Le roman est un genre qui a subi des changements au cours du temps. Peu apprécié jusqu'au XVIIIe siècle, les écrivains du XIXe siècle tels que Balzac, Flaubert et Zola en ont fait leur mode d'écriture préféré. Les personnages connaissent eux aussi des métamorphoses : d'abord héros raffinés, parfaits et marqués par l'Antiquité au XVIIe siècle, ils deviennent des hommes de raison, des philosophes au temps des Lumières puis peu à peu au XIXe siècle des héros romantiques tiraillés par leurs sentiments, et un peu plus tard des « types humains » comme le Balzac, des reflets de la réalité. Ils seront d'ailleurs morts avec le nouveau roman au XXe siècle, « école du refus » du roman traditionnel du XIXe siècle.
Le terme de « héros » peut en effet être compris suivant deux sens : tout d'abord comme le personnage principal d'une œuvre et aussi comme une personne qui se distingue par une ou plusieurs qualités comme le courage, l'intelligence, la beauté ou la sagesse ce qui renvoie à l'étymologie grecque « hêrôs » qui dans la mythologie grecque renvoyait à un demi-dieu. C'est à partir de ce second sens que l'on étudiera le personnage principal héroïque du roman. En temps que lecteur, s'attend-on à ce que le personnage principal d'un roman soit héroïque ?
[...] Certains lecteurs attendront sans doute plus d'un personnage principal de roman qu'il soit non héroïque. Tout d'abord, ce personnage aura une personnalité plus complexe et plus nuancée. Contrairement à un héros héroïque, il ne sera ni totalement bon, ni totalement mauvais, il aura ses faiblesses et ses points forts et il pourra ainsi attirer plus facilement le lecteur de par ses multiples facettes possibles. De plus, un personnage avec une personnalité complexe peut être intéressant à suivre dans ses aventures, à connaître plus en détail. [...]
[...] Lorsque le personnage est dénué de qualités particulières et qu'il se laisse dépasser par les événements comme tout humain, le lecteur peut facilement s'identifier à lui, et cela le rend d'autant plus plausible et probable. Par exemple, le chevalier des Grieux dans Manon Lescaut de l'Abbé Prévost fait preuve de courage, mais seulement parce qu'il est dirigé par ses sentiments sans limites pour Manon : la passion dirige ses actions et ses choix. De même, un personnage non héroïque et presque faible et médiocre est intéressant dans un roman. [...]
[...] Ce personnage non héroïque parait ainsi, pour certains, plus réel et ceci peut être très appréciable. Plusieurs personnages principaux surtout de romans du XIXe siècle représentent bien ce personnage non héroïque comme Gervaise dans L'Assommoir de Zola. En effet, cette femme, qui a eu deux enfants, fut abandonnée par son compagnon. Pas particulièrement intelligente, mais jolie, elle se marie finalement avec un homme qui l'aime. Voulant se sortir de la misère, elle décide d'acheter un lavoir, mais c'est sans compter sur le fléau qui s'abattait sur Paris : l'alcool. [...]
[...] Le lecteur peut attendre d'un personnage principal qu'il soit un héros, car il peut être considéré comme un modèle et parce qu'il lui permet de sortir de son quotidien. Les qualités héroïques du héros en font un modèle à suivre pour le lecteur ? En effet, son courage, sa bravoure et son sens des valeurs morales en font un modèle. Par exemple, le personnage de Lancelot le chevalier dans le roman de la Table Ronde Lancelot le Chevalier et la charrette de Chrétien de Troyes écrit en 1168 sauve Guenièvre à ses risques et périls, mais son honneur lui commande de renoncer à elle. [...]
[...] Cela peut s'expliquer par le fait que les lecteurs de romans étaient lassés par le personnage héroïque qui avait toutes les qualités et que maintenant ils préféraient des personnages qui rêvent et qui ont des passions, des personnages plus proches d'eux ? Ce changement d'envie vient aussi sans doute du changement des mœurs de l'époque. Pour finir, alors qu'un héros héroïque se comporterait comme quiconque devrait sans doute le faire, l'anti-héros suscite la curiosité du lecteur en faisant ce que certains aimeraient faire sans l'oser ou en se l'interdisant. Ce personnage peut représenter toutes nos envies refoulées. [...]
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