Lorsque je suis sorti de la Sorbonne où j'enseignais ma science depuis de longues années, je fis quelques pas et m'écroulai sur le macadam parisien. Les passants et les étudiants se mirent alors à me relever spontanément et je leur dis dans une faiblesse morale agonisante : « Ce n'est rien, c'est juste un petit vertige ». Certains même, devant le spectacle de la chute, furent pris de panique en appelant immédiatement les secours. Mais je me relevai avec une telle vigueur que je compris une nouvelle fois que ma vaillance et ma force faisait partie intégrante du moteur de ma vie solitaire.
[...] La fête s'était interrompue l'espace d'un instant car les convives étaient pris par l'éloquence d'un homme. Une jeune fille aux traits délicats et particulièrement captivée par l'histoire laissa parler son impatience : La suite, s'il te plaît Benoit Dubuisson Éditions en ligne bd20101102cla Et ce fut tout ce qu'elle prononça. Après de nombreuses secondes, laissant le temps en suspens, l'orateur se remit à l'œuvre : Vous avouerez que, derrière ce masque, se cachait une puissance de vie débordante. En effet, ce qu'il avait ressenti dans la musique semblait enfoui sous une carapace d'orgueil. [...]
[...] Chers amis, pour un spectateur anodin, vous imaginez le tableau ! En effet, la seule vue d'un homme à demi-mort peut paraître quelque peu mystérieux. Il arrêta ses études ou plutôt on l'y força, sa motivation étant réduite au néant, et retourna chez lui dans l'incompréhension de ses proches qui le prenait pour un homme ayant touché la folie. Mais il avait gardé son sens de la répartie, son autodéfense, sa nonviolence qui lui permettaient de se détacher de l'emprise ou du jugement des autres. [...]
[...] Lors d'une journée ensoleillée, une jeune femme au visage félin vint à moi et me dit avec son accent anglophone : J'ai appris que vous étiez professeur de français et que vous veniez de Paris ? Pouvez-vous m'aider ? Je suis étudiante en littérature française et je dois préparer un mémoire sur Flaubert. C'était une très jolie femme d'une trentaine d'années avec des cheveux blonds et bouclés, des yeux verts pétillants de Benoit Dubuisson Éditions en ligne bd20101102cla santé, une gorge alléchante et un faciès dégageant une animalité de tigresse. Son allure semblait sortir d'un monde profondément érotique car elle n'avait pas besoin de sourire pour séduire ou pour plaire. [...]
[...] Il se mit à l'œuvre en butant de nombreuses fois sur les mêmes problèmes. Pourtant, il s'acharnait et gardait en lui l'espoir, ce fameux espoir de l'intuition. Pendant cinq années, il ne cessa de chercher l'impossible si bien que sa vie se perdit dans le non-sens. Foudroyé de désespérance, il revint chez lui et dit à son père avec tout le lyrisme caractérisant les gens cherchant le réconfort : Papa, je me meurs ! C'est alors que son père, pris de pitié par la mine ravagée de son fils, le prit par le bras, lui fit respirer l'air frais de son enfance et dit : Goûte la vie Charles, tu es trop jeune pour mourir ! [...]
[...] Je me souviens encore quand il me disait : Moi, je sais réfléchir ! À la sortie d'un examen, il eut la meilleure note de tout l'amphithéâtre qui comptait environ six cents candidats. Mais il déclina et tomba dans le trouble de la maladie du siècle, en l'occurrence cette espèce Benoit Dubuisson Éditions en ligne bd20101102cla de névrose qui caractérise les êtres décalés qui cherchent l'indicible. Il continua à travailler mais devint très inconstant puis finit par tomber dans l'absurdité totale car sa vie se résumait à s'asseoir sur les bancs de l'université sans pouvoir jouir de n'importe quel plaisir. [...]
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