est plus forcément la société, mais la création littéraire. Le récit, l'intrigue mettent en abyme la création littéraire. [...]
[...] *Dans le prologue de Pantagruel, Rabelais se joue du lecteur et de ce rapport réalité et fiction en affirmant que tout ce récit est vrai. On sait que le personnage est fictif, issu d'une histoire fictive, mais cette fiction peut servir d'expression d'une réalité du monde. L'écriture comme engagement Le romancier, par son écriture, doit montrer au lecteur le monde tel que lui le perçoit, afin de lui montrer la réalité du monde. On dépossède le roman pour dire le monde. [...]
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