L'humorisme est un concept que Pirandello a créé afin de rendre compte de ce qui préside à la fois à la création et à la réception d'un certain type d'œuvres d'arts, celles qu'il appelle humoristiques. Les œuvres humoristiques peuvent tout aussi bien appartenir au genre romanesque qu'au genre théâtral. Mais nous verrons que c'est dans le cas du théâtre que les effets de l'humorisme peuvent le mieux se faire sentir pour le spectateur. Nous verrons que l'humorisme est une des théories littéraires qui se soucie le plus des spectateurs, de la réception du spectacle, et qu'elle le fait en des termes qui s'opposent complètement à la catharsis.
Nous essaierons d'abord de définir ce que Pirandello appelle l'humorisme et de voir quels effets il peut avoir dans la réception de la pièce par le spectateur.
Puis nous verrons que c'est cette théorie qui a poussé Pirandello à écrire des pièces caractérisées par le théâtre dans le théâtre, et que poussée à bout, cette théorie débouche sur l'impossibilité du théâtre.
Enfin, nous verrons que c'est à cause de cette théorie que le théâtre de Pirandello a connu une réception aussi mitigée de la part de la critique de l'époque.
[...] Il n'a pour fin que de disposer le public à une certaine réception du spectacle. Les réactions du public sont analysées par avance, prévues, et s'intègrent totalement à la pièce. D'où le sous-titre de la pièce : comédie en deux ou trois actes. On ne sait pas très bien si cette incertitude sur le nombre d'actes est due au fait que la pièce risque d'être interrompue, ou si c'est que le premier acte a déjà eu lieu en dehors du théâtre. [...]
[...] Pirandello prend ensuite un exemple romanesque : celui de Don Quichotte. Il écrit : nous aimerions bien rire de tout ce qu'il y a de comique dans la représentation de ce pauvre aliéné qui sur lui-même et sur les choses, sur toute chose, applique le masque de sa folie. Mais nous avons du mal à rire, constate-t-il, et il explique que c'est à cause d'« un sentiment de commisération, de tristesse et également d'admiration, car si les aventures héroïques de ce pauvre Hidalgo sont totalement ridicules, il ne fait cependant aucun doute que, sous ce ridicule, il est vraiment héroïque. [...]
[...] Cela prouve combien Pirandello se soucie de l'effet qu'il veut que le spectacle produise sur le spectateur. Dans Chacun à son idée, il y a quasiment 15 pages de didascalies, si on les met bout à bout. Dans une pièce de Molière, ce serait plutôt 15 lignes. Rien ne doit donc être laissé au hasard, et le spectateur est constamment manipulé par l'auteur. Ce souci de l'effet du théâtre que prouve l'importance des didascalies est peut-être en fait dû à la conscience aiguë que le théâtre, qui est un genre essentiellement spectaculaire, n'a de réalité véritable que dans la réception qui en est faite par le public. [...]
[...] Pirandello est un des auteurs qui se soucie le plus de la façon dont ses pièces sont reçues par le public, ce qu'il juge comme faisant partie de façon inaliénable et peut-être même première de la représentation théâtrale. . Ici, nous prenons pour référence le chapitre 5 d'Écrits sur le théâtre et la littérature, de Pirandello, Folio essais, p. 115-163. Intermèdes p. 181-195 et p. 233-244. [...]
[...] Au cours de la pièce, et plus particulièrement à la fin de chaque acte se trouvent des intermèdes[2] qui mettent en scène les entractes de la pièce. Le spectateur est alors littéralement privé d'entracte puisque celui- ci est joué. Et dans cet entracte joué sont mis en scène les réactions d'un public fictif et plus ou moins mélangé au vrai public. Le public assiste donc à la représentation et aux effets de la représentation d'une pièce de théâtre. L'auteur de la pièce cherche donc à engendrer une confusion dans l'esprit du spectateur, puisque la frontière entre la scène et la salle s'estompe. [...]
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