En procédant à une étude comparée de Si c'est un homme de Primo Levi - dont le titre original est "Se questo è un uomo" - et de l'Ecriture ou la vie de Jorge Semprun, nous nous efforcerons de mettre en lumière l'approche des camps de concentration à travers ces deux autobiographies.
Afin de mieux comprendre le fonctionnement du récit de chaque auteur, nous nous servirons du contexte dans lequel les deux œuvres ont été écrites avant d'insister sur le pacte autobiographique et la notion de littérarité.
[...] Tout en étant au service de la même vérité, Levi et Semprun n'abordent pas l'écriture avec la même nécessité : pour Levi c'est un besoin vital qu'il doit assumer au plus vite pour avoir le sentiment du devoir accompli, pour Semprun, c'est l'insoutenable retour à l'horreur du camp. Dans ce travail acharné de l'écrivain à la recherche du sens, l'art littéraire est au service du témoignage et, réciproquement, la vérité du témoignage ne serait rien sans l'art. Bibliographie Primo Levi Le devoir de mémoire Jorge Semprun Mal et modernité G. Perec W ou le souvenir d'enfance J.Semprun et E. [...]
[...] On peut aussi sentir ses différentes odeurs et apprendre la vie détaillée du camp à travers un récit dont la culture littéraire de Semprun, qui cite des auteurs et de la poésie, n'est pas exclue. Il n'hésite pas non plus à faire de nombreux "flash-back" et agence son récit de manière volontairement désordonnée. Cette mise en scène du discours donne la charge émotionnelle de l'autobiographie. En effet pour Jorge Semprun, "seul l'artifice d'un récit maîtrisé parviendra à transmettre partiellement la vérité du témoignage". [...]
[...] Genette, la narration est autodiégétique; Semprun dit lui-même : "l'écriture avait tourné vers la première personne du singulier", "il me faut donc un de la narration, nourri de mon expérience mais la dépassant, capable d'y insérer de l'imaginaire, de la fiction qui aiderait la réalité à paraître réelle, la vérité à être vraisemblable". Le contrat auteur/lecteur passé par Semprun est donc clair. Il précise même les choses à l'intérieur du récit : "c'est moi qui écris, je suis le Dieu tout- puissant de la narration". [...]
[...] En effet Semprun lui-même avoue : "Si c'est un homme : magistrale réussite sur le plan de l'écriture; échec complet sur le plan de la lecture, de l'écoute du public". Il se pose d'ailleurs plusieurs fois la question : "peut-on tout entendre ? Tout imaginer La réponse serait plutôt négative, car selon lui, "ils ne peuvent pas imaginer". Et "le vrai problème", explique un personnage de L'écriture ou la vie, "n'est pas de raconter, qu'elles qu'en soient les difficultés. C'est d'écouter Voudra-t- on écouter nos histoires, même si elles sont bien racontées Faut-il donc dire ce qui s'est passé, puisqu'en dehors du problème de la réception, il " y faudrait des heures, des saisons entières, l'éternité du récit, pour à peu près en rendre compte" ? [...]
[...] En effet, ce fut pour Semprun une "expérience invivable", "un cauchemar" où il a éprouvé le sentiment du "non- être". Mais il avoue que l'expérience de Levi avait été plus terrible que la sienne bien qu'ils aient tous deux vécu l'expérience de la mort, entraînant inévitablement une sorte d'aliénation : " deux ans d'éternité glaciale, d'intolérable mort me séparaient de moi-même. Serais-je à tout jamais cet autre qui avait traversé la mort se demande J. Semprun, "une part de moi ne reviendrait jamais". [...]
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