Dissertation de Littérature sur Albertine Disparue de Proust à partir de la citation de Jean-Yves Tadié : "Le récit tout entier est poétique, parce que rythme. Alors que la langue romanesque traditionnelle est progressive, non répétitive (de même que la prose évite la rime, varie l'assonance), la langue proustienne est à la fois progressive par le dévoilement lent de sa signification, et répétitive dans son rythme : elle nie la langue romanesque classique en développant en elle-même l'antinomie du langage : linéarité et retour.".
[...] Seulement pour creuser plus profond, il faut bien repasser par les mêmes couches supérieures. Il manifeste le fait qu'il recherche et qu'il creuse par le rythme répétitif mais ajoute toujours un élément. Le dévoilement de la signification est à trouver et il le trouve par l'écriture. Il ne peut donc pas dévoiler une signification qui se fait au fur et à mesure de l'écriture. L'écriture romanesque semble donc bien présente, aussi bien sur le plan traditionnelle, pour exprimer l'histoire que sous un aspect poétique qui semble ici au service d'une écriture romanesque, du développement de la signification en ce qu'il est linéarité dans la démarche même. [...]
[...] Ainsi dans ce passage où il décrit sa promenade dans Venise "la proximité des maisons faisait de chaque croisée un cadre où rêvassait une cuisinière qui regardait par lui, et une jeune fille qui, assise, se faisait peigner les cheveux par une vieille femme au visage, deviné dans l'ombre, de vieille sorcière, comme une exposition de tableaux hollandais." Avec les assonances en qui s'opposent aux assonances en ou en dans la deuxième partie de la phrase, le lecteur perçoit les jeux de lumière, l'ouverture et la fermeture qui ajoutent à l'aspect tableaux. La description dépasse le simple emploi de mots pour devenir poétique. De plus les allitérations en et en ajoutent à l'aspect plein de croisements de sa promenade et du bruit de la ville. [...]
[...] Le langage romanesque peut donc être qualifié de poétique et ce par le rythme qui le différencie d'une écriture romanesque traditionnelle en rajoutant des sensations qui confèrent à l'œuvre plusieurs niveaux de signification. Cependant le roman reste roman et l'écriture reste "romanesque". le rythme et la poétique de l'écriture ne semblent pas, en effet, étouffer le romanesque. On trouve, en effet, un romanesque traditionnel qui introduit une rupture dans le rythme et par lequel l'histoire et ses différents aspects reprennent le dessus. C'est la linéarité de l'œuvre. [...]
[...] Il veut donner également l'expression d'un temps et rendre la façon dont il vit ce temps. Comme la langue traditionnelle romanesque décrit les faits, lui veut rendre la façon dont il a vécu les faits .Le rythme, notamment les répétitions dans le premier chapitre, permet de rendre cette impression que le temps correspond à un flux et un reflux puisqu'il ramène toujours la souffrance et le souvenir d'Albertine même s'ils sont déclenchés par des éléments différents. On retrouve notamment la répétition dans le premier chapitre de "ainsi" en début de paragraphes qui sont d'ailleurs assez brefs autour d'un fait comme pour marquer la fatalité du retour à Albertine et à la tristesse. [...]
[...] Alors que la langue romanesque traditionnelle est progressive, non répétitive (de même que la prose évite la rime, varie l'assonance), la langue proustienne est à la fois progressive par le dévoilement lent de sa signification, et répétitive par son rythme : elle nie la langue romanesque classique en développant en elle-même l'antinomie du langage : linéarité et retour."Pour lui, le langage proustien, autrement dit son style, son écriture est romanesque par sa progression, par la façon dont la signification se construit mais dépasse la langue romanesque traditionnelle par une écriture rendue poétique par le rythme qui rend particulière la progression de la signification et rend l'écriture "répétitive" créant ainsi une langue particulière, son propre style, basée sur l'antinomie du langage et l'opposition entre linéarité et retour qui devrait empêcher toute progression. La question est celle de la place du rythme dans l'écriture d'Albertine disparue. En effet, dans ce roman qui décrit un processus d'oubli, une large place est faite à l'élégie, genre qui trouve son apogée dans la poésie avec les souvenirs et les sentiments. Le titre même Albertine disparue semble préparer le lecteur à une enquête, à du romanesque qui semble se heurter à cet aspect poétique. [...]
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