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L'homme est misérable. Il est un rien, perdu, en disproportion avec l'espace et le temps. "L'univers me comprend et m'engloutit comme un point", écrit Pascal. Nous ne sommes que poussière en comparaison à l'infinité spatiale. On retrouve ici l'angoisse de l'époque, véhiculée par l'évolution des sciences avec Galilée et Copernic. "Nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre, et nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais". Nous passons le plus clair de notre temps à nous projeter dans un futur hypothétique ou à nous remémorer un passé révolu, laissant alors les bons moments nous échapper. L'homme, de par sa nature, ne peut saisir le présent, il lui file entre les doigts.
L'homme s'attache à des choses vaines, changeantes, comme les extravagances de l'amour. "Causes et effets de l'amour : Cléopâtre". Avec la brièveté habituelle de ses fragments, Pascal nous interpelle afin que nous poussions plus loin notre réflexion : si Marc-Antoine n'était pas tombé amoureux de Cléopâtre, l'histoire du monde aurait été toute autre. Nous nous laissons emporter et distraire par des futilités, qui nous détournent de notre chemin avec une aisance affligeante.
L'homme ne peut parvenir à juger bien ; il est sans cesse manipulé par des puissances trompeuses. Pascal en dénombre quatre : l'imagination, les coutumes, l'amour-propre et les sens. Pour témoigner de pouvoir de l'imagination, il utilise l'exemple du sermon d'un magistrat. Malgré sa "vieillesse vénérable" et le sérieux de son discours, parce que sa barbe est mal rasée et son visage étrange, le magistrat n'est pas écouté. Des détails insignifiants sont capables de solliciter notre imagination et de prendre le dessus.
Enfin, et surtout, l'homme ne peut être heureux. Il est une créature déchue : il a connu le paradis et ne pourra plus jamais y goûter à nouveau. "C'est être malheureux que de vouloir et de ne pouvoir" (...)
[...] Nous nous laissons emporter et distraire par des futilités, qui nous détournent de notre chemin avec une aisance affligeante. L'homme ne peut parvenir à juger bien ; il est sans cesse manipulé par des puissances trompeuses. Pascal en dénombre quatre : l'imagination, les coutumes, l'amour-propre et les sens. Pour témoigner de pouvoir de l'imagination, il utilise l'exemple du sermon d'un magistrat. Malgré sa «vieillesse vénérable» et le sérieux de son discours, parce que sa barbe est mal rasée et son visage étrange, le magistrat n'est pas écouté. [...]
[...] C'est pourquoi l'auteur nous donne le conseil suivant : «Travaillons donc à bien penser : voilà le principe de la morale». Si nous nous soucions de bien agir et d'être productif tout au long de notre existence, afin d'être accompli en tant qu'êtres humains, il nous faudrait avant tout cultiver nos pensées et raisonnements. Pascal nous oppose aux animaux, il nous place au-dessus d'eux. Comme le fera lui-même Descartes, il propose une théorie des animaux-machines. Contrairement aux espèces animales, nous n'agissons pas par instinct, nous avons une âme et nous sommes des êtres de raison. [...]
[...] Grandeur Si Pascal discourt aussi longuement sur notre condition d'homme misérable, il n'en oublie pas pour autant de nous conférer une certaine grandeur. Celle-ci n'est autre que notre première nature, elle renvoie à notre vie au Paradis, à ce que nous étions avant la chute. Nous sommes misérables, certes, mais nous savons notre misère et là réside toute notre grandeur. «L'homme serait plus grand que ce qui le tue parce qu'il sait qu'il meurt». Nous avons conscience du fait que nous ne sommes que des «bêtes», nous connaissons notre mortalité. À l'inverse, arbre ne se connaît pas misérable». [...]
[...] Place et importance du couple Misère/Grandeur dans les liasses II à VIII des Pensées de Pascal I. Introduction Les Pensées de Pascal sont principalement connues pour leurs fragments portant sur des thèmes comme le divertissement et l'imagination, par exemple. Mais une lecture de l'œuvre ne peut se passer de l'analyse de l'idée suivante : «L'homme est grand en ce qu'il se connaît misérable». «Quelle chimère est-ce donc que l'homme ? Quelle nouveauté, quel monstre, quel chaos, quel sujet de contradiction, quel prodige Nous sommes, par nature, des êtres de paradoxe et de contradiction. [...]
[...] Dans la liasse «Contrariétés», le fragment 121, qui se présente comme un poème (rythme régulier, chiasme, etc.), insiste sur cette dualité. Nous y sommes qualifiés de «monstre incompréhensible», ainsi que de «roseau pensant». Cette dernière métaphore illustre la beauté du paradoxe, l'unicité de l'association entre vulnérabilité et qualité d'être pensant. Le couple misère-grandeur est donc au cœur de la réflexion pascalienne. Si l'auteur janséniste développe une vision désespérante d'une nature humaine misérable et corrompue, il n'omet pas pourtant de nous attribuer une certaine grandeur, à juste titre : celle du pouvoir de notre pensée, qu'il nous faut cultiver. [...]
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