L'Essai III, 13 est le dernier chapitre de l'ouvrage de Montaigne et il représente effectivement le terme de son évolution. Montaigne avait d'abord été séduit par le stoïcisme qui préconise un idéal de vie surhumain, en prescrivant à l'homme de se raidir contre tout plaisir et de dompter la nature. Le voici qui revient à la nature qui est un « doux guide ». II est donc naturel qu'au terme de sa vie, après avoir longtemps médité sur le sens de l'existence, il porte un jugement de valeur qui résulte de la confrontation entre la réalité et les vains efforts que les hommes ont fait pour dépasser celle-ci. Mais comme toujours, son jugement est modéré et il n'essaye pas de nous l'imposer : « Les plus belles vies sont, à mon gré, celles qui se rangent au modèle commun et humain, avec ordre, mais sans miracle et sans extravagance. » Cette phrase comporte trois affirmations : Il n'y a pas, nécessairement, de conformité entre la « beauté » d'une vie et la recherche d'un idéal surhumain; la vie consiste à adopter une ligne de conduite raisonnable (avec ordre) qui fait l'accord de la plupart des hommes (modèle humain et commun); Cette ligne de conduite ne doit comporter rien d'irrationnel (sans miracle) ni de déraisonnable (sans extravagance). Il nous appartiendra de vérifier, par l'étude des Essais, ce précepte de Montaigne.
[...] C'est dans la pratique que l'être humain se réalise et non dans les conjectures. A tout instant d'ailleurs, nous risquons d'être victimes de notre imagination. Autrement dit, dans notre existence, tout dépend d'une action lente, prudente et patiente. Savoir se ranger implique le renoncement aux élans désordonnés et aux aspirations démesurées. Rien ne peut se faire qu'en harmonie avec, notre tempérament et en conformité avec notre caractère. Il exclut aussi tout comportement déraisonnable sans extravagance Une des plus dangereuses extravagances, c'est pour Montaigne le fanatisme. [...]
[...] Montaigne sait par expérience que notre emprise sur le monde est bien faible : Ne pouvant régler les événements, je me règle moi-même et m'applique à eux, s'ils ne s'appliquent à moi. 17). La vie est plutôt composée de menus faits et incidents que de grandes actions d'éclat : il faut s'accommoder de cet état de choses. Telle est cette sagesse, plus importante que le savoir et de même qu'elle ne résulte pas de la science, de même aucune science abstraite ne pourra jamais la dépasser. [...]
[...] Expliquez et commentez cette maxime de Montaigne : Les plus belles vies sont, à mon gré, celles qui se rangent au modèle commun et humain, avec ordre, mais sans miracle et sans extravagance. Plan. I. La recherche d'un idéal surhumain ne fait pas la beauté d'une vie. Idéal surhumain et stoïcisme. Le stoïcisme est une entreprise contraire à la nature. Dépasser la nature humaine est un leurre. II. La vie consiste à suivre la nature. [...]
[...] Ainsi, Montaigne nous enseigne qu'il n'est pas si facile de se ranger au modèle commun et humain parce que ce modèle ne peut pas être ramené à une formule ou à un schéma tout tracé. Se ranger n'implique d'ailleurs pas un acte définitif et unique, mais un ajustement progressif et qui risque à tout moment d'être faussé par nos illusions et notre inexpérience. La vie ne relève pas de la théorie et des vues de l'esprit : elle est un art Or le principe suprême de l'art est la vérité ; mais c'est aussi un perpétuel recommencement et en ce sens l'œuvre d'art n'est jamais qu'une approximation. [...]
[...] Illusion de l'héroïsme. La sagesse assure le bien-être de l'homme. Une sagesse, non pas contemplative, mais pratique. III. Difficulté de se ranger au modèle commun. Un idéal sans valeur absolue. Un idéal qui exclut toute attitude irrationnelle. Un idéal qui exclut tout comportement déraisonnable. L'Essai III est le dernier chapitre de l'ouvrage de Montaigne et il représente effectivement le terme de son évolution. [...]
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