Le récit idyllique est en plein essor dans la tradition médiévale. De Daphnis à Pyrame ou de Blanchefleur à Juliette, l'amour est idéalisé surtout lorsque qu'il se situe à la sortie de l'enfance. La littérature remanie les mythes les plus connus pour en faire des histoires romanesques souvent reprises par les troubadours, une réécriture mythologique donnant une dimension sacrée aux anecdotes idylliques. La mise en avant d'un amour pur et innocent souligne le caractère mythique de la fièvre amoureuse. Jusqu'à la Renaissance, la mixité entre le récit idyllique et la mythologie vient envahir la littérature courtoise. À l'époque de l'amour courtois appelé la fol'amor ou fin'amor, Ovide est une référence dans l'idylle affective. Dès lors, des interrogations se soulèvent sur la malléabilité du mythe dans la littérature.
[...] Cette citation expliquerait la provenance de la couleur rouge des mûres. Ainsi, Ovide montre comment le mûrier qui portait des fruits blancs a vu ses fruits devenir noirs. C'est un dénouement tragique qui peut être tout de même relativisé, car d'une certaine manière, les deux amants sortent vainqueurs de cette histoire. Ne pouvant se résoudre à vivre séparément, leur acte est censé les réunir à jamais pour l'éternité. Dans l'impossibilité de s'aimer ici-bas, la mort serait le seul antidote. Bienheureusement, tous les mythes ne se terminent pas toujours avec la perte cruelle des deux amants. [...]
[...] Devant le voile ensanglanté, elle comprend les origines du spectacle. Pyrame ouvre une dernière fois les yeux et expire dans les bras de Thisbé. Dévastée, la belle se suicide à son tour. Elle se meurt dans un bain de sang et dans un dernier monologue, elle s'adresse aux dieux : Ô vous, parents trop malheureux ! Vous, mon père, et vous qui fûtes le sien, écoutez ma dernière prière ! Ne refusez pas un même tombeau à ceux qu'un même amour, un même trépas a voulu réunir ! [...]
[...] Le motif de la mort et du rite funéraire est ubiquitaire dans les récits idylliques : le tombeau demeure omniprésent. Même le conte de Floire qui a pourtant un dénouement heureux (les deux amants finissent par s'épouser) met en scène la fausse tombe de Blanchefleur au début de l'histoire. En effet, pour arriver à ses fins, le roi voulut faire croire à son fils héritier, Floire, à la mort de son aimée. Inspirée probablement par la légende de Pyrame et de Thisbé, la pièce Roméo et Juliette de William Shakespeare évoque également le thème de la mort. [...]
[...] De même, Platon qui n'approuvait pas l'usage des mythes finissait par en avoir recours pour étayer ses analyses. Le mythe est universel, il marque les esprits quel que soit sa langue d'origine. Avec les siècles, il a perdu de sa vivacité et a connu de nombreuses modifications, il n'a plus son caractère sacré et religieux. Les mythes antiques sont vulgarisés au profit de la littérature qui en cultive un certain prestige. La réécriture mythologique pourrait presque être considérée comme un genre à part entière. [...]
[...] Communément, le récit idyllique traite de l'amour enfantin de deux héros affligés par l'opposition de leur union : la société ou les parents exercent une oppression sur les deux amants. La fin du récit est parfois tragique, la mort peut être un exutoire à la frustration amoureuse. L'amour enfantin est idéalisé avec une naïveté et une fausse pudeur qui dissimulent une ambiguïté, un double sens. Le voile ensanglanté de Thisbé, par exemple, pourrait représenter le voile de la virginité, voile symbolisant la fusion physique des deux amants. [...]
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