Sarah Kane est née le 3 février 1971 à Brentwood. Elle a été l'une des dramaturges anglaises les plus en vues de son temps. C'est à 17 ans, alors qu'elle étudie le théâtre à l'université de Bristol, qu'elle commence à écrire pour le théâtre et qu'elle acquiert une expérience de metteur en scène et d'actrice en jouant le rôle de Bradshaw dans la pièce d'Howard Barker, Victory en 1983. En 1992, après avoir vu Mad de Jeremy Weller au festival d'Édimbourg, Sarah Kane prend la mesure de ce qu'elle a envie d'écrire : un théâtre de l'expérience. Sarah Kane est l'auteur d'une œuvre courte mais percutante, que son suicide en 1999 interrompt brutalement. Ses cinq pièces – Blasted (1995), Phaedra's Love (1996), Cleansed (1998), Crave (1998) et 4.48 Psychosis (2000) – montrent une évolution progressive de son écriture dramatique qui se fonde sur le mélange entre un choc visuel accompagné le plus souvent d'un univers sonore très oppressant. Je ne vais pas plus rentrer dès à présent dans les détails, et je vais passer à la présentation de Purifiés, dont le titre original est Cleansed. Il est difficile de résumer une pièce aussi riche et opaque mais on peut néanmoins planter le décor. Dans un campus universitaire métamorphosé en sorte de camp de concentration, Tinker, dealer (ou plutôt docteur) tortionnaire, tue Graham d'une injection létale d'héroïne. 6 mois après, sa sœur part à la recherche de ses vêtements. Pendant ce temps, Carl promet à son petit ami qu'il serait prêt à mourir pour lui. Véritables anges déchus de cet enfer imaginaire, Graham et sa sœur Grace, avec laquelle il entretient une relation fusionnelle sont au cœur d'une intrigue sibylline qui se veut mêler avec une assez grande incompréhension, un ensemble de scènes à la violence morale et physique tout à fait inouïe. L'intérêt de cette courte étude, va résider dans la démonstration du rôle véritable de cette ultra violence, d'essayer de voir au-delà des apparences, et d'expliquer ce qui n'est évidemment pas la représentation de scènes de tortures dans le but d'écœurer les lecteurs. Il est délicat d'établir un plan structuré tant cette histoire est construite sur des enchevêtrements multiples. Toutefois on peut proposer trois principaux axes pour diriger notre étude.
[...] Ou bien dans une autre réalité ? La rencontre du tragique et du grotesque produit une sorte de tragédie nihiliste, baptisée par Howard Barker théâtre de la catastrophe Ce terme, forgé par Barker sur le modèle du théâtre de la cruauté d'Antonin Artaud, a pour objectif de trouver un mode tragique plus à même d'exprimer le désarroi du monde contemporain que la tragédie elle-même, jugée trop rassurante dans sa promesse de retour à l'ordre. Les personnages font ici l'expérience de la douleur, et de la cruauté qui en est le revers, pour acquérir le savoir et la détermination. [...]
[...] Interpréter ses pièces en se contentant d'être des marionnettes en train de jouer est aberrant. Il faut se lancer avec toute la sincérité et l'honnêteté dont elle-même fait preuve en écrivant, sinon ce n'est pas la peine de jouer. Sarah Kane n'est pas conventionnelle. Le savoir-faire ou la technique ne suffisent pas. Il faut être vrai et il faut être capable du même abandon qu'elle manifeste en racontant directement des choses très personnelles. Je parle des acteurs mais aussi de moi, metteur en scène. Nous donnons à voir de nous une part très intime. [...]
[...] D'ailleurs, à la fin de la pièce, il se sacrifie pour elle et donc le processus de purification. Mais cette dernière n'y prête pas attention, ce qui laisse présupposer une critique de la part de Kane, qui sous-entend ici que les esprits purs n'ont pas leur place dans une société pervertie. Le contre-exemple fourni par Kane va dans le sens de la mort de Robin. Il s'agit de la relation entre Rod et Carl. La scène 2 introduit deux nouveaux personnages : Carl et Rod, deux homosexuels. [...]
[...] Or Carl rompt sa promesse et dit Pas moi, s'il vous plaît [ ] ne me tuez pas, ROD PAS MOI, ROD PAS MOI Au contraire, il est sous-entendu que Rod, qui a pesé l'importance de ses mots avant de jurer, a été également torturé mais n'a pas trahi Carl. La mort de Rod, est une punition pour Carl, qui finit la pièce en pleurant. Il est intéressant de noter, à propos de la mort de Rod, que Tinker le brûle. On a encore ici l'image de la purification par le feu. Rod est purifié tout comme Graham a été purifié par le feu. [...]
[...] Tout a une signification. Le discours est tellement épuré, minimaliste que la moindre réplique, la moindre didascalie, et même la disposition typographique sont importants. Le chaos qui semble régner n'est qu'une apparence, quand on y regarde bien, tout est finement structuré. Un exergue figure au début de la pièce : Une barre oblique indique à quel moment deux répliques se chevauchent. Quant la ponctuation est manquante, les répliques doivent s'enchaîner très rapidement Ce n'est pas explicitement indiqué dans l'édition française, mais dans l'édition originale anglaise, il apparaît clairement que cet exergue a été inséré par Sarah Kane elle-même, ce qui montre son attachement, une fois de plus, faire de ce texte, une pièce jouée selon la manière dont elle l'a pensé. [...]
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