La parole théâtrale permet-elle de révéler les crises ou au contraire de les taire ?

Thèmes abordés

Parole théâtrale, Victor Hugo, prise de conscience, Pierre Corneille, didascalies, crise du personnage, répliques, Juste la fin du monde, Lagarce, détourner le dialogue

Résumé du document

Le théâtre, entendu comme un genre littéraire est, selon Victor Hugo (dans son œuvre Faits et croyances), « une voix qui parle, (…) un esprit qui éclaire, (…) une conscience qui avertit». En d'autres termes, le théâtre permettrait non seulement de nous éclairer (sur des faits sociaux notamment), mais aussi de nous en faire prendre conscience. Mais si on en croit Pierre Corneille «le sujet d'une belle tragédie doit n'être pas vraisemblable». Cet autre auteur important de la littérature française sous-entend donc que le théâtre ne serait pas là pour révéler quelque chose de «vrai», de réel. Par ailleurs, le théâtre est globalement un ensemble de paroles même s'il est généralement complété par des didascalies. C'est pourquoi il est intéressant de répondre à la question suivante : la parole théâtrale permet-elle de révéler les crises ou au contraire de les taire?

Extraits

[...] En effet, le texte permet tout de même de comprendre la présence d'une crise personnelle et d'une crise familiale, et ce sur plusieurs points. Le premier point est le « langage de sourd » qu'il y a entre les personnages. Il y a de nombreux quiproquos entre les personnages dès la première scène concernant la présentation de Louis et Catherine de manière très maladroite. D'ailleurs, nous comprenons dès lors que ce sont des protagonistes qui ont des relations non fluides voire plus tard dans la pièce : conflictuelles. [...]

[...] Cela permet de remarquer qu'il y a aussi cette crise du langage qui peut être plus ou moins prononcée selon les pièces. La crise présente dans la pièce de Lagarce est très prononcée. En effet, même sur la forme, l'auteur fait des coupures de phrases en passant à la ligne suivante de manière fréquente pour de longues répliques (monologues) ajoutant des sauts de ligne notamment dans la scène 8 de la première partie. La crise du langage de Sophocle dans son œuvre Œdipe Roi, elle, est moins prononcée. [...]

[...] Lagarce intègre finalement des descriptions des actions au travers des mots de ses personnages : « Ne lui serre pas la main, embrasse-la ». On sait ainsi que Louis à serrer la main de Catherine. On pourrait ainsi par analogie au discours direct, parlé de didascalie directe ou didascalie « implicite » comme l'utilise Molière dans l'École des femmes par exemple. La parole théâtrale peut aussi camoufler les crises La parole théâtrale peut aussi camoufler les crises soit en adoucissant les crises au travers des mots des personnages ou avec des personnages qui font abstraction (ou détourne) leur crise personnelle des sujets de conversation Adoucissement des crises par les mots Puisque la crise par définition suppose un changement, les personnages alternent continuellement entre espoir et désespoir, et ce aussi au travers de leurs dialogues. [...]

[...] La parole théâtrale permet-elle de révéler les crises ou au contraire de les taire ? Le théâtre, entendu comme un genre littéraire est, selon Victor Hugo (dans son œuvre Faits et croyances), « une voix qui parle, ( ) un esprit qui éclaire, ( ) une conscience qui avertit ». En d'autres termes, le théâtre permettrait non seulement de nous éclairer (sur des faits sociaux notamment), mais aussi de nous en faire prendre conscience. Mais si on en croit Pierre Corneille « le sujet d'une belle tragédie doit n'être pas vraisemblable ». [...]

[...] En conclusion la parole théâtrale à la double fonction de révéler et cacher les crises personnelles et familiales et ce sans même qu'il y ait besoin de didascalies explicites. Par ailleurs, l'auteur Lagarce, atteint de la maladie du SIDA pour laquelle il n'y avait pas de remède à son époque, vit lui-même une crise personnelle. Pour aller plus loin, on pourrait donc se demander si l'auteur n'utilise pas la parole de sa pièce de théâtre pour camoufler l'entièreté de sa crise personnelle qu'il traversait au mouvement de l'écriture de son ouvrage. [...]