Transformation de la réalité, fonction esthétique, Littérature et arts, groupe, suivre les autres, travail, époque, Hitler, premiers poèmes, Italie, théâtre sur scène, Nouveau Roman, représentation au théâtre, mort des personnages
Victor Hugo a écrit dans la préface de Cromwell : "La division du beau et du laid dans l'art ne symétrise pas avec celle de la nature. Rien n'est beau ou laid dans les arts que par l'exécution. Une chose difforme, horrible, hideuse, transportée avec vérité et poésie dans le domaine de l'art, deviendra belle, admirable, sublime, sans rien perdre de sa monstruosité, et, d'une part, les plus belles choses du monde, faussement et systématiquement arrangées dans une composition artificielle seront ridicules, burlesques, hybrides, laides… Job et Philoctète avec leurs plaies saigneuses et fétides sont beaux ; les rois, les reines de Campistron sont fort laids dans leur pourpre et sous leur couronne d'oripeau. Une chose bien faite, une chose mal faite, voilà le beau et le laid dans l'art".
[...] Plutarque quant à lui, prétendait qu'une chose laide reproduite en art demeurait laide, mais que le talent artistique pouvait refléter de la beauté.[1] Si ces avis, repris par Hugo, demeurent encore aujourd'hui pertinents et défendables, ce que nous exposerons tout en traitant des conditions d'une telle asymétrie, il faudra également relativiser cette dernière, chercher des exceptions en prenant en compte divers aspects plus théoriques sur la laideur et la beauté. Ainsi, n'y a-t-il pas certains sujets qui demeurent laids malgré une performance artistique parfaite ? Et qu'en est-il des variables individuelles de la perception du beau et du laid, qui ne sont pas nommées par Hugo ? [...]
[...] Mais c'est là que s'arrête la possible beauté du film, au stade de son pouvoir d'énonciation ; car tous les évènements et quasiment tous les personnages sont désagréables à la vue et heurtent l'idée que l'on se fait du beau Tout y est dégoutant, détestable, vilain, répugnant, écœurant, monstrueux, tous ces termes pouvant servir de synonymes pour laid ; que ce soit les enfants soldats des jeunesses hitlériennes se sacrifiant bêtement en plein Berlin à quelques jours de l'armistice pour une cause qu'ils ne peuvent comprendre, Magda Goebbels assassinant ses enfants dans leur sommeil en leur faisant croquer une pastille de cyanure ou les officiers SS zélés obéissant à des ordres émanant d'un fou. Rien de cela ne provoque une émotion positive. Or, c'est ce qu'un spectateur face à quelque chose de beau, dans la nature ou dans l'art, est sensé ressentir. Pour compléter la thématique nazie tant chronologiquement qu'artistiquement, examinons le roman sous forme de pseudo-mémoires de Robert Merle La mort est mon métier, retraçant la vie de Rudolf Lang, qui s'appelait en réalité Rudolf Höss et qui a été commandant du camp de concentration d'Auschwitz. [...]
[...] Cependant, tant Campistron que la propagande stalinienne ont trouvé leur public, de gré ou de force, nous en convenons. Cette forme d'art a donc correspondu à un certain esthétisme, sauf pour les décideurs du bon goût, dont Hugo faisait partie. Concernant les exemples cités par Hugo, nous prétendrons qu'il n'a pas pris de grands risques en affirmant que Job et Philoctète étaient beaux malgré leurs plaies. Images dégoûtantes et repoussantes que sont les supplices qu'a dû subir Job, il n'en demeure pas moins que le personnage est un exemple à suivre dans un sens religieux. [...]
[...] Il est alors fort probable que la performance artistique, donc le beau, soit complètement annihilé par les souvenirs ramenés à la surface. Pour mieux illustrer ces éléments, nous avons pris trois œuvres traitant du nazisme : La bande dessinée Maus d'Art Spiegelman, les pseudo-mémoires La mort est mon métier de Robert Merle, et le film La chute, du réalisateur Olivier Hirschbiegel. Dans Maus, Art Spiegelmann raconte la survie de son père juif polonais, Wladek Spiegelman, rescapé d'Auschwitz, durant la seconde guerre mondiale. [...]
[...] Elle est surtout dépeinte du point de vue des gens qui y habitent et y travaillent, non pas d'intellectuels étrangers ne voyant que ce qu'ils veulent voir. Ce qu'elle retrouve également c'est son aspect menaçant : Au moment où Joseph levait la tête, le rose s'est éteint sur le glacier, qui est devenu pâle dans toute sa longueur, en même temps qu'il semblait s'avancer et venir à votre rencontre. Ou plus loin dans le récit, encore plus explicite : Joseph recommençait à faire monter ses yeux, à les faire descendre : il lui semblait que s'il tournait seulement le dos le glacier allait se mettre en mouvement pour de bon et lui sauter dessus par-derrière. [...]
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