La définition du mythe implique une vision globale de celui-ci. Dans cette phrase, Claude Lévi-Strauss suppose l'universalité du mythe, sa valeur propre qu'il acquiert en tant que mythe. Pour lui, quel que soit l'endroit du monde où il est rapporté, les individus qui y sont confrontés sauront instinctivement qu'ils sont face à un mythe. La création des mythes ne serait pas liée à la culture dont ils sont issus, ils auraient une vie propre, indépendante de par leur nature même de mythe.
Mais qui peut revendiquer la création d'un mythe ? L'histoire, comme l'écrit Claude Lévi-Strauss, se suffirait-elle à elle-même ? Comme si le mythe avait toujours existé, était atemporel et éternel, qu'il se reformait de lui-même. Ou bien est-ce l'auteur, le poète ou l'artiste qui écrit (ou réécrit) cette histoire ? Par les mots qu'il choisit, crée-t-il pour autant le mythe, ou bien ne fait-il que l'utiliser pour mettre en œuvre sa poétique ?
[...] Si l'émetteur est l'auteur, quel qu'il soit, le récepteur reste toujours le public. En effet, il s'agit d'un langage vers un destinataire. Le spectateur reçoit le mythe, un mythe duquel il est familier. C'est cette familiarité qui rend l'histoire immédiatement accessible. De la même façon, c'est grâce à cette absence de dépaysement que le spectateur peut être sensible aux variations entre les auteurs et les styles. Il prendra conscience de la portée symbolique d'un changement de genre, par exemple, puisque Médée est uniquement un personnage tragique. [...]
[...] Ainsi, la poétique qu'avait écartée Claude Lévi-Strauss se révèle d'une importance énorme, que ce soit pour la confection du mythe ou son utilisation. Si le fond mythique et la poétique du conteur sont aussi importants l'un que l'autre pour permettre de reconnaître un mythe, une troisième partie permet de les départager. Une notion importante évoquée par Claude Lévi- Strauss est celle du langage. En effet, pour lui, le mythe a vocation d'exprimer, mais en transcendant la langue et la culture dont il est issu. Ce serait une discussion sans barrière, de langues ou culturelle. [...]
[...] Définir que nous avons bien affaire à un mythe permettra d'analyser le rôle du conteur dans son œuvre, rôle ellipsé et réduit par Lévi-Strauss à quelque chose de second plan. Enfin, il s'agira de démontrer que l'aspect de langage évoqué par l'anthropologue est une réponse possible à l'attribution d'un statut de mythe. Le rapport du mythe à la réalité ne se fonde pas sur une volonté de réel. Le mythe englobe la réalité qu'on lui prête, il n'en possède pas de lui- même. Déterminer un fond mythique dans Médée reviendrait par conséquent à déterminer si elle s'appuie sur la réalité ou bien si elle s'en détache. [...]
[...] Néanmoins, cela n'est possible qu'à partir du moment où le mythe continue d'être réécrit et étudié. La question se pose de savoir si le mythe est éternel une fois qu'il a atteint ce statut, ou bien s'il est également périssable comme toute histoire. Ou tout auteur, du reste. [...]
[...] Jean-Pierre Camus adapte le mythe bien connu pour servir son propre discours. Il l'utilise pour illustrer ce à quoi mènent les tromperies dans un couple harmonieux. Il fait sienne la figure de Médée, et dès son titre le lecteur sait où l'accent sera mis : La Mère Médée il s'agira de la démonstration du meurtre de ses enfants. Chaque auteur a des variations sur les personnages eux-mêmes. Jason, par exemple, n'est pas traité de la même manière. Chez Sénèque, il apparait comme un lâche, notamment lorsqu'il appelle à la vindicte populaire un acte qu'il a lui-même provoqué La voici, c'est elle, qui se tient perchée sur le bord du toit, qu'on lance là des brandons enflammés pour qu'elle tombe et soit / consumée par ses propres flammes p.87). [...]
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