Qu'est-ce que le lyrisme ? Dès l'origine, la parole lyrique possède deux caractéristiques qu'elle conservera jusqu'à nos jours en dépit de multiples métamorphoses : elle est chant et expression du Moi. Etude d'une notion littéraire, cours de littérature comparée, Licence de Lettres, Institut Français de Madrid en liaison avec l'Université de Toulouse le Mirail
[...] Le lyrisme, historique et interprétation d'une catégorie littéraire Qu'est-ce que le lyrisme ? Dimidium animae meae Horace, Ode au vaisseau de Virgile L'étymologie nous apprend que l'adjectif lyrique tire son origine du grec lurikos (lurikoz), via le latin lyricus. Il est attesté en ancien français à partir de 1495. Le genre lyrique évoque spontanément l'opéra, l'art lyrique étant celui du chant. Le rapprochement n'est pas fortuit : l'adjectif lyrique découle tout d'abord du substantif grec lura, la lyre, instrument par excellence dont s'accompagnaient les aèdes pendant leurs récitations poétiques. [...]
[...] Le lyrisme n'est pas seulement une catégorie. Le verbe lyrique s'apparente au cri, au soupir, à l'exclamation, à l'insulte ou à la supplication. Le locuteur extériorise une émotion qui s'adresse le plus souvent à autrui, le destinataire du discours, dont on espère susciter la réaction. La lyre et la harpe de Hugo montre comment fonctionne le texte : le poète cherche à communiquer ses sentiments et à faire réagir l'autre, à en faire un interlocuteur, à initier un dialogue. Qu'il s'agisse de l'aimé, de la divinité ou d'un ennemi, cela importe peu. [...]
[...] La parole lyrique devient alors un moyen d'introspection et de déchiffrement du monde. Avant de le dire, écrit encore Reverdy, il faut rendre à soi-même palpable le malaise ou la joie qui bouillonne au fond de soi. Cette réalité d'abord inexprimable devra inventer ses modes d'expression. De la sorte, dans sa dédicace à Arsène Houssaye du Spleen de Paris, Baudelaire rêve le miracle d'une prose poétique, sans rythmes et sans rimes, assez souple et assez heurtée pour s'adapter aux mouvements lyriques de l'âme, aux ondulations de la rêverie, aux soubresauts de la conscience. [...]
[...] Il est donc abusif de réduire le lyrisme à l'expression d'une poésie sentimentale ornée. Il ne s'agit pas de décrire, mais de reconstruire et de laisser parler en soi à la manière du médium. Les vers du Prince de l'exil de Saint-John Perse retrouvent la tradition ancienne de la psalmodie dans un chant universel accordé au souffle poétique : C'est une chanson de mer comme il n'en a jamais été chanté, écrit-il dans la pièce nommée Vents, mais c'est la mer en nous qui la chantera ; C'est un songe en mer comme il n'en a jamais été songé mais c'est la mer en nous qui le songera. [...]
[...] L'auteur l'invoque et chante en sa compagnie. Celle qui règne sur le genre lyrique se nomme, selon certaines traditions, Polymnie et, pour d'autres, Terpsichore. Virgile (70-19) débute sa IVème Bucolique sous le patronage des Muses de Sicile, inspiratrices d'une poésie agreste : Muses de Sicile, haussons un peu le ton, si nos chants disent les bois et les champs, qu'ils soient dignes d'un consul Peu à peu, la Muse, sœur de la noire Pythie c'est à dire proche d'une prophétesse au service d'Apollon, le dieu des Arts, s'identifie au chant, devient parfois le chant lui-même. [...]
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