Place, chefs, oeuvre, art, précisément, littérature
L'Histoire est traversée par de grandes œuvres, qui ont marqué leur époque. A fortiori, elles sont devenues des chefs-d'œuvre, fruits du temps et du travail de l'artiste, puisque comme le disait le peintre Dali : « Pas de chef d'œuvre dans la paresse ! ».
Un chef-d'œuvre est, selon la définition du Petit Robert, « une œuvre accomplie en son genre ». On perçoit donc bien la nature exceptionnelle que doit revêtir une œuvre d'art pour être classée du côté des chefs d'œuvre : la perfection d'une œuvre est le critère pour qu'une œuvre devienne anthologique. Plus précisément, le chef-d'œuvre désigne une œuvre d'art complète et importante, qui soit la plus représentative possible d'un mouvement artistique. Le caractère historique est également omniprésent : un chef-d'œuvre est une œuvre appartenant au passé, à des mouvements artistiques passé.
Artaud, dans Le Théâtre et son double, lorsqu'il affirme que « les chefs-d'œuvre du passé sont bons pour le passé » insiste sur le caractère, effectivement, passé d'un chef d'œuvre : celui-ci correspond à un moment passé et il n'est pas bon de les réutiliser dans le présent. En effet, il pointe le doigt sur l'incompréhension du public face à ces chefs-d'œuvre : « Et si par exemple, la foule actuelle ne comprend plus Œdipe Roi, j'oserai dire que c'est la faute à Œdipe Roi et non à la foule. ». Il expose ainsi l'idée que l'attente du public se situe du côté des choses actuelles et vécues, au risque d'une réaction teintée d'incompréhension face à un chef-d'œuvre comme Œdipe Roi, qui renvoie à l'époque de la Grèce Antique et à ses problèmes. Artaud ne rejette pas là les grands chefs-d'œuvre du passé, mais pense que l'artiste doit donc être du côté de l'innovation et puiser son inspiration dans ce qui actuel. C'est d'ailleurs ce qu'il s'adonne à chercher dans son ouvrage, Le théâtre et son double, où il fait un constat négatif du théâtre de son temps et tente de produire théoriquement une nouvelle forme de théâtre.
[...] C'est ce qui habite de l'intérieur chaque mouvement littéraire. En effet, adhérer à un mouvement littéraire, c'est adhérer à des codes, à une certaine tradition, même si le mouvement en question est en rupture avec le passé. Un mouvement littéraire produit, en règle générale, un manifeste où les préceptes de ce mouvement sont dictés. Le but, même si celui-ci est implicite, étant pour les auteurs de produire l'œuvre qui sera la meilleure représentation du mouvement. Il y a donc un modèle initiateur que chacun cherchera, implicitement ou explicitement, à dépasser. [...]
[...] Les chefs-d'œuvre sont donc omniprésent et servent constamment de modèles, dans le but de les dépasser ou de les compléter d'une manière propre et originale. Mais si la littérature puise en elle-même, nous pouvons aussi dire qu'elle parle également du monde. Et si elle puise ses sources d'inspiration dans un fond qui lui est commun, c'est que les passions des hommes, malgré le temps qui passe, restent les mêmes. C'est ce qu'invoque Nerval, dans La Vie des lettres, fervent défenseur de la tradition en littérature. [...]
[...] Les chefs-d'œuvre ressemblent à des pierres tombales (Commerce, 1947). Ainsi, on conçoit le passé comme une matière morte, déjà usé, qu'il faut renouveler. La littérature doit donc se renouveler dans ses formes, ses idées, ses manières de créer, et coller avec une époque qui lui soit contemporaine, afin de produire des chefs-d'œuvre propre à chaque époque, dont la lecture pourra nous donner des indications sur le contexte d'écriture. Mais peut-on réellement proscrire l'idée d'un héritage en littérature ? Peut-on omettre l'idée, que malgré des ruptures, la littérature se renouvelle par elle- même ? [...]
[...] Au delà, les mouvements modernes, en rupture avec le passé, s'épuisent très rapidement et trouvent leurs limites dans les limites de la modernité. En effet, la question de la modernité ne s'envisage pas de manière singulière : nous devons concevoir plusieurs modernités, qui n'ont qu'une durée de vie limitée. Le principe de la modernité se voit en permanence repoussé : de nouveaux venus risquent d'arriver, de repousser les limites de la modernité, et ainsi l'artiste risque en permanence de voir qualifier d'ancien. [...]
[...] De plus, le moderne et l'innovation se voient heurtés par une préoccupation actuelle, qui est celle du tout a été vu en art Se démarquer, être original devient donc une question compliquée pour les artistes actuels. Comme nous l'avons défini dans l'introduction, le chef-d'œuvre est une œuvre capitale et importante, une œuvre accomplie en son genre, complète et qui représente au mieux un mouvement, une époque, un esprit. Mais, le terme, à la fin du XVIIIème siècle a pris une tout autre tournure, avec le nombre croissant de musées qui apparaissaient, notamment le Louvre en 1793. [...]
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