Écriture de soi, poésie, Souvenirs d'enfance et de jeunesse, Ernest Renan, Marguerite Duras, Frédérique Lebelley, figure de soi, autobiographie
Dans la préface de ses Souvenirs d'enfance et de jeunesse (1883), Ernest Renan écrit : « ce qu'on dit de soi est toujours poésie. S'imaginer que les menus détails sur sa propre vie valent la peine d'être fixés, c'est donner la preuve d'une bien mesquine vanité. On écrit de telles choses pour transmettre aux autres la théorie de l'univers qu'on porte en soi. » - Vous discuterez ce propos en vous référant en particulier aux oeuvres au programme.
[...] Se faisant historien avide de vérité, St Simon dégage ainsi des faits qu'il raconte « ce curieux détail des motifs qui font agir les hommes » (Instructions pour l'histoire, René Rapin), autrement dit, ce qu'Ernest Renan, lui, aurait appelé : « des menus détails » faisant preuve « d'une bien mesquine vanité ». Plus particulièrement si l'on s'intéresse à la structure du récit, les faits sont rigoureusement organisés (et annoncés par des notes en marge). L'intrigue du mariage de M. Le duc de Berry se présente d'emblée comme un récit complet et suivi perturbé par aucun élément extérieur. [...]
[...] Aussi, Mme de Sévigné, lorsqu'elle écrit ses lettres de 1671, ne reconnaîtrait pas sa fille dans un récit ou une description manqués, pas plus que mme de Grignan ne reconnaîtrait sa mère dans une expression conventionnelle et languissante, la lettre est précisément le lieu des subjectivités qui s'affrontent. Par ailleurs, dans l'écriture sévignéenne, le « drame » constitue un lieu central qui saisit et réinvente sans cesse le vivant. Si Mme de Sévigné entend travailler la qualité de son style (qu'elle revendique, par ailleurs, comme étant simple et léger), ce n'est pas tant à la forme de l'écriture que tient la poésie qu'à l'expression d'un « moi » qui se dit et se pense à travers les lignes et qui se fait objet d'un jugement esthétique. [...]
[...] Cette sottise nous a tous fait sortir de table, avant qu'on eût achevé de manger du fruit, de peur d'éclater à son nez. », Mme de Sévigné cultive le potin, le ragot, la rumeur et la raillerie qui consistent souvent en anecdotes, plaisanteries, bons mots. Ici, en jouant d'une écriture légère destinée à plaire et à divertir sa fille, l'épistolière tire le portrait amusant de Courcelles, le cocu notoire, se plaignant publiquement des deux bosses sur la tête l'empêchant correctement de mettre sa perruque. [...]
[...] Non, c'est un privilège réservé aux grands de ce monde, au soir de leur vie, et dans un beau style. ». Dès lors, puisque dès que nous parlons de nous-mêmes, c'est le règne de la fantaisie, certains auteurs comme Dobrouvsky ont affiché leur volonté d'envisager une nouvelle façon de se dire qui revendique une part d'ambiguïté, de reconstruction et de travail littéraire qui ont permis à l'écriture de soi de se dessiner de nouveaux concours qui ne tiennent pas l'unique narration de faits particuliers. [...]
[...] Aussi, l'évocation d'une activité d'écriture concerne davantage le désir d'écrire que le style et la recherche d'esthétique dans l'écriture-même. C'est en cela qu'elle double l'emploi d'un langage parfois trivial de l'usage de l'imparfait qu'elle préfère au passé simple, temps qu'elle juge trop littéraire. En effet, l'imparfait lui permet de mieux rendre le glissement de ces années, et également de se faire comprendre par tout le monde (un temps connu de tous devient naturellement accessible à un plus grand nombre de lecteurs), de façon à ce qu'elle parvienne à construire cette mémoire collective, cette mémoire du monde et de l'histoire. [...]
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