Pendant longtemps, le monde a cru que la Terre était plate. Cosmas d'Alexandrie, voyageur et géographe du VIe siècle, avait même représenté la Terre selon une carte en T qui centrait l'Europe, l'Asie et l'Afrique autour de l'Asie mineure. Le monde ne se résumait ainsi qu'à ces trois continents. Il a fallu attendre Pythagore et Parménide pour comprendre que la Terre était sphérique. Certains voyageurs se sont donc lancés à la recherche de ces terres cachées qui deviendront entre autre "Le Nouveau monde". Ainsi, grâce à des hommes tels que Vasco de Gama (contournement de l'Afrique), Christophe Colomb (Amérique centrale), Magellan (tour du monde), ou encore Jacques Cartier (Canada), le monde s'ouvrit au regard des hommes et bouleversa toutes les thèses et philosophies établies. Montesquieu dira : "Aujourd'hui nous recevons trois éducations différentes ou contraires : celles de nos pères, celles de nos maîtres, celle du monde. Ce qu'on nous dit dans la dernière renverse toutes les idées des premières". Nous devons donc la découverte de notre monde à ces voyageurs qui nous offrirent une réalité géographique. Cependant, la connaissance de ce monde était encore loin d'être assurée. Quels étaient ces "autres", à quoi ressemblait cet "ailleurs" ? Autant de questions qui restèrent longtemps sans réponses. Toutefois, la littérature put en apporter quelques unes, et en particulier la littérature comparée (...)
[...] L'imagologie est donc devenue pour la littérature comparée un champ d'études particulièrement original et fécond. Pageaux parle de cette discipline en ces termes : il s'agissait de comprendre comment la littérature était tout à la fois le creuset, le moule et le véhicule pour l'élaboration et la diffusion de représentations de l'étranger, de sa culture, dans ses manifestations les plus diverses, allant de l'espace étranger aux types littéraires et aux images ou jugements, idées portées sur les textes et ouvrages critiques Nous voyons ainsi que la littérature comparée et l'imagologie sont totalement en phase. [...]
[...] En étudiant précédemment les attitudes du comparatiste, nous avons vu que la représentation de l'ailleurs oscillait constamment entre manie et phobie. Cette confrontation du regard comparatiste est passionnante car elle offre des visions du monde toutes aussi différentes les unes que les autres, et c'est bien ce qui intéresse la littérature comparée. Pour prendre un exemple d'étude de cette évolution du regard sur l'ailleurs, nous avons choisi la figure de l'Orient. En effet, pendant très longtemps, l'ailleurs était représenté par l'Orient. Or, le thème de l'Orient a toujours oscillé entre la célébration exaltée et la diabolisation, entre fascination et danger. [...]
[...] Nous verrons dans quelle mesure l'acte comparatiste est nécessairement une quête du monde. Ensuite, nous nuancerons les propos de Steiner en remarquant que la littérature n'est pas tant une vision du monde mais une multitude de visions du monde. Enfin, nous étudierons les outils qui permettent à la littérature comparée de nous offrir cette connaissance du monde. Avant d'étudier les véritables avancées intellectuelles que nous a apportées la littérature comparée grâce à son engouement pour l'ailleurs, nous devons déjà comprendre pourquoi l'acte comparatiste nous pousse à aller au-delà. [...]
[...] Cet Orient apparaissait alors comme une terre de délice et synonyme d'éternité. Mais cette terre a également été victime d'un regard dénonciateur qui ne voyait en elle que cacophonie, anachronismes et tyrannie. C'est ce qu'on a appelé le mirage oriental. Ainsi, on n'a jamais cessé de représenter l'Orient comme une vision inversée de l'Occident, avec une constante sexualisation de l'espace oriental. Cet espace devient celui de l'irrationnel, un espace de fantasmes à conquérir par l'occidental, mais aussi un refuge contre la modernité qui permet à l'occidental d'échapper à la routine et de s'évader. [...]
[...] La littérature comparée a donc fourni au monde une connaissance plus juste et plus variée de l'ailleurs, grâce à ces pionniers du comparatisme qui n'ont cessé de s'ouvrir à l'Autre en prônant l'universel, grâce à sa relation étroite avec l'imagologie qui lui permet d'étudier encore plus profondément la représentation de cet Autre, et grâce à ces regards sur le monde qui ont constamment évolué. Mais si la littérature comparée peut nous offrir ces visions du monde, c'est aussi grâce à différents outils sans qui elle ne pourrait avancer. Maintenant que nous connaissons les visées de la littérature comparée, il parait nécessaire de savoir comment elle peut y accéder. La connaissance de l'ailleurs rencontre inévitablement la barrière de la langue, et à ce titre la traduction apparait comme un outil indispensable pour les comparatistes. [...]
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