La Peau de chagrin, Honoré de Balzac, Balzac, réalisme, roman, littérature, rang social
Chef de file du réalisme, Balzac ne se cantonne néanmoins pas à ce mouvement littéraire et tente des incursions dans d'autres registres comme le roman historique avec les Chouans (1829) ou le fantastique avec la Peau de chagrin. Paru en 1831, ce roman fait entrer un élément mystérieux dans un cadre réaliste très conventionnel : une peau qui exauce les voeux tout en réduisant l'espérance de vie de son propriétaire. Raphaël de Valentin, personnage principal de ce roman, est le témoin du pouvoir fantastique de cet objet et en tire une forme de puissance.
[...] Par ailleurs, même après sa ruine, il continue de fréquenter la haute société dans laquelle il évolue, participant ainsi à de nombreux diners mondains et sortant très régulièrement au théâtre, « aux Italiens » ou à l'opéra. Il fréquente la comtesse Foedora dont il est éperdument amoureux et qui est elle-même une femme très puissante socialement. Après avoir hérité de six millions de francs, il est célèbre et envié par les plus hauts placés parisiens. Ainsi, par son origine familiale et ses fréquentations, Raphaël apparait bien comme un personnage détenant une certaine puissance. [...]
[...] La véritable puissance de la Peau de chagrin serait alors la peau par sa dualité entre réalisation merveilleuse et destinée tragique. Au-delà de la peau, la puissance est incarnée par Balzac, le romancier lui-même, véritable démiurge dont le regard surplombant fait et défait en quelques mots la vie des personnages. Au-delà d'un roman à la fois réaliste et fantastique, Balzac s'initie à une réflexion d'ordre philosophique sur l'existence qu'il poursuivra dans la Recherche de l'absolu. [...]
[...] Ainsi, Raphaël de Valentin se trouve littéralement impuissant puisqu'il ne peut plus rien faire ni rien désirer sans risquer la mort. Finalement, si la puissance de Raphaël est nuancée par sa déchéance, c'est parce qu'il est en prise à des puissances qui le dépassent : la peau de chagrin en tant que talisman mais surtout en tant que représentation de la toute-puissance d'un romancier démiurge. Une véritable tragédie classique En effet, force est de constater que la véritable puissance du roman est la peau de chagrin. [...]
[...] Ce rôle d'auteur est d'ailleurs mis en abyme dans la deuxième partie du roman puisque Raphaël devient le conteur de sa propre vie : « La femme sans cœur » est le récit de sa vie que le personnage principal fait à son ami Emile. Ainsi, il a à deux reprises au cours du rôle un rôle de créateur, c'est-à-dire d'un personnage qui possède une forme de puissance. Enfin, c'est par la peau de chagrin que Raphaël acquiert définitivement le titre de personnage puissant. En effet, dans la première partie intitulée « le Talisman » il acquiert une peau magique réalisant les désirs de son propriétaire. [...]
[...] À l'instar des inscriptions sur la peau de chagrin, il est celui qui exauce les vœux des personnages mais aussi qui peut les tuer. Chaque personnage, aussi puissant soit-il, est donc soumis à l'homme de chair qui l'invente. Cette figure de démiurge presque divin correspond très bien à Balzac puisque, au-delà de la Peau de chagrin, il est l'auteur d'une grande fresque romanesque, la Comédie humaine, sorte de microcosme dans lequel les personnages circulent d'un roman à l'autre comme Rastignac que l'on retrouve dans le Père Goriot. [...]
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