Marcel Proust (1871-1922) domine l'histoire du roman français au XXe siècle par son œuvre A la recherche du temps perdu (1913-1927) et dont le premier volume est Du côté de chez Swann. Cette grande œuvre cyclique est une autobiographie romancée consacrée, pour partie, à des souvenirs d'enfance dans lesquels il met principalement en valeur non pas les événements mais les sentiments éprouvés et ce, à travers son personnage principal Monsieur Swann. Ainsi, l'intérêt du passage réside dans le paradoxe émotionnel de Swann au cours d'un moment privilégié. C'est pourquoi, l'étude dans un premier temps de la sensation d'un bonheur lumineux permettra d'analyser, dans un deuxième temps, la chute vers une douloureuse réalité.
[...] Proust, Du côté de chez Swann, première partie: Combray, le baiser du soir Passage de l'œuvre Ma seule consolation, quand je montais me coucher, était que maman viendrait m'embrasser quand je serais dans mon lit. Mais ce bonsoir durait si peu de temps, elle redescendait si vite, que le moment où je l'entendais monter, puis où passait dans le couloir à double porte le bruit léger de sa robe de jardin en mousseline bleue, à laquelle pendaient de petits cordons de paille tressée, était pour moi un moment douloureux. [...]
[...] En définitive, dans cet extrait le narrateur est sans cesse déchiré entre ses sentiments pour le moins opposés, mais celui qui apparaît comme le plus présent est son mal-être quasi-permanent dû à sa dépendance à l'égard de sa mère. Pour en revenir à l'auteur, Marcel Proust souffrira toute sa vie de cet amour profond pour sa mère puisque, pour lui, le comble de la misère eut été d'être séparé de sa maman. D'ailleurs, pendant son agonie qui dura cinq heures et demie, certaines de ses phrases ont été relevées : vous savez, elle est venue (la mort). Elle est très grosse, très grosse et très noire. Elle est toute noire. Elle est affreuse. [...]
[...] Au moment du coucher, le baiser rituel de sa mère est un instant sacré. Ainsi, le moment où la mère de Swann le retrouve pour l'embrasser est un instant de bonheur extraordinaire. Pour le souligner il utilise la métaphore d'une montée vers le ciel : quand le petit Swann [monte se coucher] (l.1). Il entend sa mère le rejoindre avec le bruit léger de sa robe de mousseline bleue (l.5-6) connotant la légèreté de son pas et la couleur du ciel. [...]
[...] Le petit Swann est en plein dans le complexe d'Œdipe : il anticipe continuellement le départ de sa mère ainsi il en vient à souhaiter que [le bonsoir] vint le plus tard possible (l.10-11). Cette attitude est très étrange puisqu'au contraire les enfants sont souvent pressés de retrouver ces moments-là. De surcroît, il craint de décevoir sa mère lorsque, parfois, il brûle d'envie de lui demander embrasse-moi une fois encore (l.14). Pour le narrateur voir le visage fâché (l.15) de sa mère [détruit tout le calme qu'elle lui a apporté un instant avant] (l.22-23). [...]
[...] Elle me fait peur non, non. Nul, ne peut la toucher. Elle est implacable et devient de plus en plus horrible maman! Citation du Dictionnaire des Anecdotes littéraires, Denis Boissier. [...]
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