D'abord entendus, puis lus et relus par chacun d'entre nous depuis l'enfance, les textes de Charles Perrault semblent ne plus offrir aucune aspérité. Ce n'est pas le moindre des paradoxes que des récits composés à la fin du 17ème siècle bercent encore les jeunes années de nos contemporains quand nombre d'auteurs plus récents sont tombés dans l'oubli.
Cependant les multiples éditions pour la jeunesse et les adaptations cinématographiques sont allés jusqu'à dénaturer ces oeuvres ; qui sait encore par exemple comme se termine vraiment La Belle au bois dormant ?... Mais leur seul caractère divertissant suffit-il à expliquer la fortune de ces textes ?
Sans compter que les Contes de Perrault semblent aujourd'hui constituer un corpus clos, un tout autosuffisant. C'est oublier un peu vite que ces onze courts récits viennent couronner un oeuvre littéraire déjà long et brillant qui avait conduit son auteur à la tête de la jeune Académie française. L'ensemble de l'oeuvre de l'auteur doit être considéré pour comprendre comment un grand bourgeois parisien, homme de lettres et de grande culture, a pu à cinquante ans passés se mettre à rédiger des textes – certes appréciés – mais aussi souvent déconsidérés du strict pont de vue littéraire. En effet beaucoup ont reproché à Charles Perrault de n'en avoir fait qu'à sa guise, s'affranchissant des règles de la littérature qu'il convient aujourd'hui d'appeler classique.
[...] Nous nous trouvons projetés au sein des contes. En évoquant l'analyse et la censure M. Fumaroli fait une concession à l'approche psychanalytique des contes. Ceux-ci apportent des réponses, un savoir qui défie[nt ] la psychanalyse. En effet par le biais de représentations symboliques ou de figures de substitution les textes de Perrault permettent à l'enfant de régler des problèmes rencontrés au sein de sa famille. La marâtre de Cendrillon est par exemple une image de la mère qui n'aime pas son enfant. [...]
[...] En ceci il prouve qu'il applique à la lettre la leçon du Pouvoir des Fables de Jean de la Fontaine. Il met en place un certain nombre de procédés de fascination de la pensée au nombre desquels la revendication d'une ascendance populaire apparaît en premier. C'est particulièrement vrai des Histoires et contes du temps passé dont le frontispice originel faisait montre d'une vieille conteuse et du sous-titre Contes de ma mère l'Oye. Ces contes sont censé refléter ce qui se passe dans les moindres familles où la louable intention d'éduquer les enfants fait imaginer des histoires dépourvues de raison. [...]
[...] Au contraire Marc Fumaroli affirme que le conte est un genre littéraire ne répondant qu'à une loi [ . ] sévère à sa manière celle de la fable Le critique mène donc une réflexion d'ordre générique, les textes de Charles Perrault représentant pour lui, non pas un ensemble vague et hétéroclite, mais une unité homogène. Et si ce genre est très ouvert c'est que l'auteur lui donne de multiples visages. Il ne se défait pas pour autant de la loi de la fable ; récit de fiction ayant pour but d'exprimer une vérité générale ; dont il connaît si bien le pouvoir : Le monde est vieux, dit-on, je le crois, cependant Il le faut amuser encore comme un enfant. [...]
[...] Fumaroli est particulièrement dans le vraie lorsqu'il affirme que le conte selon la conception qu'en a Perrault n'a qu'une loi [ . ] c'est la loi de la fable La fable est un récit de fiction dont le but est d'exprimer une vérité générale, et Perrault était un grand admirateur des fabulistes célèbres. Lorsqu'il parle de ses fables gageons qu'il se pose en moraliste, c'est- à-dire en observateur des mœurs de son temps, qu'il peut dénoncer à l'occasion. La stigmatisation de tel ou tel comportement ayant pour but sa correction. [...]
[...] Ainsi dans La Belle au bois dormant : Je le veux ! (Et elle le dit d'un ton d'ogresse qui a envie de manger de la chair fraîche) suppose une intervention du conteur qui crée un rupture de ton humoristique. Cette dernière est renforcée par le caractère inattendu de la remarque qui pose, dans le discours donc dans la réalité que les ogres existent ! Dans ces conditions le lecteur ne s'attend en aucun cas à recevoir une leçon qui ne fût pas grotesque. [...]
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