"[La poésie] montre nues, sous une lumière qui secoue la torpeur, les choses surprenantes qui nous environnent et que nos sens enregistraient machinalement" (Cocteau)

Résumé du document

Jean Cocteau est un poète reconnu du XXe siècle mais aussi un dramaturge, un dessinateur et un cinéaste. Il expose sa vision de la poésie dans son œuvre Le Rappel à l'ordre écrit en 1926. Dans celui-ci, comme son nom l'indique, il rappelle l'image commune de la poésie qui est celle d'une « dame voilée langoureuse […] qui ne dit que des mensonges », la rejette et en propose une autre qui est pour lui la seule valable. Selon lui, la poésie a pour rôle de montrer « nues, sous une lumière qui secoue la torpeur, les choses surprenantes qui nous environnent et que nos sens enregistraient machinalement » ; il est, en d'autres termes, pour une poésie du quotidien qui est ancrée dans notre réalité, et qui dévoile les choses.
Cette conception de la poésie s'oppose clairement à celle que certains poètes avaient au XIXe siècle, à savoir l'utilisation du beau langage et du beau thème. Mais elle est aussi partagée par d'autres poètes de la même époque qui « révolutionnent » l'image traditionnelle de la poésie, séduisante et mensongère, comme Francis Ponge ou à la fin du XIXe Charles Baudelaire.

Extraits

[...] La poésie serait alors, en suivant cette pensée, créatrice de nouvelles choses, ce qui serait en opposition avec la pensée de Cocteau qui souhaite retranscrire la réalité. Par exemple, dans son poème Elévation Baudelaire parle de son mal-être intérieur qu'il appelle le Spleen et de son envie de s'évader et il donne ainsi envie au lecteur de partir avec lui loin de cette horrible réalité, vers ce qu'il appelle son Idéal imaginaire : Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides; Va te purifier dans l'air supérieur. [...]

[...] Il n'y a pas besoin d'exotisme et il est, comme il le dit dans Le Rappel à l'ordre, inutile de chercher au loin des objets et des sentiments bizarres pour surprendre le dormeur éveillé la réalité est assez variée et assez inspirante, et il nous reste plus qu'à découvrir les choses surprenantes qui la composent grâce au poète. Pour Cocteau, un fiacre qui passe, un chien qui se trouve dans la rue au moment où l'on passe sont des choses surprenantes et remarquables. [...]

[...] poésie] montre nues, sous une lumière qui secoue la torpeur, les choses surprenantes qui nous environnent et que nos sens enregistraient machinalement" (Cocteau) Jean Cocteau est un poète reconnu du XXe siècle, mais aussi un dramaturge, un dessinateur et un cinéaste. Il expose sa vision de la poésie dans son œuvre Le Rappel à l'ordre écrit en 1926. Dans celui-ci, comme son nom l'indique, il rappelle l'image commune de la poésie qui est celle d'une dame voilée langoureuse [ ] qui ne dit que des mensonges la rejette et en propose une autre qui est pour lui la seule valable. [...]

[...] Par exemple, le poème Mûres de Ponge fait réellement travailler l'esprit de représentation du lecteur : Aux buissons typographiques constitués par le poème sur une route qui ne mène hors des choses ni à l'esprit, certains fruits sont formés d'une agglomération de sphères qu'une goutte d'encre remplit. Transition : la découverte de ces choses surprenantes est à la fois ludique et divertissante. Cependant, la poésie est un genre très varié qui peut avoir d'autres fonctions. La poésie peut aussi avoir la fonction de créatrice, de miroir du poète et de porte-parole d'une opinion. [...]

[...] Comme le souhaite Cocteau, la poésie doit dévoiler les choses qui nous entourent ce qui veut dire qu'il préconise une poésie du réel, du quotidien. Elle a donc la capacité d'enlever la patine aux choses pour les dévoiler : la poésie n'est plus mensongère comme certains le pensaient, et revêt ainsi le rôle de révélatrice. Cocteau a choisi de donner à la poésie ce rôle, car il souhaite dégourdir les esprits pris dans leur torpeur et s'attarder sur les choses que les hommes ne remarquent plus et que leur sens enregistrait machinalement : la poésie lutte contre l'habitude et la monotonie qui nous empêchent de voir les choses telles qu'elles sont réellement, à savoir surprenantes et qui s'opposent à leur enregistrement machinal. [...]