La pratique de la censure et le concept de tolérance

Thèmes abordés

Censure, tolérance, diffusion, interdiction, liberté d'expression, forme de censure, indifférence, fausses informations, sensibilité, limites

Résumé du document

Selon le dictionnaire Larousse, la censure est l'« examen préalable fait par l'autorité compétente sur les publications, émissions et spectacles destinés au public et qui aboutit à autoriser ou interdire leur diffusion totale ou partielle. » La censure est souvent décriée et considérée comme un frein à la liberté d'expression, notamment dans le domaine de la littérature et des arts, dans lesquels on considère que l'artiste doit être absolument libre. Elle serait donc totalement opposée au concept de tolérance, défini par le fait d'accepter et d'admettre des idées différentes des nôtres. Cependant, Paul Ricoeur a émis un avis surprenant au premier abord à ce propos : selon lui, « La pratique de la censure n'est éventuellement pertinente que dans une société qui a développé la tolérance : elle lui permet de se réveiller et de ne pas sombrer dans l'indifférence. » Ainsi, la pratique de la censure ne serait donc pas acceptable dans une société intolérante, c'est-à-dire dans une société qui ne respecte pas les différences par rapport à la norme.

Au contraire, elle serait bénéfique dans une société qui a appris à respecter ces différences et à vivre avec elles sans les réprimer. En effet, dans une telle société, on peut penser que tout comportement est finalement accepté, alors que cela ne devrait parfois pas être si évident. Dans ce cas, réfléchir à censurer un comportement ou une pensée serait un signe de vigilance et d'attention au monde, ne serait-ce que parce que cela entraîne nécessairement un débat sur la nécessité de censurer ou non. Ainsi, dans quelle mesure peut-on adhérer à cette association, de la tolérance à l'indifférence, que la censure viendrait contrebalancer ?

Extraits

[...] Cela risque de la rentre rétrograde ou, au mieux, stagnante puisqu'elle se contentera de pensées et de comportements convenus qui ne peuvent être porteurs d'idées nouvelles. Enfin, la raison la plus évidente pour laquelle la tendance à la censure est dangereuse pour la société est le fait qu'elle menace la liberté de penser et de s'exprimer. En effet, c'est ce qu'avait violemment dénoncé l'écrivain Gustave Flaubert dans une lettre à Louise Colet du 9 décembre 1852 : « La censure, quelle qu'elle soit, me paraît une monstruosité, une pire chose que l'homicide. L'attentat contre la pensée est un crime de lèse-âme. [...]

[...] Mais doit-on pour autant tout permettre sans jamais rien remettre en question ? Finalement, il serait possible d'envisager la censure comme un moyen de générer débat et discussions dans une société : l'essentiel est en effet de se poser des questions et d'étudier les situations problématiques, afin d'évaluer au cas par cas ce que l'on peut tolérer ou non, et pour discuter de qui peut tolérer ces choses et qui n'y parvient pas, afin de mieux comprendre les raisons de ces différences. [...]

[...] Nous verrons dans un premier temps dans quelle mesure la censure peut être considérée comme une manière d'éviter de sombrer dans l'indifférence, avant de nous interroger sur les dangers que comporte aussi la censure. Pour terminer, nous nous demanderons dans quelle mesure il est possible de voir en la censure un moyen de générer débat et discussions, gages d'une société saine. Pour commencer, il est vrai que la censure peut avoir des aspects positifs, d'abord parce qu'être contre toute forme de censure peut devenir un véritable danger : peut-on vraiment tout faire ou tout dire au nom de la liberté d'expression ? [...]

[...] » Pour conclure, nous avons pu constater que le principe de censure est complexe et sujet à de nombreux débats. Il est vrai que l'idée de censure est négative au premier abord, car elle représente un danger pour la liberté d'expression, qui est fondamentale et précieuse. Une société qui applique beaucoup la censure est ainsi considérée comme une société répressive et intolérante, non ouverte aux autres et aux différences. Cependant, lorsque l'on réfléchit plus longuement à l'idée de censure, on peut finir par penser qu'elle a parfois un caractère bénéfique pour la société, puisqu'elle conduit à ne pas rester passif et à s'interroger sur les limites de ce qu'on peut tolérer. [...]

[...] Au-delà de la censure, cette idée questionne donc plus fondamentalement les notions de liberté et de tolérance, pour savoir jusqu'où elles peuvent aller dans une société. [...]