Dans des textes comme « les yeux des pauvres » ou « les foules », Baudelaire explique que ce qui fait la force de ses poèmes est le fait qu'il rend visibles les marginaux, infortuné et malheureux invisibles dans la société grâce au travail poétique. Il considère cette forme d'aumône supérieure à tout don matériel et il sous-entend que seul un artiste, un poète est capable de capter et de retranscrire la misère du quotidien de façon efficace.
Par extension, il est possible de déduire que tout travail poétique est de rendre visible ce qui est invisible et d'offrir à tous par la diffusion de la poésie un regard réfléchi sur le quotidien, regard qui permettrait l'harmonie.
Ainsi, on est en droit de se demander si la charité ne serait pas l'essence même de la poésie ?
[...] Empathie et charité -L'évasion de Baudelaire dans les autres se traduit principalement en des personnages mis au ban de la société, seuls et désœuvrés : le vieux saltimbanque, les veuves, la vieille. Ceci traduit l'attrait de l'auteur pour les miséreux et son désir de les mettre à la vue d'une société qui les a exclus. Le fait non seulement de ‘vivre' ces personnages mais également d'unifier leurs voies grâce à la poésie définit tout le travail de Baudelaire, qui vise la charité désintéressée par le biais de l'empathie qu'il porte à ses personnages : Ce que les hommes nomment amour est bien petit, Bien restreint et bien faible, comparé à cette ineffable Orgie, à cette sainte prostitution de l'âme qui se donne Tout entière, poésie et charité, à l'imprévu qui se Montre, à l'inconnu qui passe. [...]
[...] -Alors comment expliquer le succès de cette poésie et où trouver la trace la théorie Baudelairienne qui donne la charité comme base de la poésie ? -Le fait est que la démarche est différente de ce qu'exprime Baudelaire dans ses Petits poèmes en prose. Ici ce n'est plus le poète qui se change en multitude mais la multitude qui se reconnait dans la figure du poète. L'amour pour Marie qui paraissait propre à Ronsard devient l'amour porté aux femmes et chacun est alors capable de se reconnaitre dans ses textes. [...]
[...] -Cependant cette démarche semble ne pas pouvoir s'appliquer à tous poètes ou à toutes les formes de poésie. Qu'en est-il des poèmes purement personnels, ceux d'amour par exemple ? Où trouve-t-on une trace de charité dans un poème épique ou pamphlétaire ? II- Une poésie subjective ? La poésie engagée -Le poète peut faire le choix d'écrire en réaction à une situation précise, et non plus pour montrer l'invisible. Son texte revêt alors un aspect qui semble tout autre, engagé dans un conflit ou une tendance politique, le poète se fait alors porteur d'idées voir d'idéologie en emprise directe avec le monde. [...]
[...] Même si sa vision est subjective, son statut lui confère d'une certaine façon un rôle de guide. Conscient de ce qui l'entoure, il propose des interprétations du monde ou de soi qui permettraient aux hommes de s'harmoniser ; que l'auteur l'ait voulu ou non. Le travail poétique est donc basé sur la charité puisque la poésie absorbe le monde pour tenter de l'améliorer, au même titre que la religion. Ainsi la poésie, de sa création à sa diffusion, semble un don de charité universel. [...]
[...] -Le travail d'Apollinaire est un travail de réinvention du monde. Il ingurgite des connaissances comme autant de vin, les cuve et recrée le monde dans une vision différente, surréaliste, comme en état d'ivresse. Une strophe des Fiançailles exprime aussi bien le fond que la forme de son travail : Tous les mots que j'avais à dire se sont changés en étoiles Un Icare tente de s'élever jusqu'à chacun de mes yeux Et porteur de soleils je brûle au centre de deux nébuleuses. [...]
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