Le mythe est un récit fondateur et fabuleux qui met en scène des êtres incarnant sous une forme symbolique des forces de la nature, des aspects de la condition humaine. Par extension, le mythe est la représentation de faits ou de personnages réels déformés ou amplifiés par l'imagination collective, la tradition. Dans les quatre romans du XXe siècle que sont La Marche de Radetzky de Philip Roth, Le Docteur Jivago de Boris Pasternak, Antigone d'Henry Bauchau et Médée de Christa Wolf, les personnages sont confrontés au mythe dans l'oeuvre à laquelle ils appartiennent. En effet la vie de Charles-Joseph est déterminée par la légende du héros de Solferino et à travers cet épisode se profile le mythe du vieil empire idéalisé ; Jivago se trouve pris dans les conséquences du mythe révolutionnaire, et les deux réécritures des mythes antiques ont pour essence même cette notion. En 1935, Malraux constate que "nulle civilisation - et même nulle barbarie - n'est assez forte pour arracher aux hommes les mythes qui sont la plus vieille puissance humaine, mais la barbarie est ce qui sacrifie les hommes aux mythes, et nous voulons une civilisation qui soumette les mythes aux hommes". Dans les oeuvres au programme, le mythe donne en effet cours à la violence et à l'entrave à la liberté. Mais l'entreprise de réécriture du mythe, directement d'une part et par le biais du roman historique d'autre part révèle une volonté de libérer l'être de ce joug.
[...] En outre, ces mythes ont tous pour cadre la dictature ou du moins l'abus de pouvoir, et laissent cours à la violence. Jivago insiste ainsi à de véritables massacres populaires, et à la dépossession de son identité au profit de la glorification des entreprises collectives, à travers la confiscation de ses biens et l'interdiction portée sur son œuvre. Les romans Médée et Antigone ont tous les deux pour cadre la dictature de Créon et les héroïnes sont confrontées à son pouvoir tyrannique. [...]
[...] En revanche dans la Marche de Radetzky, l'impossibilité de l'art est signe de l'échec de la prise de conscience. L'art y est opposé au domaine militaire, comme le montre la discussion entre le préfet et le chef de musique : Nechwal expliquant que son fils aîné est bon élève, Trotta lui demande alors Il deviendra sans doute musicien, lui aussi ? ce à quoi l'officier répond : Non, il entre dans un an à l'école des cadets L'art a donc du mal à se faire une place ; cela dit il est opposé au domaine militaire qui, par la légende initiale, est pointé comme une imposture. [...]
[...] Antigone, fille de reine qui préfère vivre dans la rue et mendier, est victime de l'incompréhension de son entourage. Le mythe peut aussi donner cours à la barbarie du sacrifice des hommes au mythe Ainsi, Médée est victime de conspiration et elle est sacrifiée par le discours dominant. Le capitaine Trotta, lui aussi manipulé en étant transformé en outil de propagande, ne veut pas participer à la légende ; l'empereur, plutôt que de démythifier la légende, fait effacer son acte et son nom des manuels de lecture. [...]
[...] Dans les quatre romans du XXe siècle que sont La Marche de Radetzky de Philip Roth, Le Docteur Jivago de Boris Pasternak, Antigone d'Henry Bauchau et Médée de Christa Wolf, les personnages sont confrontés au mythe dans l'œuvre à laquelle ils appartiennent. En effet la vie de Charles-Joseph est déterminée par la légende du héros de Solferino et à travers cet épisode se profile le mythe du vieil empire idéalisé ; Jivago se trouve pris dans les conséquences du mythe révolutionnaire, et les deux réécritures des mythes antiques ont pour essence même cette notion. [...]
[...] L'art leur ouvre les yeux sur une utopie de liberté et de fin de la violence future, comme en témoigne la fin du Docteur Jivago. Les ouvre aux perspectives futures de liberté, sauf peut-être pour le roman de Philip Roth dans lequel le dernier des Trotta meurt en même temps que l'illusion du mythe de l'Empire austro-hongrois. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture