Préhistoires, chapitre 1 - Jean Rouaud (2007) : critique des préjugés sur les hommes préhistoriques

Thèmes abordés

Préhistoires chapitre 1, Jean Rouaud, préjugés sur les hommes préhistoriques, littérature d'idées, vulgarisation, sapiens-sapiens, Neandertal, rêverie poétique, commentaire de texte

Résumé du document

La littérature d'idées est un genre littéraire qui consiste pour un auteur à présenter une thèse et à la défendre afin d'y faire adhérer le lecteur. Ainsi, dans cet extrait, issu du chapitre 1 de Préhistoires, un recueil de trois textes écrits en 2007 par Jean Rouaud, ce dernier nous présente sa thèse ; en effet, il amène le lecteur à rejoindre sa vision de la préhistoire dans laquelle il critique les préjugés sur les hommes préhistoriques, tout en les défendant et en recadrant les hommes modernes. Après avoir étudié en quoi ce texte constitue un documentaire de vulgarisation sur cette période, puis analysé comment l'écrivain revisite l'époque préhistorique en dénonçant les préjugés, nous nous demanderons enfin dans quelle mesure ce passage est une rêverie poétique sur le temps.

Extraits

[...] L'écrivain continue à insister sur la notion préhistorique en multipliant les informations, détaillant par exemple l'apparence du néandertalien avec « les grosses têtes » (l22) ou encore « leurs épaisses arcades sourcilières » (l24). Il précise également leur faible intelligence avec l'expression « ne leur avait pas permis d'inventer la poudre », et « leur esprit gourd ». De même, il rapporte des comportements sociaux tels que « partager sa nourriture » donc la solidarité, ou encore le vol avec « pour la dérober à ses voisins » à travers une antithèse entre la « bonté » et la « malveillance ». En rapprochant ces mots de sens opposé, Rouaud illustre les contradictions naturelles qui ont toujours existé chez l'homme. [...]

[...] Il met un effet en avant la suspension du temps grâce à la mise en place d'allers-retours entre le passé et le présent, afin de soutenir sa théorie selon laquelle notre cerveau est resté des millénaires sans évoluer, et pour lequel le temps s'est donc arrêté. Il évoque alors d'abord le cerveau des néandertaliens, puis le nôtre (et donc celui des sapiens-sapiens préhistoriques) : « une refonte totale ( ) la mathématique » (l12) puis, il insère de nouveau un parallèle passé-présent « si tout était déjà en place » (l10) ou encore « tout était déjà joué » (l21) sous-entendu que tout était déjà comme aujourd'hui. [...]

[...] Le pouvoir de l'imagination est d'ailleurs employé par l'auteur : son écriture est ici partagée entre descriptions détaillées réalistes et imagination. Il incite en effet le lecteur a puisé dans son imagination à plusieurs reprises : « de sorte qu'on puisse les imaginer ( ) », « chantonnant ( ) grottes » « ainsi que l'on s'asperge d'eau ( ) s'immerger » « larmes fossiles » ou encore « inventèrent délicatement le chagrin » : il sollicite l'imagination du lecteur, le poussant à visualiser pour mieux ressentir les émotions, et l'incitant à imaginer autre chose que la réalité. [...]

[...] Il utilise aussi un langage littéraire plus naturel avec des mots tels que « tout était déjà joué en somme » « ceux-là qu'on imaginait en brutes » « ceux-là en savaient aussi long que nous » « du coup » et « delà à ce qu'ils aient imaginé » (l29). En outre il a recours à des expressions populaires telles qu'« inventer la poudre » « sans une retouche » « à propos de cerveau », et « qu'est-ce qu'ils ont dans la tête » (l14). [...]

[...] Il déplore que l'on s'attache à l'hypothèse qu'ils auraient disparu en raison de leur esprit « gourd ». Il marque alors son désaccord avec la phrase nominale « conclusion hâtive et injuste » (l23). D'ailleurs, il suggère que les sapiens sapiens auraient pu s'être débarrassés de leurs prédécesseurs néandertaliens (l22). En outre, il leur prête des valeurs de respect, nous rapportant « un fait avéré » qu'« ils furent les premiers à enterrer leurs morts » (l25). L'auteur s'interroge donc aussi ce rituel possiblement adopté par « nos sapiens- sapiens », qui prouverait selon lui que les néandertaliens ne sont pas plus des animaux que l'homme d'aujourd'hui. [...]