Analyse d'une oeuvre littéraire, cohérence littéraire, vision explicative, vision interprétative, notion d'intention, théories lansoniennes, structuralistes français, formalistes russes
Traiter un texte comme un tout aléatoire, assemblé par une machine ou tapé par un singe, n'a aucun intérêt analytique. Le texte littéraire n'est pas un simple langage sans sens. L'oeuvre, comme la théorie littéraire, présuppose l'existence d'un discours, d'une parole, et donc, d'une intention, c'est-à-dire d'une cohérence intrinsèque à l'oeuvre. Mais cette intention est-elle décelable ? Est-ce en se penchant sur l'auteur que nous parviendrons à faire ressortir une juste explication de l'oeuvre ? Ou faut-il s'en détacher pour laisser libre cours à l'interprétation ? On oppose généralement la vision classique et explicative à la vision moderne plus interprétative.
En questionnant différentes critiques modernes et classiques, en s'appuyant sur l'exemple de certains auteurs, nous nous interrogerons sur la notion d'intention. Si la théorie littéraire vise à trouver un sens juste aux oeuvres, on peut se demander : quelle est la meilleure façon de révéler le sens ? Est-il toujours celui de l'auteur ? Connaître l'auteur nous aide-t-il à mieux comprendre le sens de son oeuvre, ou au contraire, nous en éloigne-t-il ?
[...] Dans tous les cas, la notion d'intention ne peut être séparée de l'analyse littéraire sans quoi elle serait désuète. L'intention ne signifie pas pour autant l'auteur en lui-même. Elle a été liée aux Muses, fille de la mémoire, puis à Dieu, créateur originel, puis aux auteurs directement. Aujourd'hui, suite aux nombreuses réflexions sur le langage et avec les thèses structuralistes, on peut se demander si la véritable intention ne serait pas dans le langage lui-même. L'auteur serait alors victime de sa langue, emporté par elle, presque malgré lui. [...]
[...] L'œuvre demeure ancrée, d'une façon ou d'une autre, dans l'époque où elle a jailli, et ce n'est même parfois qu'en refusant de la détacher de cette époque que nous la comprendrons mieux et qu'elle pourra nous éclairer davantage sur notre monde contemporain. Ce n'est cependant pas l'avis de Borges (1899-1986), écrivain argentin, lorsqu'il écrit la note biographique de Pierre Ménard, auteur du Don Quichotte, publié en 1939. Cette œuvre de Ménard, reprend la reproduction à l'identique de certains chapitres du roman de Cervantès. Il voulait pas composer un autre Quichotte ce qui est facile mais le Quichotte. [...]
[...] Un peu plus tard, Gustave Lanson (1857-1934) écrit son Histoire de la Littérature française (1894) où il s'écarte des idées de Sainte-Beuve tout en les reprenant. Pour lui, Sainte-Beuve s'intéressait trop aux auteurs et pas assez aux livres. Lanson écrit presque des biographies de livres. Recherchant le vrai sens des textes, il en vient à réfléchir aux intentions de l'auteur à la source de la création littéraire. Il prône une lecture savante, détachée, non émotionnelle des œuvres, et fait valoir que ce n'est qu'ainsi qu'on peut débusquer le véritable sens des œuvres. [...]
[...] L'idée même de théorie littéraire présuppose l'existence d'une attention. Pour certains, cette attention peut être inconsciente (analyse freudienne) ou sociale (analyse marxiste). De même, s'il faut relativiser l'utilisation des méthodes biographiques et philologiques, on peut également noter que l'intertextualité promue par les structuralistes, comme la méthode des passages parallèles, fait elle aussi implicitement appel à la notion d'intention d'auteur. Comme le montre bien Antoine Compagnon dans son ouvrage, Le démon de la théorie, au chapitre « Straight from the horse's que l'on soit de la tendance explicative ou interprétative, on préférera, pour éclairer le passage obscur d'un texte, utiliser un passage parallèle du même auteur, plutôt que celui d'un auteur différent : c'est donc bien qu'on suppose implicitement une intention d'auteur, sinon on piocherait sans problème dans les œuvres des autres. [...]
[...] Étudiant les différentes fonctions du langage il propose six facteurs en jeu dans tout processus linguistique : la fonction référentielle centrée sur le référent ; la fonction expressive centrée sur le destinateur ; la fonction conative centrée sur le destinataire ; la fonction phatique centrée sur le contact ; la fonction métalinguistique centrée sur le et enfin, la fonction centrée sur le message lui- même. C'est cette dernière fonction qui caractérise l'aspect poétique du message. Bien que la poésie ne puisse être réduite à cette simple fonction et qu'elle utilise parfois d'autres fonctions (ainsi la poésie lyrique va exploiter la fonction expressive, émotionnelle), elle demeure ce domaine où sens et son se superposent, le son devenant l'écho du sens. La littérature est ici considérée comme une communication entre un auteur et un lecteur. [...]
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