Introduction: Au XVIIIe siècle, la religion occupe une place importante dans les moeurs comme dans les oeuvres littéraires dans la mesure où c'est une cible fondamentale des écrivains des Lumières. L'oeuvre de Laclos appartient à son siècle et la religion y occupe une place incontournable que le film de Frears restitue. Au-delà du simple effet de réel, la religion est au coeur de l'entreprise du détournement opérée par les deux libertins ce qui contribue à les noircir mais aussi à interroger les croyances religieuses et derrière elles, la place de Dieu.
I- Une place incontournable
1. Mme de Tourvel
Mme de Tourvel est un modèle de vertu, en raison de sa piété. Elle est surnommée ironiquement par Valmont comme la "céleste", la "sensible", la "timide", la "farouche Dévote", autant d'épithètes antéposés, qui la mettent à distance, s'amusent avec ses traits de caractère et le stéréotype de la dévotion auquel elle semble obéir (cf.lettre 5). Libertinage et religion sont antagonistes. Aussi, s'attaquer à une dévote est un défi prestigieux.
2-Les autres personnages
Mme de Tourvel n'est pas un cas isolé. Autour d'elle la religion est présente. Cécile sort du Couvent où elle a été élevée. La plupart des personnages sont pieux ou passent pour l'être comme Mme de Merteuil. Le roman donne à la religion la place qui lui est dévolue dans une société régie par elle, même Valmont reçoit l'extrême onction (lettre 163). Dans le film de Frears, la messe occupe deux scènes et la silhouette du Père Anselme apparaît, ce qui contribue à l'effet du réel d'un film attaché à une fidèle reconstitution historique et à une fidèle adaptation de son oeuvre source. Mais le motif reste discret.
3-Un motif discret
La dévotion des personnages reste raisonnable. On ne saurait voir de bigoterie excessive chez Mme de Tourvel. Elle n'est pas "prude" au mauvais sens du terme (...)
[...] La double entente des mots rend blaphématoires de tels propos. Ceux-ci ne sont pas repris dans le film mais le rapport blasphématoire de celui-ci à la religion se lit parfaitement lors de la première scène à l'église (séquence lorsqu'il regarde la Présidente en train de communier, son regard concupiscent charge d'érotisme le rite auquel elle sacrifie. L'ironie du séducteur à l'égard du sentiment religieux atteint son point culminant lorsqu'il nomme "cathéchisme de débauche" l'éducation sexuelle de Cécile. Une telle affirmation fait écho à son éducation religieuse qui l'a rendue ignorante et sotte. [...]
[...] Frears insiste sur la première, en la caricaturant: la masure du pauvre et les vêtements des personnages sont misérables. La reconnaissance les pousse à s'agenouiller et à baiser les mains d'un Valmont indifférent, statique, théâtral. Celui-ci profite aussi dans le film de la reconnaissance immédiate que lui vaut sa généreuse action pour embrasser sa proie. La fausse conversion dans le roman fait écho à ce premier travestissement et montre un personnage prêt à tout pour satisfaire sa passion. L'ensemble s'accompagne d'un détournement du langage sacré. [...]
[...] Conclusion: Le libertinage amoureux étant lié au libertinage religieux, Laclos ne pouvait faire l'économie de la religion. Elle est toutefois soumise à la question dans une œuvre ironique qui traque les responsabilités. Croyances et pratiques religieuses s'opposent au libertinage dévoyé des deux séducteurs mais ne sont ni un obstacle solide ni une alternative à leurs dominations. [...]
[...] Le couvent apparaît comme un lieu problématique, un lieu de mort, où l'on se soustrait à la vie, on se "sépare du monde" (Danceny, lettre 174) et où il paraît peu certain que l'on sera heureux. Si Mme de Volanges y a mis sa fille pour son éducation, elle ne la voit pas "sans crainte, embrasser cet état" (lettre 170), d'ailleurs Cécile n'y va pas par vocation, mais par honte. Concernant le dénouement, il ne peut se lire comme l'intervention du divin: ce sont les crimes de personnages qui se retournent contre eux. [...]
[...] Autour d'elle la religion est présente. Cécile sort du Couvent où elle a été élevée. La plupart des personnages sont pieux ou passent pour l'être comme Mme de Merteuil. Le roman donne à la religion la place qui lui est dévolue dans une société régie par elle, même Valmont reçoit l'extrême onction (lettre 163). Dans le film de Frears, la messe occupe deux scènes et la silhouette du Père Anselme apparaît, ce qui contribue à l'effet du réel d'un film attaché à une fidèle reconstitution historique et à une fidèle adaptation de son oeuvre source. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture