Dans son poème L'Aube romantique, écrit en 1866, Théodore de Banville dépeint la France de 1830 comme le lieu d'un épique foisonnement culturel, d'un enthousiasme bruyant et généralisé pour les lettres et les arts. Le poète évoque ainsi successivement toutes les grandes figures de cette époque, écrivains (Hugo, George Sand, Musset, Balzac...), peintres (Daumier, Delacroix...), musiciens (Berlioz) etc. Tous sont rangés sous la bannière du romantisme, qui triomphe alors sur scène et dans l'opinion lors de la célèbre bataille d'Hernani (février 1830).
Le romantisme est en effet le mouvement dominant de la vie culturelle du premier XIXe siècle, et son éclat retentit bien au-delà de 1850, comme le montre la nostalgique évocation de Banville. Quelles sont les caractéristiques de ce puissant mouvement culturel ? Comment s'inscrit-il dans la société française du premier XIXe siècle ?
(...) Le mouvement romantique trouve l'apogée de son expression en France sur une période relativement brève, années 1820-1840, avec un côté météoritique, révolutionnaire (échec de la révolution de 1848 : la fin des illusions). Mais l'ombre portée et la nostalgie pour ce mouvement s'expriment bien au-delà (Banville et d'autres comme Baudelaire), et il faut remonter à la deuxième moitié du siècle précédent pour trouver les origines de ce puissant mouvement culturel.
Un mouvement né hors de France : on peut trouver les toutes premières traces de la nouvelle sensibilité en Angleterre dès les années 1740, avec les romans de Richardson (Clarisse Harlowe, un best-seller dans toute l'Europe et notamment en France, trad. de l'abbé Prévost) et les poésies de Young (Les Nuits) : sentimentalisme bourgeois, goût de la nature, penchant à la rêverie et à la mélancolie, expression intime du moi...De même, les poèmes attribués au barde écossais Ossian (IIIe siècle), publiés à Londres en 1760 par James Mac Pherson témoignent d'un goût pour les époques reculées (celtes), le mystère, le surnaturel. Ce goût se manifeste également avec les romans gothiques, tels le Château d'Otrante d'H. Walpole (...)
[...] Il s'attribue en effet fréquemment une fonction, un rôle de guide de la société vers plus de progrès, de liberté, de vérité. Il est donc un prophète inspiré, un visionnaire en avance sur son temps, un mage romantique Cette idée est déjà développée par Mme de Staël dans De la littérature (1800) : Les écrivains font marcher l'esprit public plus vite et plus loin qu'une éducation nationale Elle peut également justifier les engagements de Chateaubriand dans la vie politique dès les années 1810. [...]
[...] (Mal du siècle rapporté aux événements historiques, et au sentiment de vide ressenti par la génération d'après le Ier Empire). Les moyens de ce combat culturel : Le cénacle :terme qui porte au départ une connotation religieuse (la Cène), utilisé au départ par Ste Beuve pour désigner les jeunes gens qui se retrouvent dans le salon de Victor Hugo. Par extension, désigne les nombreuses coteries et groupes intellectuels qui s'organisent sous la Restauration autour de quelques personnalités dominantes : grenier de la rue Chabanais (critique E. [...]
[...] Le romantisme est d'abord un mouvement contre-révolutionnaire (vers 1820) Romantisme est d'abord une inquiétude face à la modernité, rejet de l'individualisme moderne et de la raison universelle issus des Lumières. En Allemagne, vogue de la tradition médiévale est une affirmation de l'identité et de la tradition nationales face à l'envahisseur français révolutionnaire puis napoléonien. Idem en France : le premier romantisme est aristocratique (Chateaubriand, Lamartine), angoisse devant le choc provoqué par la Révolution (exil, renversement des valeurs, incertitude de l'avenir la dénonciation de la tyrannie impériale, pour les positions et les valeurs perdues de l'aristocratie, sensibilité poétique face au siècle des mathématiques (Lamartine). [...]
[...] L'artiste romantique se sent incompris dans la société moderne, dont il se présente volontiers comme une victime. C'est le thème de Chatterton, pièce de Vigny (1835), qui lance une certaine vogue du suicide. D'autres sombrent dans la folie, comme Gérard de Nerval. De même, même si les grandes figure du romantisme obtiennent de grands succès de librairie ou au théâtre, fascination des milieux romantiques pour les génies obscurs, les artistes maudits : exemples des poètes Aloysius Bertrand ou Héségippe Moreau, succès après leur mort précoce. [...]
[...] De leur côté, les Romantiques s'éloignent de la monarchie ultra, en raison des atteintes au principe de liberté. C'est le cas de Chateaubriand, tandis qu'Hugo dépeint dans les Odes la figure du poète dans les révolutions consolateur et guide des tristes humains dans leurs fers Rapprochement du libéralisme et des Romantiques se fait notamment par l'intermédiaire du journal Le Globe (fondé en 1824). Fonde une nouvelle alliance entre progrès littéraire et progrès politique : c'est le principe de liberté qui vient renouveler l'art comme il a renouvelé la société (Hugo, Littérature et philosophie mêlées). [...]
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